LATITUDES

«Neurodroits» et les autres mots de novembre

Le langage révèle l’époque. Notre chroniqueuse s’interroge ce mois-ci sur l’usage des termes «neurodroits», «lombricompostage» et «saisons».

Neurodroits

La question est dans l’air, faut-il édicter des neurodroits pour nous protéger? L’enjeu: empêcher des logiciels d’analyser l’activité de notre cerveau pour modifier nos états émotionnels, orienter notre façon de penser ou tout autre usage malveillant. Des intrusions nullement futuristes. En effet, en analysant le cerveau d’un sujet avec l’IA, il est déjà possible de reconstituer le discours oral qu’il a entendu ou de reproduire des images des photographies qu’il regardait.

Un tel décodage nécessite pour l’heure d’insérer la tête de l’intéressé dans un scanner. Impossible donc de l’effectuer à notre insu. Et demain? Les progrès des neurotechnologies requièrent «l’élaboration d’un instrument normatif mondial et d’un cadre éthique», cialis europe online. Aujourd’hui, le Chili est le premier État au monde qui, grâce à des neurodroits, entend prémunir ses citoyennes et citoyens contre les dérives potentielles du recours aux neurotechnologies. Il y a deux ans, Marcello Ienca, alors chercheur au Collège des Humanités de l’EPFL, rédigeait des recommandations afin de développer un cadre pour «ces droits humains de l’esprit». Qui s’y attelle en Suisse?

Lombricompostage

Les vers de terre, en assurant l’essentiel de la vie du sol, sont des contributeurs méconnus mais très précieux pour notre alimentation. Ainsi, ils participeraient plus que la Russie à la production céréalière mondiale. Sans eux, la terre se meurt. Or, ils sont menacés. De nombreuses études montrent les effets délétères du glyphosate sur ces créatures qui transforment sans relâche les matières végétales en décomposition en humus riche en nutriments. Ce processus est connu sous le nom de lombricompostage.

Un terme récurrent dans «Humus», le roman du philosophe et essayiste français Gaspard Koenig, dont les deux héros entendent, chacun à sa manière, sauver la planète grâce aux lombrics. L’occasion de rappeler que «la terre sur laquelle vous marchez, la terre qui nous donne à manger, c’est en bonne partie du lombrimix, c’est-à-dire du caca de ver de terre», le message délivré par leur mentor pendant leurs études d’agronomie. Le lombricompostage ne concerne pas les seuls agriculteurs. Les lombricomposteurs – ces récipients remplis de vers de terre qui se nourrissent des déchets que nous leur apportons – s’invitent de plus en plus dans les cuisines. La performance en librairie d’«Humus» va sans doute contribuer à leur succès.

Saisons

«Y’a plus de saisons!», disent depuis toujours les anciens. Et si l’avenir leur donnait raison? Un très long été a empiété cette année sur le printemps, en débutant en mai et sur l’automne, en se terminant en octobre. Quant à l’hiver, MétéoSuisse le prévoit doux. Le réchauffement climatique a un impact qui a été démontré sur la durée des saisons. Celles-ci ne devraient cependant pas totalement disparaître sous nos latitudes. Mais leur durée est en pleine mutation, avec des étés plus longs et des hivers plus courts.

A l’occasion de la récente «Journée internationale contre le changement climatique», le 24 octobre, les «Quatre Saisons», le chef d’œuvre de Vivaldi vient d’être réinterprété et mis au service de la défense du climat. Un chef d’orchestre et un météorologue espagnols l’ont revu à l’aune du dérèglement climatique. Un concert détonnant destiné à alerter. Ce n’est pas une première. Pour marquer le début de la COP26 en 2021, quinze orchestres l’avaient interprété en utilisant la modélisation climatique pour décrire l’avenir si les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas maîtrisées. A défaut de regarder la réalité en face, écoutons sa disharmonie!