La déroute électorale à Zurich du PLR et de l’UDC au profit des partis verts montre de quel côté penche désormais l’humeur des citoyens. Pourtant, bien fol est qui s’y fie.
Confiance dans la catastrophe. Ce mantra signé Maurice Chappaz, les Verts peuvent le psalmodier jusqu’à plus soif. Déjà, le désastre de Fukushima en 2011 avait un temps dopé le vote écologiste. Cette fois l’omniprésent catastrophisme autour du réchauffement climatique, porté à ébullition par une jeune prêcheuse scandinave débarquée à Davos et des étudiants qui découvrent les charmes tranquilles de la grève, a tourneboulé les consciences et renversé les urnes.
C’est ainsi qu’à Zurich, comme on sait, les élections cantonales ont viré au méchant tsunami pour les Radicaux, libres et responsables comme vous et moi, mais sur le coup en retard d’une bataille. Ainsi que pour les climato-sceptiques UDC, aux yeux desquels la terre, à défaut hélas de ne plus être plate, continue de se porter à peu près comme un charme.
Cet effet «climat», «propre aux sociétés prospères» comme le souligne le politologue Michael Hermann, – davantage en tout cas que la peur de l’immigration et du terrorisme – a même profité aux faux frères Vert’libéraux. C’est dire si désormais tout ce qui brille n’est pas or: il est même surtout vert.
Bien sûr l’effet des cataclysmes environnementaux sur les humeurs électorales s’estompe en général assez rapidement. On y pense puis on oublie. Certes le réchauffement climatique est parti pour durer et hanter nos écrans et nos états d’âme pour longtemps. Sauf que, souvent, avec un bulletin vert dans l’urne, on se tient quitte de toute autre forme d’engagement. Quand viennent les premières mesures concrètes dictées par une politique environnementaliste qu’on a plébiscitée, c’est la soupe à la grimace.
Allez demander au sieur Macron Emmanuel, avec sa touchante taxe carbone, si verte qu’elle l’a précipité dans un enfer jaune. A quoi le politologue Oscar Mazzoleni ajoute que «les priorités peuvent très vite changer en fonction d’évènements extérieurs imprévisibles». Sous-entendu, un bon gros attentat et le curseur pourrait s’inverser à nouveau d’ici les élections fédérales de cet automne. Confiance dans la catastrophe, même à droite.
Il n’est pas sûr non plus que les partis défaits sur la question du climat en tirent la moindre leçon ni le moindre changement de cap. Cela a d’ailleurs mal commencé, sitôt la fessée administrée. Coordinateur romand de l’UDC, Oskar Freysinger, fraîchement descendu de son mayen, juge que l’angoisse climatique «ce sont les médias qui montent cela en épingle. Les réseaux sociaux suivent. Tout s’enchaîne et vous obtenez une psychose généralisée». Un peu, en somme, comme les communications de l’UDC sur la montée du péril islamiste.
Côté radical, on serait un poil plus enclin à un début de mea culpa, mais tout en restant diablement prudent et évasif. À la manière du conseiller national Nantermod, estimant qu’il allait bien falloir, un de ces quatre matins «faire en sorte que les électeurs favorables à une écologie de droite se retrouvent dans le programme de notre parti». Sauf que cette écologie de droite, notion à peu près aussi affriolante et mobilisatrice que celle de néolibéralisme de gauche, il existe déjà un parti qui en fait son beurre: les Verts’libéraux.
Les motifs d’espoir demeurent pourtant pour les mous du climat et résident essentiellement, on l’a dit, dans l’austérité de programmes verts, nettement moins populaires dès qu’ils sont mis en application. L’UDC bernois Manfred Bühler l’avoue tout net dans Le Temps: «Nous devons mieux communiquer le fait que toutes les taxes et interdictions imaginées par les Verts toucheront les classes moyennes et menacent même la paix sociale en fin de compte.»
Bah! Les dits Verts pourront toujours suivre le conseil du poète jusqu’au bout: «Confiance dans la catastrophe. Bien dormir sous les injures.»