KAPITAL

Un colonel à la tête d’un empire horloger

Lorsque Walter von Känel a pris la direction de Longines, la tâche confiée par Nicolas Hayek était claire: la marque devait passer numéro 1 dans sa gamme de prix. Une mission aujourd’hui accomplie.

En cette période de transition pour l’horlogerie, une figure comme celle du directeur général de Longines est une source d’inspiration pour tout passionné de montres. D’origine allemande et de nationalité suisse, Walter von Känel dirige depuis trente ans la marque fondée en 1832 à Saint-Imier (Jura bernois). Toujours fidèle à l’entreprise qui l’impressionnait déjà dans sa jeunesse, l’ancien colonel de l’armée explique sa recette du succès: un savant mélange de rigueur et de présence sur le terrain.

Vous vous investissez dans le monde horloger depuis plusieurs décennies. Quels conseils donneriez-vous à un jeune cadre d’entreprise horlogère suisse?

Quatre mots d’ordre: consistance, continuité, effort principal, rester dans sa ligue. Il est important de choisir son positionnement et de s’y tenir. Il faut préserver la cohérence d’une marque dans le temps, de ses produits et de son marketing, tout en se déplaçant sur le terrain et en restant à l’écoute du marché et de son environnement.

Quels sont les plaisirs de la vie que vous appréciez le plus?

En tant qu’ancien officier de l’armée suisse, je suis un passionné d’histoire militaire, particulièrement de la Seconde Guerre mondiale. Je collectionne, entre autres, les tableaux de peintres régionaux et les vieux livres. Enfin et surtout, j’apprécie de passer du temps avec ma famille, notamment dans ma vieille ferme rénovée dans le Jura.

Une vie saine est-elle importante pour un manager?

Se lever tôt, bien remplir ses journées, avoir du plaisir dans son travail quotidien, c’est la clé du succès.

Quels sont vos sports préférés?

Dans le passé, je faisais beaucoup de sport: des marathons, biathlons, du ski et du ski de fond. Aujourd’hui, je privilégie les balades avec mes chiens.

Comment décririez-vous la montre parfaite?

J’aime décrire une montre comme un objet qui suscite de l’émotion. Elle doit également retranscrire parfaitement certaines valeurs telles que la tradition, la fiabilité, l’élégance et la sobriété. Longines a toujours su respecter l’ADN de ses produits, tant esthétiquement que philosophiquement.

Combien de montres possédez-vous?

Je travaille dans l’horlogerie depuis plus de cinquante ans. Depuis toutes ces années, j’en ai perdu le compte!

Voyez-vous de grandes nouveautés arriver dans le secteur horloger?

L’horlogerie est un secteur qui continue de surprendre. Son potentiel de développement reste encore et toujours très grand. Je vois de belles choses se profiler, notamment dans le domaine du quartz qui est encore loin d’avoir dit son dernier mot. D’ailleurs, je porte aujourd’hui une Conquest V.H.P., un modèle quartz aux propriétés uniques, notamment par sa capacité à réajuster les aiguilles après un choc ou après une exposition à un champ magnétique, mais aussi du fait de son calendrier perpétuel, sa batterie très longue durée et sa précision de plus ou moins 5 secondes par année.

Vous sentez-vous souvent sous pression?

Non. J’ai la chance d’être entouré par d’excellentes équipes, à cela s’ajoute le plaisir de travailler pour l’horlogerie suisse et pour la fabuleuse marque qu’est Longines au sein de Swatch Group.

Combien de jours par mois voyagez-vous?

Énormément! Il est important pour moi de rester proche de chacun de mes marchés, de voir sur place leur situation, de définir leurs attentes, d’écouter leurs propositions et réclamations. J’ai fait mon premier voyage en Chine en 1971 et depuis j’ai utilisé plus de 25 passeports.

Êtes-vous intéressé par les réseaux sociaux?

Regardez mon bureau, je n’ai pas d’ordinateur et mon téléphone ne permet pas cette fonctionnalité. Je reconnais néanmoins le potentiel de ces nouveaux médias, raison pour laquelle j’ai attribué cette tâche à une équipe spécialisée dans ce domaine.

Quelles sont les qualités de la Suisse que vous appréciez le plus?

Sa rigueur, sa constante recherche d’une certaine perfection, son esprit entrepreneurial, sa démocratie directe, sa nature et ses paysages. La Suisse est un petit pays géographiquement, mais a le potentiel d’un grand État. Chaque fois que l’avion se pose à l’aéroport de Zurich, je me dis: «Quel bonheur d’être suisse en Suisse!»

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Une version de cet article est parue dans le magazine Les Ambassadeurs (no 22).