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Peur sur les urnes

Le changement climatique est la préoccupation principale des citoyens à deux mois des élections fédérales. Pas sûr que cela change la donne.

Il a donc fait un peu chaud. Personne n’a oublié non plus qu’une ville comme la Chaux-de-Fonds ou une région comme le Haut-Valais ont subi de plein fouet de graves catastrophes d’ordre directement ou indirectement météorologique. Il n’en fallait pas plus pour faire du changement climatique la star des élections fédérales à venir.

Un sondage d’Ipsos Suisse pour Le Temps l’établit tout net: la préoccupation principale des électeurs suisses n’est plus à chercher ailleurs, devant le système de santé en perdition, les inégalités sociales toujours bien présentes et l’inflation au grand galop, ce qui démontre combien désormais, si l’on en doutait encore, le réchauffement est pris au sérieux.

Sale temps donc pour les climato-sceptiques et adieu à cette époque pas si lointaine où il était de bon ton, dans les chaumières, de minimiser la menace climatique, si pas de s’en gausser à la moindre baisse de température.

Les conséquences électorales d’une telle prise de conscience, si l’on en croit la même étude, ne sont pourtant pas forcément celles attendues. Pas de tsunami vert par exemple à l’horizon,  puisqu’à la question de savoir quel parti serait le plus à même de gérer au mieux la crise climatique, la réponse qui arrive en tête avec 27% est un décourageant et découragé «aucun».

Certes, les Verts dominent sur cette thématique, mais avec un tout petit score (15%) et talonnés même, c’est un comble, par le seul parti où le climato-scepticisme a encore un peu table ouverte: l’UDC (14%).

Le fait que les Verts, qui ont fait du grand réchauffement leur plus fougueux et omniprésent cheval de bataille, pourraient ne pas en profiter dans les urnes est un phénomène qui s’observe aussi dans les pays voisins – à l’exception de l’Allemagne. Les montées de températures ne semblent pas faire grimper parallèlement les degrés de sympathie et d’adhésion envers les formations écologistes.

L’une des causes avancées serait la dilution du message principal en des combats annexes apparaissant plus futiles. Comme si l’on hésitait à croire que des gens obsédés par l’écriture inclusive ou plus généralement des thématiques sociétales sur fond de wokisme mal digéré, puissent être suffisamment sérieux pour gérer l’ampleur et la globalité d’une crise comme le changement climatique.

On pourrait y ajouter l’entêtement à diaboliser une énergie plus ou moins décarbonée comme le nucléaire, entêtement qui contribue, on le voit un peu partout, à offrir au charbon prétendument condamné de beaux jours devant lui.

Il existe enfin un paradoxe qui freine, sans doute encore plus nettement, la marche en avant des Verts. Les populations ont beau s’effarer de plus en plus devant les éléments déchaînés, les soleils écrasants et les grandes sécheresses, elles ne semblent toujours pas prêtes à adopter les solutions radicales proposées par l’écologie militante, sur fond de décroissance, solutions pourtant largement plébiscitées par le monde scientifique devant l’ampleur du désastre. La plupart des autres formations continuent à se gausser sans trop de vergogne, d’une écologie qualifiée allègrement de «punitive». Sans doute ne fait-il pas encore assez chaud…

Notons enfin, à la lueur de cette même étude, qu’une peur chasse quand même vite et facilement l’autre. Des thématiques considérés il n’y a pas si longtemps comme plutôt anxiogènes semblent ne plus effrayer grand monde.

Le terrorisme? Les problèmes d’éducation? La remise en cause en cause des programmes sociaux et de l’Etat-providence? Le chômage? Vous voulez rire.