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Un espoir «modérément fort»

Dans une Suisse peu vaccinée, le moral de la population reste bon, malgré un rejet des politiques menées. Ou quand la sphère privée se rit du bien-être collectif.

Tout va bien. Certes, le taux de vaccination en Suisse (67%) reste à un niveau toujours aussi misérable, en queue du peloton européen, -une anomalie qu’il faudra d’ailleurs un jour expliquer, dans un pays où l’on se gargarise volontiers de valeurs soi-disant indigènes comme le pragmatisme, le sens des responsabilités ou la froideur de tête.

Mais tout va bien, on l’a dit. C’est en tout cas ce que pense une majorité de Suisses. Selon une étude en ligne menée comme chaque année par l’Université de Saint-Gall, sous la sympathique appellation de «Baromètre de l’espoir» (Hoffnungbarometer), 55,6% des participants se sont déclarés satisfaits de leur vie personnelle.

Pourtant, ils ne sont plus qu’un quart à se déclarer contents de la politique nationale. S’agissant de problématiques comme l’environnement, le climat, la crise sanitaire ou les questions sociales, là aussi les grincheux redeviennent majoritaires. Ce qui démontrerait, on s’en doutait un peu, que les enjeux collectifs ne pèsent pas tant que cela dans la vie des gens.

Notons que ce fossé entre confort personnel et bien-être général pourrait être l’une des explications à la forte résistance vaccinale que connaît le pays. Une forme d’égoïsme à base d’autarcie revendiquée, de hiérarchie narcissique, plaçant au-dessus de tout la sphère privée.

C’est d’autant plus vrai que par rapport aux baromètres des années précédentes, le nombre de personnes satisfaites de leur situation personnelle s’avère stable, alors que la confiance dans les politiques menées, elle, diminue. Ce que les auteurs résument d’une formule furieusement suisse: «L’espoir reste modérément fort.»

L’avenir dira si cet espoir se maintiendra en 2022  face aux nouvelles «douceurs» qui attendent le citoyen. Comme l’obligation pour les possesseurs de vélo électrique de rouler tous feux allumés, ou l’utilisation accrue du numéro AVS dans de nombreuses transactions légales.

Mais aussi le recours policier à des moyens intensifiés de surveillance électronique pour lutter notamment contre les risques de terrorisme ou de violence domestique, l’augmentation du prix des timbres postes et celui des véhicules jugés nocifs pour le climat. Sans parler d’une réforme de l’assurance invalidité qui pourrait n’aboutir qu’à une simple et pure baisse des rentes.

Il est en tout cas un citoyen, malgré ces menaces réelles ou fantasmées, chez qui l’espoir apparaîtrait plutôt comme «fortement fort». Ce citoyen, c’est le président de la Confédération pour 2022, le Tessinois Ignazio Cassis. Lui en est sûr et certain, et il l’a proclamé au moment des vœux: même si elle «isole», «nous rend vulnérables» et se révèle «porteuse d’insécurité», «la pandémie ne nous divisera pas».

D’autant moins, a promis le bon Cassis à ses chers administrés, que «où que vous viviez et quelle que soit la langue dans laquelle vous vous exprimez, que vous soyez jeune ou moins jeune, vacciné ou non, le Conseil fédéral est à votre écoute».

On est donc très loin des rodomontades du roi Macron, avouant dans le journal «Le Parisien» son envie de continuer «à emmerder les non vaccinés». Relevons par ailleurs que devant le tollé suscité dans l’Hexagone et au-delà, le meilleur soutien au président provocateur a peut-être été apporté par le cartooniste Xavier Gorce. Le père des fameux pingouins dégivrés s’est exprimé par le biais d’un tweet cinglant -et d’une hauteur philosophique qu’il ne s’agira pas d’oublier dans les débats n’ayant pas fini de s’envenimer autour de l’irresponsabilité supposée des  non vaccinés, surtout en Suisse où ils sont encore particulièrement nombreux-: «Ça emmerde qui que l’on emmerde les emmerdeurs, à part les emmerdeurs emmerdés?».