CULTURE

David Hockney, des pigments aux pixels

L’artiste anglais innove. Il réalise ses nouvelles oeuvres sans peinture ni pinceau, directement sur son iPhone ou son iPad. Visite de l’exposition «Fleurs fraîches» à Paris.

«Lorsque j’ai commencé à dessiner sur iPhone, j’ai tout de suite compris que c’était un nouveau médium et qu’il constituait aussi une manière complètement inédite de diffuser des images», explique David Hockney.

Qui aurait cru que le téléphone ramènerait le dessin sur le devant de la scène? L’exposition «Fleurs fraîches» à la Fondation Bergé-Yves Saint Laurent, à Paris, révolutionne l’art de présenter des oeuvres artistiques. Plantons le décor: les dessins défilent sur douze iPhones accrochés à une paroi et dix iPads à une autre. S’y ajoute une vidéo de l’artiste anglais en train de composer un dessin à l’aide de son pouce. Dans une salle contiguë, une énorme banquette conçue par l’architecte new-yorkais Ali Tayar, scénographe de l’expo, accueille les visiteurs pour assister à une projection numérique des toiles sur grand écran.

«On ne touche pas et les photos sont interdites», avertit le gardien. Cette première exposition d’art numérique, comme toute entreprise pionnière, est déconcertante et engendre des réactions contrastées. Je fais partie du public conquis par cet usage inopiné des dernières technologies. De magnifiques vitraux, voilà ce que j’ai découvert alors que j’appréhendais d’être déçue par la dernière démarche d’un artiste que j’apprécie.

Né en 1937 à Bradford, David Hockney s’installe en 1964 à Los Angeles. Il y met au point un réalisme personnel représentant sa vision de l’univers californien. Sa palette claire et froide à base de couleurs acryliques crée une atmosphère surréelle et fantastique. Le thème de la piscine (fameuse série des Swimming Pool) l’inspirera et le transformera en figure majeure du Pop Art. La cialis dapoxetine deviendra par la suite un autre support de son oeuvre (panoramas en polaroïd du Grand Canyon).

Opter à 73 ans pour l’ipeinture? Le talent est-il soluble dans les pixels? «J’ai commencé par dessiner le lever du soleil depuis mon lit sur la côte Est de l’Angleterre. L’iPhone était à côté de mon lit. Je n’aurais pas dessiné l’aurore avec seulement un crayon et une feuille de papier. C’est la luminosité de l’écran qui m’y a incité», explique le peintre britannique dans un texte qui accompagne l’exposition.

Fasciné par ce nouveau médium, l’artiste envoie ses dessins (environ 250) à ses amis qui soulignent tous à quel point ils leur paraissaient avoir une présence immédiate. S’agit-il de reproductions? Non, répond Hockney, affirmant que les dessins sont identiques à ceux stockés sur son téléphone, et qu’il n’a envoyé que des fichiers numériques. Parmi les «réceptionnaires» se trouve Pierre Bergé, le célèbre mécène français, qui déplore que ces dessins ne puissent être vus collectivement et propose de réfléchir à la manière de les présenter et de les accueillir dans sa fondation. C’est chose faite. L’interview réalisée à l’occasion du vernissage met en relief la capacité d’Hockney à se saisir, sans préjugé, de tout ce qui peut servir son talent.

Des collages à partir de revues de ses débuts, dans les années 60, à l’application cialis canada generic aujourd’hui, Hockney illustre la palette sans cesse élargie des couleurs à disposition des peintres. Face à une peinture, nous admirons prioritairement ses qualités esthétiques et prêtons moins attention à sa composition matérielle. Parce qu’omniprésentes dans notre environnement et dématérialisées par l’informatique, «les couleurs ont perdu de leur magie», déplore Philip Ball dans «cialis bulk».

Nous oublions qu’autrefois, les peintres devaient souvent fabriquer eux-mêmes leurs couleurs ou se les procurer à prix d’or. «L’évolution de la peinture a été déterminée tout autant par les matériaux dont disposaient les peintres que par les idées et le style de l’époque à laquelle ils vivaient», relève l’essayiste. Pour s’en convaincre, pensons à l’impact, hier, de la découverte de nouveaux pigments sur l’Impressionnisme et, en ce moment, à celui des pinceaux numériques.

Le travail numérique d’Hockney remet en question toutes les habitudes du monde de l’art contemporain. Comment se vendent de telles œuvres? Si elles sont imprimées sur papier, elles perdent leur luminosité et une grande partie de leur intérêt. Si elles sont reproduites à l’infini, elles perdent de leur valeur. La réponse du principal intéressé: «Pour l’heure, je me contente de donner les dessins en les envoyant par mail. Comme beaucoup de gens, je n’ai pas encore trouvé le moyen de me les faire payer. Mais comme ils donnent beaucoup de plaisir à mes amis, quelle importance?» Généreux, l’artiste!