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«Immersion» et les autres mots de décembre

Le langage révèle l’époque. Notre chroniqueuse s’interroge ce mois-ci sur l’usage des termes «immersion», «auto-encaissement» et «avent».

Immersion

Les offres d’expériences immersives abondent. Le marketing s’est emparé de cet adjectif: immersif. Le voici accolé à un très large éventail de pratiques: jeux, films, technologies, spectacles, musiques, peintures, musées, expositions, voyages, vacances, fitness. Même l’armée n’échappe pas à cette tendance et propose une «immersion» dans le cockpit d’un avion de la patrouille suisse.

L’évènement «Van Gogh Alive» est présenté comme «l’exposition la plus visitée du monde» avec 8,5 millions de visiteurs. Elle est à voir, mais aussi à ressentir, à Lausanne. Musiques, couleurs et lumières mixées ont pour but de plonger les visiteurs au cœur des œuvres du peintre.

Pourquoi une telle soif d’immersion? Toute immersion (le fait de plonger dans un milieu particulier) suppose le retrait d’une immersion antérieure. En l’occurrence, depuis des mois, l’immersion contrainte, vécue et toujours crainte, entre les quatre murs de son logis. Briser ces murs en expérimentant des sensations nouvelles dans la réalité virtuelle ou augmentée relève-t-il de la survie ou d’une fuite? Cette démarche éphémère n’est qu’un prélude au retour obligé à la réalité. Et une submersion sous des infos anxiogènes.

Auto-encaissement

Dans les commerces, les caisses traditionnelles laissent progressivement leur place aux caisses automatiques et aux smartphones des clients. Cet auto-encaissement menace le métier de caissier et de caissière. Ainsi, au printemps prochain, le géant orange proposera son application SubitoGo, aujourd’hui testée dans quatre-vingt filiales, qui permettra de scanner et de payer les produits sans passer par une caisse ou une borne.

Présentée comme une nouvelle facilité d’achat, ce report des tâches sur les consommateurs exploite une main d’œuvre gratuite, étonnamment complaisante. Seules quelques personnes, la plupart du temps âgées, estiment pouvoir soutenir le personnel condamné à disparaître en s’accrochant aux caisses classiques. Un combat à contre-courant avec la perspective de l’arrivée prochaine de magasins sans personnel.

La disparition progressive des contacts humains dans les secteurs privés et publics pénalise celles et ceux qui ne maîtrisent pas les outils numériques. Or, en Suisse, l’illectronisme toucherait une personne sur dix. Autant de futurs exclus.

Calendrier de l’Avent

Période liturgique qui précède Noël, l’avent (du latin «advenire») n’est plus guère utilisé que pour les calendriers, qui se multiplient cette année sous toutes sortes de formes inattendues.

Ils étaient, à l’origine, destinés à faire patienter les enfants jusqu’à Noël. La pratique religieuse allemande, qui remonte au 19ème siècle, récompensait quotidiennement les petits avec une image pieuse logée derrière une porte qu’ils ouvraient avec ravissement. Un temps révolu.

Devenus laïcs, les nouveaux calendriers sont passés à la 3D et s’adressent à tous les goûts, budgets et âges. Il y en a avec des jouets pour les enfants, des croquettes et gelées pour les animaux de compagnie, des gourmandises pour les adultes (chocolats, thés, bières, alcools), des échantillons de produits de beauté, parfums et des bijoux pour les femmes, des produits virils pour «les vrais gars» (dixit la pub Manor) et, pour les couples, la possibilités de tester des sextoys et des jeux coquins avec des «surprises excitantes pour elle et lui» (calendrier de l’Avent érotique Amorana). Rien pour les non binaires.

Les calendriers de l’Avent ont cessé de tempérer l’impatience des enfants pour tenter de rendre cette période la plus excitante possible, avant l’orgasme attendu à Noël.