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Transparence, qu’ils disaient

Une initiative populaire est lancée par une coalition qui souhaite obliger les partis politiques à rendre publics leurs budgets et ressources financières. Attention à ne pas cracher contre le vent.

Il y a plusieurs façons d’être obsédé par l’argent. Soit parce qu’on l’aime trop, et en général il s’agit du sien. Soit parce qu’on s’en méfie excessivement, et généralement cela concerne celui des autres. Dans le premier cas on aura plutôt tendance à vouloir dissimuler le pactole, dans l’autre à souhaiter le débusquer et l’exhiber à tout prix pour mieux s’en indigner.

C’est cette deuxième voie qu’a choisi une coalition inter-partis – PS, Verts, PBD, PEV et Parti pirate. En déposant auprès de la Chancellerie fédérale quelque 110’000 signatures, dans le cadre d’une initiative populaire visant à imposer la transparence financière aux partis politiques. Lesquels en gros devraient rendre publics leurs budgets et surtout l’origine des dons reçus supérieurs à 10’000 francs. Les initiants affirment que la mesure contribuerait à renforcer la démocratie directe.

«Il faut jouer cartes sur table, la démocratie vit grâce à la franchise et la transparence», s’enthousiasme la conseillère nationale Nadine Masshardt (PS/BE). Il existerait ainsi un droit du citoyen à savoir d’où vient l’argent dépensé par les partis, surtout lors des campagnes de votations.

D’autant que la Suisse serait sur ce sujet carrément la honte de l’Europe. Si l’on en croit du moins la conseillère nationale verte Lisa Mazzone, rappelant que la Confédération est le seul pays du continent à ne pas avoir de législation sur le financement des partis. Et qu’à ce titre elle se fait régulièrement taper sur les doigts par le GRECO, le bras armé anti-corruption du Conseil de l’Europe.

Tout cela paraît indiscutable. Bien sûr les pays qui se targuent de règles solides en matière de financement des formations politiques sont aussi ceux, comme la France, qui connaissent le plus grand nombre de scandales et de pratiques douteuses mettant en cause des politiciens professionnels. Le lien de cause à effet semble assez évident: limité dans leur quête de manne financière, les partis ont davantage recours aux manœuvres de l’ombre, dessous de table et autres petits micmacs entre amis.

Et puis surtout on peut légitimement se demander en quoi une idée, un programme, une mesure politique deviendrait plus fausse, moins adéquate et plus inopportune, voire carrément nuisible, du seul fait qu’elle ait été sponsorisée ou que celui qui la profère ait palpé une enveloppe ou l’autre.

Il faut un peu mépriser le citoyen, il faut considérer le votant comme une sorte de demeuré, pour croire qu’il soit incapable de décider par lui même, qu’il se laisse impressionné par l’intensité des moyens mis dans une campagne.

C’est en général d’ailleurs l’excuse des mauvais perdants qui n’ont pas su convaincre la volonté populaire: nos adversaires disposaient de plus de moyens. Alors que plus vraisemblablement une votation se perd parce que l’on a été moins bon dans les débats et l’argumentation, ou plus simplement encore parce que l’on s’est mis du service d’une mauvaise idée ou d’un projet irréaliste. Pas parce que l’adversaire a pu envoyer davantage de tous-ménages, coller plus d’affiches, se payer davantage de pages de pub dans des journaux que plus personne ne lit, ou s’aménager un site internet quatre étoiles et faire feu de tout bois moisi sur les réseaux sociaux.

Ou alors, autant le dire: le citoyen est un veau. Auquel cas on devra se résoudre à reconnaître que la démocratie serait le pire des systèmes.

Enfin la transparence paraît être la marotte d’une époque largement sans mémoire, oubliant facilement qu’elle fut, cette sainte transparence, également l’obsession d’institutions aussi recommandables que la Gestapo ou le KGB.