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Zig et Zoug

Entre le jeune Aeschi et le vieux Maurer, potentiels futurs collègues UDC au Conseil fédéral, le plus contemporain n’est pas toujours celui qu’on croit.

Le jeune et le vieux. Le consultant et le paysan. Rien n’est fait, bien sûr. Si néanmoins Thomas Aeschi entre ce 9 décembre au Conseil fédéral, il formera avec son collègue de parti Ueli Maurer un duo des plus prometteurs. Zig et Zoug. N’ont-ils pas l’un et l’autre ce parler franc et naïf des fins d’apéro, qui plaît tant aux militants?

Aeschi le dit tout net. Il faut couper. Mais pas n’importe où. La culture oui. L’agriculture, jamais. C’est une question de vaches, voyez-vous. De vaches sacrées plus précisément. L’agriculture, pour Aeschi en est une, et du genre plutôt grasse. Constitutive pas loin d’une identité nationale sans cesse ruminée.

Trouvant soudain tous les défauts possibles à la mondialisation bienheureuse et la saine et libre concurrence, Thomas l’ultra libéral martèle que nos paysans doivent être soutenus coûte que coûte. Pour cette décisive raison: «L’agriculture a une longue tradition en Suisse et ne peut pas rivaliser avec les Etats-Unis ou le Brésil, où les tracteurs sont dirigés à distance par GPS sur des surfaces énormes.» Bref, le Heidiland n’arrive plus à suivre la cadence.

On pourrait à l’inverse, dans le monde selon Zoug, réduire sans dommage dans les dépenses pour la culture «qui ont fortement augmenté ces dernières années». C’est ainsi que le moderne et fringuant Aeschi réhabilite le poussiéreux cliché du Suisse qui trait sa vache sans se préoccuper de rien d’autre. Et ressuscite l’image souvent moquée à l’étranger d’un pays d’alpage et d’inculture, dont la plus grande production intellectuelle se résumerait à l’invention de l’horloge à coucou.

Aeschi en rajoute une couche dans «24 heures» en révélant avoir acheté une vache de la race d’Hérens. «Parce qu’elle est combative, qu’elle fait partie de la tradition suisse et qu’elle est en déclin». Tout est dit. Non au grand remplacement de nos bêtes à cornes. Si l’élection se joue à une poignée de suffrages, les dix voix de la délégation valaisanne pèseront lourd.

Ueli Maurer a certes aussi son bétail intouchable. Malgré ses allures et ses origines paysannes, ses idoles ne sont pourtant pas montées sur sabots. On avait failli l’oublier, le Suisse, le vrai, en plus d’agriculteur, naît également soldat. Aussi quand le parlement veut ramener le nombre de nos trouffions à 100 000, Ueli réplique à l’artillerie lourde. 100 000, c’est tout juste, pleurniche-t-il, le nombre de spectateurs lors d’un match du FC Barcelone au Camp Nou.

Au contraire d’Aeschi, Maurer se montre là d’un modernisme échevelé. Moins parce que le trend est à la guerre, à la redécouverte que face à un ennemi féroce, impitoyable, fou, il faudrait peut-être répondre à la sulfateuse plutôt qu’avec un joli bouquet de grands principes et de larmoyantes commémorations. Non si Maurer tape juste, c’est par la fulgurante actualité de sa comparaison.

Le football n’est-il pas la métaphore la plus exacte et, partant, la plus populaire, du monde dans lequel il faut bien vivre? Où les coups peuvent être aussi bas que francs, où les fautes intelligentes côtoient les attentats à hauteur de la carotide. Où ce ne sont pas toujours les plus forts ni les plus méritants qui gagnent mais, souvent, les plus malins ou les plus chanceux.

Reste qu’un stade de foot, fut-ce celui du Camp Nou, cela risque effectivement de faire peu, de ne pas servir à grand chose le jour où il s’agira de défendre une patrie en danger. Tout juste à brailler comme récemment lors d’un match du championnat de France à Nice, d’après un de ces chants stéréotypés dont les supporters sans imagination ont le secret, et revisité pour l’occasion: «Daesh, Daesh, on t’enc… ».