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Un entêtant parfum de basse campagne

Le PDC dégaine le premier: son président charge l’UDC avec la légèreté d’un entarteur boutonneux. Comme à chaque échéance, les blochériens peuvent compter sur le manque de sang froid de leurs adversaires pour se racheter une réputation.

Ce gouvernement est donc nul, puisqu’il ne comprend rien aux chats et plus spécialement aux chats errants. Nul et cruel, puisqu’il autorise le tir de ces bestioles, rejetant une motion du PDC Luc Barthassat, qui en réclamait l’interdiction. La Protection suisse des animaux (PSA) s’en indigne, elle qui prône la castration comme «seule solution respectueuse des animaux». Ce qui, énoncé ainsi, sonne quand même un peu bizarre, pour ne pas dire ubuesque.

Le Conseil fédéral ne l’entend pas de cette oreille, sort ses griffes, accusant les chats errants de constituer un danger pour les oiseaux, les lièvres, les reptiles. «Prouvez-le», rétorque la PSA.

On dira que le Conseil fédéral a peut-être d’autres chats à fouetter, comme par exemple sauver le soldat Credit Suisse des prédateurs américains, et on n’aura peut-être pas tort — même si là, ce sont les comptes qui sont errants et les gâchettes fédérales tout à coup moins pressées de faire feu. On regrettera aussi le manque de coordination de certains groupes spécifiques sous la coupole, par exemple celui des motards démocrates et chrétiens. L’un donc, Barthassat, s’émeut de la mort du petit chat quand un autre, Jean-René Fournier, prône à longueur d’année celle du grand méchant loup.

Peut-on mettre ces petites incongruités sur le compte d’une campagne dont le parfum frémissant commence à faire tourner les têtes? Sur celui d’un parti dont la cohérence n’est pas toujours le fort ? — encore que ce ne soit pas le PDC qui change, mais, comme à chaque échéance, le vent du boulet. Reste que l’un des premiers derviches à se manifester a été justement le président Darbellay.

Traiter, comme il l’a fait dans un discours spontané et devant des militants enthousiastes, l’UDC de «secte de débiles», pourquoi pas? Voilà certes qui semble méprisant, insultant, caricatural, mais bon, c’est la campagne, la «cabale» comme on dit dans les bistrots de Conthey et des alentours: dans le feu de l’action tout est permis ou à peu près.

Mais justifier ces propos deux semaines après, non sans les avoir niés jusqu’à ce que la preuve sonore soit apportée, ne paraît pas très sérieux. Surtout que le grand Christophe explique avoir cherché à stigmatiser «l’attitude de l’UDC, son refus de tout compromis, son dogmatisme binaire au mépris de celui qui ne pense pas comme elle.» Mais peut-on imaginer plus grand mépris, dogmatisme plus binaire, que traiter une formation adverse de «secte de débiles»?

Comme si, en plus, l’UDC n’accumulait pas suffisamment de contradictions, d’amalgames douteux et de contre-vérités nauséabondes pour qu’il faille encore utiliser contre elle la pauvre, la misérable arme de l’invective. Claude Ruey au moins, qui avait traité les mêmes UDC de «lâches», avait quand même, pour ne pas injurier l’ensemble des militants, surtout s’ils étaient Vaudois, concédé l’existence aussi de quelques naïfs au sein du Blocherland.

Mais c’est un fait qu’à chaque joute électorale, on voit surgir de partout des alliés malgré eux de l’UDC, qui la dédouanent de ses excès en se montrant aussi brutaux et intolérants qu’elle. Sur ce coup, Darbellay ne se montre pas plus malin que l’entarteur de l’Uni Dufour qui s’en est pris à Freysinger. Mais au moins celui-là avait-il l’excuse de la précipitation. Une tarte à la main, coincé entre Hani Ramadan et Freysinger, on conçoit qu’il ne soit pas aisé de choisir.

Entarter la peste ou le choléra? Une part pour chacun? Mais qui d’abord? Se présenter avec deux tartes? Une fois encore, Freysinger a eu de la chance, c’est lui qui hérite du bon, du joli rôle de victime. «Chance à la canaille» comme on dit dans les vallées latérales. A quoi bon alors lui donner encore du grain à moudre et la corde pour nous pendre?