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Helvetica, un caractère obsédant

La longue liste des avatars de la police Helvetica s’allonge, avec l’arrivée sur le marché d’un parfum et de lunettes inspirés par la célèbre typo suisse. Difficile d’y échapper!

Bonne nouvelle: si votre police de caractères favorite est Helvetica, vous avez la possibilité depuis janvier de regarder le monde encadré par des montures à son image. En effet, la firme japonaise Type propose des lunettes «designées» en s’inspirant de certaines caractéristiques de cette célèbre police.

«Si Helvetica est une police pour les non présomptueux, les lunettes éponymes sont, elles, destinées aux personnes qui ne désirent pas donner l’impression d’en porter», précise la pub du lunetier. Comme les caractères, ces montures s’intègrent dans votre univers en devenant une présence visible, accessible.

Des lunettes Helvetica, c’est là le dernier avatar d’une police à nulle autre pareille. Dans le livre «Helvetica – Homage to a Typeface» de Lars Müller, on lit ainsi: «Helvetica n’est pas seulement la typographie préférée des professionnels (…) Helvetica est le parfum de la ville.»

Depuis peu, c’est également le parfum de ses aficionados. Guts & Glory, le parfumeur californien vend en effet un flacon frappé d’un H Helvetica, écrit en lettre d’or 24 carats. Son prix: 32 dollars. Mais quelle est donc l’odeur qu’évoque la police des polices? Le flacon est rempli d’eau distillée et d’air, donc inodore! Il diffuse «The Scent of Nothing». Une parfaite traduction de la neutralité des caractères de typographiques: son utilisateur a tout loisir de laisser s’exprimer sa propre fragrance.

Avant les parfumeurs et les lunetiers, les artistes sont nombreux à s’être exprimés avec l’élégante typo suisse: Jenny Holzer, Barbara Kruger, Liam Gillick, Thomas Locher et tant d’autres. «MAIS MOI, JE TE VOIS», «NOT HERE», «LOOK, I AM BLIND, LOOK»: difficile de ne pas penser aux œuvres de Rémy Zaugg qui a exporté les énormes majuscules d’Helvetica bien au-delà des frontières de son Jura natal. En Suisse alémanique, Alex Hanimann et Verena Thürkauf troquent également leurs pinceaux contre ces caractères intemporels.

En décoration intérieure, la tendance du moment consiste à customiser son intérieur avec de grosses lettres à déposer ici et là. Elles permettent à chacun de choisir le mot qui lui parle, qui stimule son imagination. Parmi elles, les copies d’Helvetica se taillent la part du lion.

Alors qu’aujourd’hui, sur les ordinateurs, le recours au menu «Police» semble banal, un coup d’œil à l’histoire de la typographie s’impose. Parmi les 100’000 polices qui existent, chacun a sa préférée. Quel chemin parcouru depuis Gutenberg! La création à Bâle, en 1957, de la police Helvetica par Max Miedinger est marquée d’une pierre blanche. Par sa simplicité, son efficacité, sa logique et sa clarté, elle est rapidement devenue l’emblème de la typographie suisse et a remodelé le monde moderne.

On la retrouve partout, dans la pub, les signalisations routières et ferroviaires, le métro new-yorkais, les logos de multinationales, les affiches de films, les pochettes de disques, les mugs ou les t-shirts. Le film «Helvetica», de Gary Hustwit, nous convainc définitivement de son omniprésence. «Dans les rues de la planète, ces caractères sont comme de l’oxygène. Vous n’avez pas le choix, vous devez les respirer», relève Simon Garfield dans «Sales caractères» (Seuil).

Impossible, donc, d’échapper à Helvetica. Cyrus Highsmith, un jeune graphiste new-yorkais, en a administré la preuve en se lançant le défi de passer une journée sans Helvetica. Dès le saut du lit, il a commencé à rencontrer des difficultés pour s’habiller (attention aux étiquettes et instructions de lavage) et a dû se rendre à pied à Manhattan (le métro en est tapissé).

Il n’a pas pu lire le New York Times, a détourné son regard de quantités de mots dans la rue, est ressorti de restaurants à cause de leurs cartes, n’a acheté aucun produit signalé en Helvetica. Pas question bien sûr de surfer sur Internet ou d’utiliser sa carte de crédit. Alors qu’il aspirait à terminer son éprouvante journée devant la TV, il a enfin constaté que les chiffres de sa télécommande étaient en… Helvetica!

Son sosie Arial, mal vu au sein de la communauté du design, n’est pas parvenu à détrôner la superstar des polices. Et même si Calibri, la police par défaut pour Word, Outlook, PowerPoint et Excel, est la plus employée dans le monde occidental, la séduction d’Helvetica continue à opérer.