GLOCAL

Elections fédérales: les bonnes idées des partis

Partie comme elle est, la grande bataille électorale de l’automne pourrait se résumer à un concours de réflexes pavloviens. Inventaire.

Battre la campagne, certes, mais aussi, complétait Raymond Queneau, courir les rues et fendre les flots. Au moment d’aborder la dernière ligne droite avant les élections fédérales d’octobre, le père de Zazie aurait pu ajouter: brasser de l’air. Au vu en tout cas de ce que proposent les partis gouvernementaux.

Le PDC d’abord, qui fait le plus fort. Manger une raclette et boire l’apéro à Evolène avec le conseiller national Maurice Chevrier, déguster une saucisse avec le secrétaire général Reto Nause au festival du Gurten, partager un dîner aux chandelles à Estavayer avec Thérèse Meyer, prendre un café avec Doris Leuthard, voilà, en effet, des perpectives qui devraient faire bondir d’allégresse et de reconnaissance l’électeur potentiel.

Ou plutôt toucher son coeur. Puisque selon le président du parti Christophe Darbellay, il s’agit avant tout d’une opération de bienfaisance: l’argent ainsi récolté par des mises aux enchères sur eBay ira à une fondation de soutien aux enfants atteints de cancer (le café dans le bureau de Doris Leuthard a déjà dépassé les 4’000 francs, record mondial sans doute pour un petit noir). Une belle idée juste pour faire parler de soi, mais, assure Reto Nause, en adéquation avec les valeurs du PDC.

D’avantage, c’est sûr, que la grande distribution de brosses à dents qui avait tenu lieu de plan marketing lors de la campagne 2003. Et qui s’était soldée pour le PDC, on s’en souvient, par un fiasco électoral du genre pan dans les gencives.

Puisqu’on en est aux opérations de propagande en accord avec les principes de base et les obsessions de toujours, les radicaux qui s’étaient lancés dans la campagne au contraire en tentant de casser leur image et de plaider pour une Suisse jeune, féminine, urbaine, se souviennent tout à coup des fondamentaux. Le grand vieux parti vole ainsi au secours de l’armée: manne financière de 4 milliards par an pour nos très chers gallonnés et pourcentage de militaires en service long passant de 15 à 30%. Rien que ça.

Le conseiller national Didier Burkhalter justifie ce retour de flammes pour la chose militaire en expliquant que «le PRD reste, qu’on le veuille ou non, un parti gouvernemental.»

Les radicaux ont pourtant bien tort de se faire un tel souci. La renaissance de l’armée est déjà en marche, la grande, la vraie, celle qui se noie dans les détails. La preuve: lors d’un contrôle à la caserne de Thoune, des recrues ont été obligées de se partager des lames jetables pour se raser et en ont été quitte pour un test sida. Mauviettes, va.

De son côté l’UDC continue sa saga animalière, par voie d’affiches, avec un mouton noir menaçant l’immaculé troupeau des moutons blancs –une nouvelle mouture en un montre un poignardé dans le pré. Les blochériens promettent d’autres victimes.

Le PS lui aussi renoue avce la tradition, en l’occurence celle du calimero rouge de confusion: en réponse aux sondages qui s’avèrent jusqu’ici plutôt désastreux, certains camarades, plutôt qu’initier une réelle remise en question, préfèrent accuser les sondeurs et les médias, tous vendus aux bourgeois comme on sait.

Bref: gadgets chez les uns, vieilles lunes chez les autres, les partis gouvernementaux ne semblent pas vraiment prêts, dans cette campagne, à tout mettre sur la table, sans parler d’innover ou même, soyons fous, d’avancer quelques propositions concrètes.

Comme si elle était morte, la politique, la vraie, la grande, celle qui se préoccupe des petits détails, qui se laisserait interpeller par ce sondage: qu’un tiers des Suisses qui renonçent à se marier le font pour des raisons fiscales. Comme si à l’action on préférait l’appartenance partisane et les réflexes pavloviens qui vont avec.