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Gratuité de la gratuité

Le Conseil fédéral voulait rendre payants les tests Covid. C’était sans compter sur une bigarrée et insouciante fronde parlementaire.

Des mollassons sous la coupole? C’est en gros ce que laisse entendre le conseiller national radical Philippe Nantermod. En cause, le consensus qui se dessine au Parlement en faveur du maintien de la gratuité des tests Covid, contre l’avis du Conseil fédéral, qui entendait les rendre payants dès le 1er octobre.

L’idée de l’exécutif, en faisant payer les tests, était bien sûr d’ajouter une pression supplémentaire sur les récalcitrants à la vaccination. Les forces de gauche ont été les premières à s’opposer à ce coup bas au porte-monnaie, suivies bientôt par le Centre. Puis de manière plus surprenante par l’UDC qui s’était d’abord prononcée, et de manière plutôt virulente, cet été, contre la gratuité.

Bref, le parti radical se retrouve seul à vouloir faire cracher au bassinet les non-vaccinés. D’où le coup de gueule de Philippe Nantermod, jamais aussi motivé que quand il s’agit d’endosser le rôle de tête à claque nationale: «Je ne vois pas pourquoi on devrait financer ces tests de loisirs, alors que le vaccin est une solution moins chère et plus efficace. Personne n’est tenu de se faire vacciner, mais ce n’est pas à la collectivité d’assumer le coût de ce choix».

Sans parler du fait que «maintenir la gratuité du dépistage, c’est perdre tout le côté incitatif de la vaccination». «On est au bout du tunnel. Ce n’est pas le moment de lâcher. Ce serait bien que les élus aient une colonne vertébrale!» Des mollassons, on vous dit.

Posons-le franchement: il arrive parfois que les têtes à claques les plus forcenées n’aient pas complètement tort. C’est ce qui pourrait apparaître en tout cas quand on examine les arguments des partisans de la gratuité.

«Les tests payants constituent une charge supplémentaire, en particulier pour les jeunes et les individus ayant peu de moyens financiers, et sont donc inacceptables», affirme l’UDC. Ce n’est peut-être pas faux, mais c’est oublier que ces tests n’ont rien d’obligatoire et qu’il reste à chacun l’option de se faire vacciner ou de ne plus aller nulle part.

Et puis cette défense soudaine des jeunes et des miséreux dans la bouche de l’UDC sonne quand même comme un sommet d’hypocrisie et d’opportunisme, elle qui s’est toujours contrefichée, et dans les grandes largeurs, de ces catégories de citoyens. Rappelons, pour la petite histoire, ce saisissant passage du discours de 1er août prononcé cette année par le conseiller fédéral UDC Guy Parmelin: «Si je ne me fais pas vacciner, le contribuable vacciné doit-il payer mes tests? Pour moi, la réponse est clairement non». On ne saurait mieux dire.

A gauche, on entonne un peu la même chanson, plaignant les démunis qui n’auraient pas les moyens de payer leurs tests. Ainsi fredonne le communiqué des Verts: «la protection des plus vulnérables doit rester au premier plan de la lutte contre la pandémie. Pour le groupe parlementaire, la fin de la gratuité des tests Covid est incompréhensible et dangereuse. Il invite le Conseil fédéral a en reconduire la gratuité à partir d’octobre, afin qu’un maximum de gens se fassent tester et protègent ainsi leur entourage.

Certes, l’air de la défense des économiquement plus faibles est ici plus en accord avec les valeurs habituellement défendues à gauche. Mais un mauvais esprit pourrait facilement rétorquer que, s’il s’agit vraiment de protéger son entourage et que l’on n’a vraiment pas les moyens de payer les tests, il existe une solution beaucoup plus protectrice et parfaitement gratuite. Cela s’appelle la vaccination.