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Super Parmelin

Le conseiller fédéral vaudois a semé la désolation en faisant main basse sur le Département fédéral de l’économie. Faut-il pour autant avoir peur d’un gouvernement qui ne ressemble plus à rien?

Bien sûr, on jugera sur pièce. N’empêche, le Conseil fédéral nouveau parait déjà sentir le bouchon. Ce serait presque inédit, un premier couac de l’exécutif avant même son entrée en fonction. La fausse note en plus est intervenue lors d’un exercice qui d’ordinaire soulève peu de vagues, débouche sur des solutions raisonnables, équilibrées et gluantes de consensus, comme il se doit: la répartition des départements.

Sauf que là, tout est parti en quenelles. La faute à un homme, un seul, comme on sait, décidant soudain, fort de son droit d’aînesse, de se la jouer façon grenouille qui se voyait plus grosse que le boeuf: Guy Parmelin.

Certes, on pourra trouver que l’unanimité trop unanime des sarcasmes, moqueries et indignations devant la décision du vigneron de Bursins de s’emparer du Département fédéral de l’économie, a quelque chose de suspect. Que cela sent le bashing de classe, le mépris bobo et le quant-à soi médiatique. On moque le monolingue, l’isolationniste, le terrien. Parmelin, c’est un fait, a tout faux dans une séquence où le bon ton voudrait qu’on fût, pour revendiquer quoi que ce soit, à minimum polyglotte, multilatéraliste enragé, européen fanatique et urbain à tout crin.

Le quotidien Le Temps enfonce allègrement l’épouvantail, s’effarant d’un ministre de l’Economie «qui n’a pas le réseau industriel ni l’expérience d’ouvreur de marchés de son prédécesseur, ni l’habitude du partenariat social, ni la couleur politique idoine pour aller négocier à Bruxelles, ni les aptitudes linguistiques qui facilitent tant les contacts internationaux». Peut-être qu’à ce point de dénuement, il conviendrait de saluer le courage de Parmelin, s’il n’était pas évident d’y voir un narcissisme et un égoïsme mal placé.

Parmelin entend-on, aurait dû se sacrifier dans l’intérêt du pays pour laisser le fromage de l’économie à la supposée beaucoup plus compétente Karin Keller-Sutter. Le problème avec cette idée de sacrifice, très facile à articuler, c’est qu’elle n’a d’évidence que quand on l’applique aux autres, et qu’elle est donc très rarement mise en pratique. Pour obtenir un acte d’héroïsme, la méthode la plus efficace reste encore de pousser Winkelried dans le dos.

Bref, la consternation est générale. «Ce n’est pas beau», se lamente la NZZ. Des frissons passent même dans les dos les plus coriaces: ciel, l’UDC tient désormais les finances et l’économie. Des gros malins, comme le président du PDC Gerhard Pfister, en sont à proclamer à tout vent que ce Conseil fédéral est «le plus faible depuis vingt ans».

Et encore, Pfister ne parlait-il que du gouvernement actuel, en exercice jusqu’au 31 décembre, au sein duquel, selon lui, «seuls Doris Leuthard et Alain Berset» disposeraient «d’une vision pour la Suisse». Exit Leuthard, «la vision pour la Suisse» se réduit donc au monocle de Berset. Voire aux qualités encore à éprouver de Karin Keller-Sutter. À moins que Gerhard Pfister ne considère que Viola Amherd soit un phare de la pensée et de l’action politique. Ce qui expliquerait pourquoi lui Pfister, personnage hyper cassant mais à la tête reconnue partout comme très bien faite, et candidat naturel, ait pourtant décliné tout appétit au Conseil fédéral.

C’est dans ce contexte confus et délicat que l’éléphant Parmelin, par son seul caprice, oblige à la naissance d’un gouvernement tout particulièrement baroque, où, en gros, personne n’est à sa place.

Tout n’est pas noir pour autant. On ne pourra au moins pas reprocher à ce gouvernement de se résumer à un ramassis de technocrates. Avec des femmes qui contrôlent la police, l’armée et les transports, un vigneron qui dirige l’économie, un paysan qui tient les finances, un quasi trumpiste aux affaires étrangères et un Alain Berset en stabulation libre, cet attelage ne peut de toute évidence, que décevoir en bien.