Après un mois de grève de la faim, le journaliste tunisien semble encore en forme. Sa cause est peut-être desservie par son apparence.
Ces dernières semaines, l’image du journaliste Taoufik Ben Brick est apparue dans tous les médias. L’opposant au régime tunisien pose amicalement avec Marie-Claire Mendès France, des reportages de la télévision le montrent en butte aux tracasseries policières jusque dans sa chambre d’hôpital.
La télévision nous offre ainsi l’occasion de constater par nous-mêmes que ce défenseur des droits de l’homme, qui en est pourtant au trentième jour d’une grève de la faim, bouge, lit son courrier, parle au téléphone et remet en cause avec vigueur le régime qui entrave sa liberté de parole et de mouvement comme celle de certains de ses proches.
Trente jours sans manger, et l’homme reste encore enveloppé, apparemment en forme. On ne peut s’empêcher de guetter les signes de faiblesse, voire d’épuisement, sur le visage de ce journaliste qui se propulse ainsi sur le devant de la scène médiatique en hissant au même mât que ses revendications les privations qu’il s’inflige.
Or Taoufik Ben Brick a apparemment des réserves et garde une mine d’homme bien nourri, sûr de lui, voire prospère. Sa physionomie et son allure présentent, plutôt qu’une victime, un homme habitué à bien vivre, à s’exprimer et s’imposer. On se dit secrètement: «Mais il va encore très bien, je croirai complètement à ce qu’il subit le jour où je le verrai émacié et incapable de se lever de son lit».
Son apparence, bien sûr, n’enlève rien à son courage, ni à la justesse de son combat. Mais elle peut le desservir. Il faut donc vraiment que la télévision enregistre les cris des femmes de sa famille empêchées de lui rendre visite à l’hôpital, ou l’agressivité des policiers qui retiennent les journalistes occidentaux loin de lui, pour que les téléspectateurs compatissent avec un homme qui n’incarne pas immédiatement la privation de liberté.
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Pour signer la pétition de soutien à Taoufik Ben Brick, connectez-vous sur le site de Reporters sans frontières.