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Dr. Mörgeli and Mr. Christoph

Déchu de son poste de conservateur de musée par l’Université de Zürich, l’idéologue de l’UDC reste un drôle de zèbre dans le landerneau politique. Rappels et portrait.

Il avait dit, il y a quelques jours, que la perte de son emploi serait pour lui «une petite tragédie». Petite parce que sans doute chez ces gens-là, chez ces UDC purs, durs, ultra et libéraux, la perte d’un emploi, plutôt qu’à une tragédie, s’apparente en théorie davantage à un acte de justice immanente, décidé par la ferme et infaillible main du marché.

Mieux encore: à un beau miracle si la perte d’emploi touche un de ces fonctionnaires haïs, gras, paresseux, improductifs et surpayés. Un peu donc le profil de Christoph Mörgeli, comme semblent nous l’apprendre les circonstances de son licenciement. Un Mörgeli pourtant considéré comme une des têtes les plus pensantes et virulentes de l’UDC. Mais voilà: entre les principes impitoyables et l’individu fragile, il y a toujours une légère inadéquation. Va donc pour une «petite tragédie».

Partie, comme on sait, de dangereux guérilleros vivant dans une quasi clandestinité, l’UDC n’a pas hésité à se dire une fois encore victime du système et à qualifier de «scandaleux mobbing politique» le renvoi de Christoph Mörgeli de son poste de conservateur du Musée d’histoire de la médecine de l’Université de Zurich.

C’est l’un des nombreux paradoxes de cette formation autrefois de paysans et d’artisans et devenue, sous la houlette du milliardaire Blocher, un nid de notables et de nantis: se sentir à chaque coin de rue victime des notables et des nantis.

Qu’importe la longue liste des reproches professionnels dressés à l’encontre de Mörgeli et de son musée: «collections poussiéreuses», «informations dépassées», «muséographie vieillotte», sans parler d’un absentéisme chronique et de «l’insuffisance de ses recherches». Tout ça pour 105’000 francs à temps partiel. Comme professeur titulaire ce n’est pas plus brillant: cours peu suivis et dont «une partie d’entre eux, faute d’intérêt, n’ont pas été donnés depuis plusieurs semestres».

Souvent présenté comme le bras droit, si pas l’âme damnée, voire le «Tullius Detritus» de Blocher, Mörgeli, de ce côté-ci de la Sarine en tout cas, n’a guère fait parler de lui qu’au travers d’affaires anecdotiques. Outre son licenciement, il y avait eu en 2010 par exemple «l’affaire Mörgele». En commission Pascal Couchepin, dont l’élocution approximative a pourtant a toujours été proverbiale, voulant évoquer le Dr. Mengele, le boucher d’Auschwitz, avait eu ce lapsus: Dr. Mörgele. S’en était suivie une de ces vaines et stériles polémiques dont l’UDC a le secret, Mörgeli lui-même hurlant à «l’injure immense».

Il y avait eu aussi, en décembre 2008, à deux jours de l’élection du successeur de Samuel Schmid, l’une de ses bêtes noires, ce spectaculaire accident de voiture dont il avait été victime. Christophe Mörgeli, en route pour Berne, avait embouti une camionnette à l’arrêt, détruisant totalement son propre véhicule, devant être désincarcéré et subir une opération à la colonne vertébrale après une contusion à la moelle épinière. Ebloui par le soleil, dira-t-il simplement.

Docteur en littérature allemande, historien, intellectuel dans un parti qui en compte peu, Mörgeli s’est pourtant faire connaître comme l’aboyeur en chef des troupes UDC, que ce soit à la tribune du Conseil national ou dans ses chroniques meurtrières de la Weltwoche. Entré à l’UDC à l’âge de 17 ans, l’homme il faut dire avait commencé par voter contre l’élection de Blocher à la tête de l’UDC zurichoise, le trouvant trop modéré.

Avant de changer d’avis et de déclarer l’avènement de Blocher «événement national du siècle» et d’en devenir l’idéologue et le stratège. C’est lui aussi qui avait milité pour l’entrée de Blocher au Conseil fédéral avec ce fort pronostique: «Ce n’est pas l’UDC qui se diluera dans le gouvernement, mais le gouvernement qui se diluera dans l’UDC.» Lui encore qui traitera Deiss de menteur, Villiger de corrompu et dénoncera le «gauchisme moralisant» de Calmy-Rey.

C’est son plaisir, son bonheur, la diatribe, la provoc, la polémique plus que le travail parlementaire, selon ses collègues, lui qui est élu au Conseil national depuis 1999. Plus aussi, on le sait maintenant, que le travail tout court.