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Contraception: où (en) sont les hommes?

Alors que de nouvelles méthodes de contraception masculine sont à l’essai, le sujet reste délicat à aborder au sein du couple. Les hommes, comme les femmes, font de la résistance.

Le préservatif reste aujourd’hui encore la seule méthode de contraception efficace à la disposition des hommes, disent Martine Jacot-Guillarmod, et Maria Demierre, respectivement médecin associée au Département femme-mère-enfant et conseillère en santé sexuelle au CHUV. C’est d’ailleurs l’un des moyens contraceptifs les plus répandus en Suisse. Il est employé par 38% des hommes âgés de 15 à 49 ans, selon la dernière étude en date menée par l’Observatoire suisse de la santé (Obsan). Mais au-delà du geste de l’homme, son usage implique une véritable responsabilité partagée au sein du couple, et il est donc difficile de ranger le préservatif dans la catégorie des contraceptifs masculins.

L’autre méthode la plus connue est la vasectomie. 10% des hommes sexuellement actifs y ont eu recours, selon l’Obsan. Mais nombreux sont ceux qui frémissent à sa simple évocation, car cet acte chirurgical est considéré comme irréversible. «Par définition, la contraception doit donner le choix à la personne de retrouver sa fertilité, souligne Maria Demierre. Les vasectomies ne sont réversibles que dans 20% des cas. C’est pourquoi elles ne doivent être réservées qu’aux hommes qui ne souhaitent pas ou plus avoir d’enfants.»

Entre le préservatif et la vasectomie, le cœur des hommes balance rarement. L’idée même de contraception peut d’ailleurs être perçue par certains hommes comme une atteinte potentielle à leur virilité. «Nous avons choisi d’adapter nos pratiques sexuelles en fonction du cycle menstruel de mon amie, explique ainsi Laurent, informaticien lausannois de 32 ans. Je comprends qu’elle ne souhaite pas prendre la pilule et en subir les effets secondaires. Je ne souhaiterais pas non plus prendre ce type d’hormones si elles étaient un jour disponibles sur le marché pour les hommes.»

Méthodes à l’essai

Souvent annoncée, mais jamais adoptée, la pilule masculine contient encore des dosages hormonaux élevés et peut impliquer le même type d’effets secondaires que ceux observés chez les femmes (acné, troubles de l’humeur, etc.), en plus marqués. Cette conséquence peut aussi avoir des causes psychologiques, par exemple lorsque le médicament est pris contre son gré. Diverses autres méthodes de contraception hormonales, par gels ou injections, sont en cours de développement dans le monde. En Inde par exemple, le RISUG (Reversible Inhibition of Sperm Under Guidance) en est à la phase III des essais cliniques. L’efficacité de ces méthodes hormonales n’est pas encore démontrée et une commercialisation à court terme n’est pas prévue, d’autant plus qu’elles nécessitent chez l’homme environ trois mois pour éviter la maturation des spermatozoïdes, alors qu’elles sont bien plus rapidement efficaces chez les femmes.

Autre technique à l’essai: la cryptorchidie artificielle ou contraception masculine thermique par remontée testiculaire. Selon des études menées en France, cette méthode permettrait, après deux ou trois mois d’exposition à la température corporelle, d’abaisser le nombre de spermatozoïdes en dessous de 1 million par millilitre d’éjaculat. D’autres solutions thermiques se basent enfin sur l’altération de la fonction de thermorégulation du scrotum par le biais de bains chauds, d’accessoires chauffants, voire d’ultrasons. Elles entraînent cependant une réduction des spermatozoïdes inférieure au seuil contraceptif considéré comme efficace.

Résistances partagées

Si les choses évoluent lentement et que les laboratoires demeurent peu intéressés à financer la recherche dans ce domaine, ce n’est pas que le fait des hommes et de leurs réticences supposées. «De tout temps, les femmes ont été davantage concernées par les questions de contraception, puisque ce sont elles qui portent la grossesse, et surtout, qui portent le choix de poursuivre ou d’interrompre la grossesse, observe Martine Jacot-Guillarmod. Rien qu’au niveau physique et biologique, l’impact est plus important pour elles.» Ainsi, en raison des risques encourus et de la mobilisation qui en a découlé, les choses ont historiquement davantage bougé en matière de contraception féminine que masculine.

Certains facteurs psychologiques peuvent également entrer en compte: «Les résistances à la contraception masculine sont grandes, notamment chez les femmes qui ne souhaitent pas transférer cette responsabilité aux hommes, alors qu’en cas d’oubli, ce sont elles les premières concernées», souligne la spécialiste.

Pour Martine Jacot-Guillarmod, la communication au sein du couple demeure donc un élément central. Un homme et une femme communiquant bien choisiront une forme de contraception convenant mieux aux deux partenaires. Or, cette situation est encore loin d’être la norme. «Pour beaucoup d’individus et de couples de tous âges, la contraception demeure un sujet difficile à aborder. Dans de nombreuses cultures, la contraception reste une question exclusivement féminine. Très souvent, les hommes préfèrent ne pas empiéter sur ce terrain. Parfois, on ne leur laisse pas non plus l’opportunité.»

Pour la gynécologue, les professionnels concernés pourraient contribuer à faire évoluer les mentalités en encourageant les femmes à venir accompagnées de leurs partenaires lors des consultations et en impliquant un peu plus systématiquement les hommes à cette problématique. Un point de vue que partage Adeline Quach, médecin-responsable à la consultation de santé sexuelle de la Fondation PROFA (entité active dans les questions liées à l’intimité et reconnue d’utilité publique par le canton de Vaud): «Nous essayons d’inclure le partenaire dès l’adolescence, afin de l’impliquer davantage, par exemple lors de prescriptions de pilules d’urgence ou dans le cas d’une interruption de grossesse.»

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Une version de cet article est parue dans In Vivo magazine (no 15).

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