LATITUDES

“Lausanne reste ma ville de cœur”

Elisabeth Gerritzen entame cet hiver sa 7e saison sur le Freeride World Tour (FWT). La skieuse lausannoise, double gagnante de l’Xtreme de Verbier et Championne du monde 2021 de «freeride», est une jeune femme de convictions qui étudie le droit en master à l’Université de Genève. Interview.

Quelles sont vos ambitions pour cette saison 2022-2023?

Elisabeth Gerritzen: Faire de mon mieux sur le circuit en m’affranchissant de la pression de favorite qui m’avait passablement handicapée l’hiver dernier. Mon rêve reste de gagner le classement général et de m’imposer lors de l’étape reine à Verbier, mais je refuse d’en faire une obsession. À 27 ans, je suis déjà presque une vétérante, ça fait bizarre… J’ai également sorti mon film Fragments choisis en octobre. Il a été présenté au High Five Festival d’Annecy et reste visible sur Internet. Je me suis investie à cœur ouvert dans ce projet mêlant images sportives et plus intimes.

En 2021, peu après votre victoire sur l’Xtreme, vous choisissiez de faire votre coming-out sur Instagram. Pourquoi?

J’étais tout à coup sous la lumière des projecteurs et j’ai voulu en profiter pour faire quelque chose qui avait du sens. C’était un peu un coup de tête, mais je me sentais suffisamment forte pour encaisser d’éventuelles réactions déplaisantes qui ne sont d’ailleurs jamais venues. Je l’ai fait pour la jeune fille que j’étais et qui se cachait un peu et surtout pour toutes celles qui lui ressemblent peut-être encore aujourd’hui… Ado, les modèles de femmes lesbiennes inspirantes m’avaient manqué. C’était aussi une occasion de mettre en cohérence ma sphère privée et ma sphère publique.

Comment est née cette passion du ski et des montagnes chez la petite citadine que vous étiez?

Mes parents sont des passionnés de ski et de montagne. Nous allions chaque week-end à Verbier. J’ai vite été prise dans l’engrenage du ski de compétition sur piste, mais je n’y excellais guère. Alors, avec quelques amis rebelles du Ski Club, on s’est mis à construire des petits sauts en bordure de piste puis à s’aventurer dans la poudreuse. L’année de mes 16 ans, les premières compétitions qualificatives du FWT passaient par Verbier et on s’est inscrits. Le reste s’est fait naturellement à force de passion et d’heures passées à rider. À 20 ans, j’intégrais le circuit mondial.

Et les expériences que vous y avez vécues ont réveillé en vous une conscience féministe…

Oui. Le milieu du freeride est très masculin et reste teinté de patriarcat. Or, depuis toute gamine, je suis très sensible à l’injustice. En 2020, grâce notamment à la combativité de la snowboardeuse Anne-Flore Marxer (voir son interview dans le Lausanner 04, ndlr), les primes de courses féminines ont été alignées sur celles des hommes. Depuis l’hiver dernier, je participe à une commission du FWT sur l’égalité de genre. Les choses vont donc plutôt dans le bon sens, mais il reste du travail. Pourquoi par exemple lors de l’Xtreme, les filles ne partent pas du sommet du Bec des Rosses comme les garçons ?

Quel rapport entretenez-vous avec Lausanne?

Mes parents se sont installés à Lausanne, dans le quartier de Chailly, quand j’avais 3 ans et j’y ai vécu jusqu’à mes 20 ans. Lausanne reste ma ville de coeur. Des souvenirs d’enfance et de jeunesse m’y attendent à chaque coin de rue. J’y reviens régulièrement. Lausanne est comme un village et une grande ville à la fois. Ça bouge beaucoup dans tous les domaines. On y trouve des accès privilégiés au Léman et j’en ai beaucoup profité. C’est aussi au bord du lac et dans les rues pentues de la ville qu’est né mon amour du cyclisme. Il y a deux ans, je suis allée jusqu’à Marseille en pédalant et l’été passé je suis allée rendre visite à mon grand frère à Amsterdam de la même façon. J’aime cette liberté !

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Ses adresses

Café-restaurant La Couronne d’or (Rue des Deux-Marchés 13, Lausanne): «J’ai beaucoup fréquenté ce café-bar-restaurant typiquement lausannois dans ma jeunesse. Il est central, mais loin de l’agitation, accueillant, bon marché et propice aux discussions entre amis.»

Restaurant Le Dalat (Place du Vallon 5, Lausanne): «J’ai longtemps eu mes habitudes dans ce restaurant asiatique qui a un cachet incroyable, car situé dans l’ancienne gare du funiculaire qui reliait la Cité à Sauvabelin. Je recommande les excellents bò bún végétariens.»

Point de vue Plage de la Tour Haldimand (Avenue de la Tour-Haldimand, Lausanne): «C’est un magnifique endroit pour admirer le lac dans le calme et se baigner. Il y a généralement peu de monde. On y accède par un charmant petit chemin piétonnier.»

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Une version de cet article réalisé par Large Network est parue dans The Lausanner (n° 10).