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Masochisme radical

En ne disant pas vraiment non à des alliances avec l’UDC, le PLR prend le risque de perdre son identité historique.

Achtung! Schizophrénie! On aurait presque mal pour eux. Les élections sont encore loin — une longue année — mais déjà les radicaux, à force de contorsions, semblent promis aux tournis et torticolis les plus sévères.

Hanté, le vieux parti, c’est sûr, par un spectre à la grimace trop connue: l’UDC. S’allier? Ne pas s’allier? Garder un sang-froid de comptable en estimant qu’un siège est un siège, et que peu importe la longueur de la cuillère indispensable pour souper avec le diable? Ou au contraire, trancher des liens certes incestueux mais qui pourraient rapporter gros?

On sent bien déjà de quel côté le vent va tourner, malgré les dénégations molles des caciques. Un jour, le président du PLR Philipp Müller ose proclamer: «Nous ne sommes pas aussi proches qu’on le dit.» Et d’invoquer le jugement de l’infaillible NZZ soutenant même que le PLR n’a «jamais été aussi éloigné de l’UDC qu’aujourd’hui».

Pas plus tard que le lendemain, pourtant, que dit donc le président de l’UDC Toni Brunner? Que des alliances avec le PLR seront possibles «dans une dizaine de cantons». Qu’on est bien loin du joli temps de la présidence Pelli «où la doctrine était de refuser tout apparentement avec l’UDC» — ce qui aurait coûté, paraît-il, entre quatre et sept sièges à la droite. Et que, Dieu merci, avec Philipp Müller, «la situation s’est améliorée et nous pourrons travailler plus intelligemment».

Le même Toni Brunner annonce qu’à l’élection au Conseil fédéral les blochériens présenteront un deuxième candidat aux côtés d’Ueli Maurer. Sans dire quel fauteuil serait visé. Pas besoin pourtant d’être lauréat de la médaille Fields pour comprendre qu’arithmétiquement il pourrait bien s’agir du deuxième siège radical.

Bref, en tentant de multiplier, sans trop le claironner à chaque coin de rue, les alliances avec l’UDC pour enrayer un déclin paraissant inexorable (24% en 1979, 15% en 2001), les radicaux risquent d’ajouter à la schizophrénie une bonne dose de masochisme.

L’affaire semble d’autant plus douteuse que la Suisse à laquelle, année après année, s’attaquent les rongeurs UDC, c’est celle d’abord des radicaux. Un système d’équilibre subtil, de consensus, de modération dans l’expression, de réalisme politique, de négociations au micro-scalpel, de défense bien comprise de la place économique.

Le pire, c’est que les radicaux ne sont pas loin de le reconnaître et en profitent même pour bomber le torse, se présenter en rempart contre le bulldozer de destruction massive fomenté par l’UDC. «Lorsque l’UDC, plastronne Philipp Müller, lance des initiatives contraires aux intérêts économiques du pays et aux valeurs libérales, nous disons stop».

Sauf que l’UDC ne fait que cela, tout le temps, travailler contre les intérêts économiques du pays et les valeurs libérales. Dans ces conditions, on pourrait attendre un refus, clair, net de toute alliance. A la place, le président Müller se réfugie piteusement derrière un fédéralisme des plus faciles: «La décision sur les apparentements appartient aux partis cantonaux.»

A la trappe donc une autre valeur longtemps et bruyamment revendiquée par les radicaux: le courage. Ils s’allieront donc avec la bande à Blocher, tout en continuant à marteler, comme Philipp Müller, des principes qui sont l’exact contraire de l’idéologie blochérienne: «Il est impensable que la Suisse tourne le dos à la Cour européenne des droits de l’homme.» Ou encore: «La Suisse doit être un partenaire économique fiable et prévisible.»

Fiable et prévisible, visiblement le parti radical ne l’est plus, lui qui fut longtemps le socle de la stabilité politique suisse. Ce n’est une bonne nouvelle pour personne.