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Akselos, la révolution des simulateurs numériques

Réduire à quelques heures des calculs informatiques nécessitant habituellement des mois. C’est l’objectif de la scale-up vaudoise Akselos, qui développe un logiciel dédié à la maintenance d’infrastructures techniques.

Une version de cet article réalisé par LargeNetwork est parue dans PME Magazine.

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Parcs d’éoliennes en mer, plateformes pétrolières ou turbines à gaz: autant d’installations qui demandent un suivi rigoureux et pointu. Pour en déceler les failles et réduire les coûts et les risques des interventions sur place, la société Akselos a mis au point un logiciel qui permet de reproduire virtuellement ces infrastructures industrielles de grande complexité. Cette particularité garantit une vue d’ensemble des installations, là où les solutions existantes de «jumeaux numériques» étaient limitées à l’analyse des propriétés d’éléments mécaniques de petite taille (voir encadré).

Son directeur et cofondateur, le Franco-Suisse Thomas Leurent, a toujours été fasciné par ce champ de recherche. Après l’obtention d’un diplôme en mécanique des fluides numérique à l’EPFL, il a l’opportunité de poursuivre ses études auprès du professeur Anthony Patera au sein du prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT). C’est là qu’il commence à prendre conscience du potentiel «quasi-illimité» de la modélisation pour les ingénieurs. «La simulation est cruciale, à la fois pour la sécurité et en termes de coût, explique Thomas Leurent. En termes de sécurité, elle nous aide à identifier les problèmes avant qu’ils ne se produisent, et réduit les besoins d’intervention physique, qui demandent du temps et comportent un risque inhérent, en particulier en ce qui concerne les installations en mer qui sont exposées à des conditions climatiques rigoureuses. Pour ce qui est des coûts, la simulation permet de réduire le temps nécessaire à la réparation, et l’inspection comme la maintenance peuvent ainsi être mieux ciblées.»

En 2012, Thomas Laurent fonde Akselos avec l’Australien David Knezevic et le Vietnamien Phuong Huynh. Son logiciel, baptisé Integra, permet de simuler l’ensemble des processus d’une installation technique. «Le volume massif d’informations qu’il faut compiler est impressionnant. Comme on doit à la fois être précis, rapide et capable de faire des calculs sur des dizaines de milliers de points, l’opération est incroyablement complexe. C’est pourquoi notre solution est une telle révolution, car elle concilie tous les besoins permettant une simulation à la vitesse de la pensée.» Il faut généralement des milliers, voire des millions d’heures, pour développer un tel modèle prédictif lors de l’étape de conception. Tout le défi consiste donc à rendre celui-ci toujours disponible en phase opérationnelle. «Traditionnellement, il n’y a pas de transmission de toute cette technologie d’ingénierie. Désormais, les opérateurs demandent à garder une capacité prédictive pendant la durée de vie des installations.»

Numériser la maintenance

L’entrepreneur veut ainsi «libérer le potentiel économique des jumeaux numériques». Selon lui, de nombreux aspects de l’industrie ont été transformés via la technologie informatique, alors que la maintenance est restée relativement en retrait de cette évolution. Il voit dans l’application de son logiciel à des installations de grande échelle, la suite logique pour les industriels désireux d’optimiser la productivité de leurs installations, tout en réduisant leurs coûts. «Lorsque ces économies et ces rendements sont appliqués à l’échelle de champs, voire d’industries entières, le potentiel économique est énorme.»

Thomas Leurent souligne également l’intérêt écologique de sa solution: en optimisant le cycle de vie et le rendement d’installations existantes, dans l’industrie pétrolière ou gazière, les réserves mondiales d’énergie peuvent être sécurisées à court terme. La scale-up vaudoise se voit ainsi au cœur de la transition énergétique. Elle compte parmi ses principaux investisseurs la compagnie pétrolière Shell, cinquième plus grande entreprise du monde par son chiffre d’affaire. «C’est un partenaire solide depuis trois ans. Nous aimons beaucoup travailler ensemble, et imaginer des solutions pour répondre aux grands défis de notre temps.» À ses côtés également, l’entreprise énergétique allemande Innogy, «un leader dans la transition énergétique, et un investisseur visionnaire». En septembre dernier, les deux entités ont injecté dix millions de dollars dans Akselos. De quoi booster son développement et compléter une équipe qui compte aujourd’hui une vingtaine de collaborateurs répartis entre son siège à l’EPFL Innovation Park et ses filiales de Boston et Hô-Chi-Minh.

Mille fois plus rapide

La solution développée par Akselos a fait ses preuves. Des analyses pour le groupe Shell, justement, qui demandent habituellement de trois à six mois de calcul, ont pu être effectuées en 48 heures seulement. L’entrepreneur souligne l’intérêt de son logiciel: «La méthode que nous avons développée est le fruit de quinze ans de recherches académiques menées au MIT et à l’EPFL. Notre jumeau numérique, mille fois plus rapide que les solutions traditionnelles, permet une analyse et une prédiction en temps réel, sans sacrifier la précision.»

L’entrepreneur ne compte pas s’arrêter là. En plus de son engagement auprès de l’industrie de l’énergie, Akselos est impliqué dans plusieurs projets de recherche et développement aux côtés d’institutions technologiques d’envergure internationale, notamment pour accélérer la transition énergétique, et la conquête spatiale. «Notre secteur évolue rapidement, conclut le CEO, et nous avons pu ces dernières années inviter des talents internationaux à participer au projet. Nous sommes en permanence à la recherche de nouveaux partenaires, afin de faire découvrir le potentiel immense de la technologie Akselos.»

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Scale-up ou start-up?

La scale-up est une société innovante, comptant dix employés au minimum, avec un taux d’augmentation des collaborateurs d’au moins 20% sur les trois dernières années. Ce n’est donc plus vraiment  une start-up, car plus mature, ni tout à fait une société pleinement établie, puisqu’en pleine croissance.

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Fonctionnement des alter egos virtuels

Le concept des jumeaux numériques existe depuis les années 1960. Il utilisait jusqu’ici l’analyse par éléments finis (FEA), une méthode courante dans l’industrie lors de l’étape de conception d’éléments mécaniques. «C’est un outil informatique utilisé pour modéliser une très grande diversité de phénomènes, qui ont trait aux fluides, aux solides, à l’électromagnétique», explique Jan Hesthaven, doyen de la Faculté des sciences de base de l’EPFL. De telles formules sont très largement sollicitées pour le design et l’optimisation de la performance de structures, bâtiments, mais aussi dans l’automobile ou l’aviation.»

Il s’agit aujourd’hui de l’approche computationnelle numéro un dans le domaine industriel. Mais comme tous les procédés informatiques, il a ses limites. Pour Elena Zhebel, fondatrice de l’agence de conseil néerlandaise EZNumeric, elles concernent «notamment le coût computationnel, qui peut devenir important si on s’attèle à un problème complexe; mais aussi la compréhension de son fonctionnement, qui reste compliqué».

Analyse prédictive

La méthode FEA possède par ailleurs un pouvoir prédictif. Pour cette raison, on l’utilise pour identifier des défaillances à venir lors de la mise en opération, c’est la ré-analyse. Elle permet également d’analyser a posteriori l’origine des causes d’une défaillance. «La vision de nombreux ingénieurs était que l’analyse par éléments finis pourrait permettre de construire des jumeaux numériques, et de recourir aux principes premiers de la physique, détaille Thomas Leurent, CEO et cofondateur d’Akselos. Un modèle FEA basé sur la physique permet d’appréhender des conditions d’intervention complexes, et de prédire des évènements futurs. Mais cette méthode était trop lente pour y parvenir.»

Il fallait donc inventer une nouvelle solution. C’est là qu’intervient Akselos, avec son algorithme Reduce Basis FEA (RB-FEA), qui fournit la même précision, avec «un coût computationnel moindre».