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Faire du codage la cinquième langue nationale

Les cours de programmation se font encore rares dans les établissements scolaires en Suisse. Deux projets visent à rendre l’enseignement de cette compétence plus accessible.

Alors que plusieurs cantons suisses alémaniques s’écharpent pour décider s’il faut apprendre l’anglais avant le français, la question de l’apprentissage du codage informatique reste étrangement absente du débat public, y compris en Suisse romande. Pour beaucoup, l’informatique à l’école suggère la maîtrise de «Word», d’«Excel» ou de «Photoshop», c’est à dire des applications créées par les géants de l’informatique. L’enjeu n’est pas là. Il est bien plutôt dans la compréhension des outils de programmation.

Dans une société qui se digitalise de plus en plus, être capable de programmer est en effet devenu une compétence aussi importante que lire, écrire ou parler. De plus, l’apprentissage du codage constitue une façon ludique et interactive d’apprendre de ses erreurs, de développer des stratégies de résolution de problèmes.

Des pays tels que la France font office de pionniers en introduisant la formation «aux sciences numériques» déjà à l’école primaire. D’autres pays européens, ainsi qu’Israël et les États-Unis, suivent la même voie. La Suisse, malheureusement, est à la traîne.

Le plan d’étude romand (PER) n’a pas encore intégré l’éducation «aux sciences numériques». En Suisse allemande, le Lehrplan21 inclut par contre une formation en médias et informatique, ce qui a poussé divers cantons à prendre des initiatives dans ce sens. Fait encourageant, la Conférence des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) a décidé récemment d’imposer des cours d’informatique dans tous les gymnases…à partir de 2022. Cette date paraît cependant bien lointaine et ne prend pas en compte le cycle primaire.

Heureusement, des initiatives provenant d’enseignants des Écoles polytechniques fédérales ont su convaincre certains enseignants du primaire et du secondaire que l’apprentissage de la programmation était vital pour leurs élèves.

Le Prof. Hromkovic de l’ETH Zurich a développé et déployé pour les enseignants du matériel d’enseignement de la programmation pour tous les degrés, même si la coordination avec les Pädagogische Hochschulen n’est pas toujours optimale. Une autre belle initiative vient du Prof. Mondada de l’EPFL, le père du petit robot éducatif «Thymio». Un robot simple et sympathique avec lequel il est facile d’apprendre à programmer.

Ce robot a d’ailleurs été adopté par la France pour ses programmes scolaires. L’expérience a montré que «Thymio» permet d’enseigner la musique, la compréhension du principe de forces en physique ou les mathématiques. Cette approche innovante devrait permettre de surmonter la classique question de savoir quelle discipline l’étude de la programmation devrait remplacer.

Constat intéressant: ce sont souvent les jeunes les moins actifs dans les activités scolaires classiques qui se révèlent au travers d’une telle démarche pédagogique et reprennent ainsi goût aux études. Autre bonne nouvelle: «Thymio» a traversé le Röstigraben puisque plusieurs Pädagogische Hochschulen, notamment à Zürich, Lucerne ou St-Gall, forment des enseignants à l’utilisation de cet outil. Quelques 600 élèves du primaire du canton d’Obwald utilisent depuis cette année ce robot éducatif.

Le système éducatif suisse porte trop l’accent sur l’apprentissage des faits. Celui de la programmation favorise la créativité et la réflexion. Soyons donc audacieux et introduisons rapidement l’étude de la programmation dès l’école primaire afin de donner une chance à nos enfants d’être préparés au mieux pour le monde de demain. Faisons du codage notre cinquième langue nationale.

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Patrick Aebischer, chercheur en neurosciences, a dirigé l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) de 2000 à 2016.

Ce texte a été publié initialement dans la NZZ am Sonntag. Patrick Aebischer s’y prononce régulièrement sur des questions en lien avec la digitalisation et l’innovation.