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Du pain ou des jeux

Les partisans d’une candidature olympique refusent d’envisager les risques budgétaires évidents de ce genre de manifestation. Tandis que les opposants peinent à considérer la magie tout aussi évidente d’un tel événement.

L’UDC, naturellement, sur l’aile droite, et le PS et les Verts évidemment sur la rive gauche. Au milieu, les radicaux et le PDC. Deux blocs paraît-il s’affrontent dans ce pays. Deux extrêmes idéologiques et un centre libéral pris en tenaille. Théoriquement. Très théoriquement même.

Déjà, les deux ailes droite et gauche, souvent perçues comme dans l’opposition, sont majoritaires au Conseil fédéral, avec quatre représentants, sans que cela apparaisse pourtant dans la ligne gouvernementale. Ensuite, sur des sujets importants comme Prévoyance 2020, les deux blocs se mélangent, une des ailes faisant alliance avec une moitié du centre contre l’autre moitié et l’autre aile. Le PDC et la gauche globalement sont pour la réforme, les radicaux et l’UDC globalement contre.

C’est plutôt, curieusement, sur des sujets de seconde zone mais à lourde charge symbolique que les deux monolithes se reforment. Telle la candidature suisse aux Jeux olympiques d’hiver 2026. Un sujet bateau, les Jeux, avec toujours les mêmes arguments pour, et toujours les mêmes arguments contre. Trop chers, factices et désastreux écologiquement pour les uns. Source de développement économique et saine mise en valeur de l’esprit de compétition et de la gagne pour les autres.

Il est ainsi naturel que, en gros, et avec de nombreuses exceptions, les anti-JO se recrutent plutôt à gauche et à l’UDC, et les pro dans la droite classique – radicale et  démocrate-chrétienne.

C’est ce qui est apparu déjà lors du premier débat public organisé à ce sujet  et qui s’est tenu au Grand Conseil valaisan. Même si cette fois le Vieux-Pays n’est pas tout seul, puisque la candidature de 2026 ne concerne pas moins de cinq cantons: Vaud, Fribourg, Berne, Grisons et Valais.

D’un côté, l’enthousiasme et l’insouciance: on escompte 1,35 milliards de francs de recettes, et 510 millions de contributions publiques. Voilà le budget de 1,86 milliards prestement bouclé. De l’autre, scepticisme et pingrerie toute paysanne: «Cet argent va manquer ailleurs», assurent les Verts Valaisans. Notons, car ce n’est pas souvent, qu’en Valais le WWF et l’UDC sont d’accord: ils sont contre.

Les allergiques aux Jeux peuvent d’ailleurs à cet égard compter sur un argument massue qui a déjà enfoncé maintes portes ouvertes: l’expérience n’a-t-elle pas montré que la plupart des bastringues olympiques se terminaient avec des dépassements  budgétaires colossaux?

Pas de quoi inquiéter les amis des anneaux, tel le président du comité d’organisation Jean-Philippe Rochat: «Par le passé, les dépassements budgétaires portaient sur les investissements, et pas sur l’organisation. Ici, on ne construira presque pas.» Argument qui a l’inconvénient d’en supprimer un autre: celui des abondantes retombées économiques.

D’autant que les anti ont une autre arme fatale à disposition: le vote populaire, que la présidente des Verts suisses Regula Rytz réclame déjà, évoquant un «choix aux lourdes conséquences budgétaires qui doit être fait en toute transparence». Surtout quand on a, comme elle, la conviction qu’«à la fin, les gens diront sans doute non».

Les pro pourtant, surtout s’ils sont radicaux et montagnards, ne se laissent pas impressionner par ces détails mesquins. «Occasion unique de promouvoir une région qui a bien besoin d’un coup de fouet économique», s’enthousiasme ainsi le vice-président du PLR Philippe Nantermod.

Mais attention, la droite olympique n’a pas seulement un tiroir-caisse, elle revendique aussi dans cette histoire un cœur et des émotions. Comme si elle n’était pas bien sûre que le retour sur investissement soit garanti. C’est ainsi que le conseiller national Yannick Buttet sort les trémolos: «J’aimerais que mes enfants puissent vivre ce moment magique.» Du flouze et du rêve: de ces deux mamelles du sport de compétition, il y en aura bien une au moins qui sera au rendez-vous. Que demande le peuple?

En attendant la décision imminente du Conseil fédéral, le débat qui s’annonce va sans doute préciser les contours des deux camps. D’un côté des pisse-froid qui estiment que c’est le pain qu’il faut fournir en priorité, de l’autre les têtes de linotte qui préfèrent organiser d’abord les jeux. Oubliant chacun que l’adage antique – du pain et des jeux –  ne séparait pas les deux.