LATITUDES

Parler en public: la fin du calvaire

Perdre ses moyens durant un discours: une fatalité? Pas si sûr. En empruntant des techniques à l’univers du théâtre et de l’improvisation, il est possible de devenir un orateur plus convaincant et plus serein.

«Chacun possède en soi la capacité à être un bon orateur: il suffit simplement de la révéler.» Metteure en scène, comédienne et formatrice depuis plus de vingt ans, Sandra Amodio anime depuis 2010, en collaboration avec quatre autres coaches, un atelier dédié à l’art de prendre la parole en public à la Haute école de théâtre de Suisse romande-La Manufacture. Trois journées de formation pour aller au-delà de son trac, sa timidité, sa peur du jugement, ou tout autre obstacle qui rend parfois difficiles nos occasionnelles — ou fréquentes — allocutions.

Alors, quels sont les secrets pour mieux s’exprimer en public? «L’atelier s’articule autour de trois axes fondamentaux: la posture, la voix et le regard», explique Sandra Amodio. Et de détailler: «Il s’agit dans un premier temps d’être bien ancré dans le sol, de devenir son propre appui. Ainsi, on permet notamment une meilleure circulation de la colonne d’air, on oxygène mieux son cerveau, les idées sont plus claires et il est donc plus aisé de gérer son trac.»

Deuxième volet: la voix. «C’est elle qui donne à l’audience l’envie d’écouter. Nous devons dynamiser notre discours, le rendre vivant, travailler sur le volume, le timbre, l’intensité. Quant au regard, c’est la connexion avec le public: un élément essentiel pour que notre prise de parole ait un impact.»

Autant de techniques sur lesquelles les participants travailleront durant l’atelier, par le biais d’exercices ludiques et personnalisés. «En effet, nous accueillons au maximum six personnes par session, afin d’être en mesure de répondre au mieux à leurs besoins spécifiques.» La première journée débute par une interview filmée: une manière pour chacun de «prendre conscience de ses failles et, sur cette base, déterminer les points sur lesquels se focaliser».

Les participants? «Il s’agit pour la plupart de professionnels amenés à prendre la parole en public dans le cadre de leur fonction, comme des chefs d’entreprise, des politiciens ou encore des assistants universitaires ou des travailleurs sociaux. Mais certaines personnes entreprennent cette formation à des fins uniquement personnelles.»

La voie de l’improvisation

Une variété de profils que l’on trouve également parmi les participants à l’atelier proposé par la Compagnie lesArts à Genève. Spécialisée depuis dix ans dans l’improvisation théâtrale, cette dernière offre une approche un peu différente de celle de La Manufacture. «Ici, nous travaillons avant tout sur le lâcher-prise, la confiance en soi», souligne Christian Baumann, responsable de la formation.

«Bien souvent, on est pris au piège de ses propres barrières, on prête trop d’attention au regard des autres.» Sur six séances de trois heures, les participants se voient donc proposer des exercices en tout genre, comme réaliser un petit exposé sur un sujet qui leur est totalement étranger. «Ainsi, ils doivent se concentrer sur la forme du discours et non sur le fond. On a trop souvent tendance à faire l’inverse, en oubliant que la façon dont on transmet le message est primordiale. Prenez l’exemple d’une même blague racontée par deux humoristes: là où un Gad Elmaleh parviendra à amuser son audience, un autre fera peut-être un bide.»

Autre tuyau: se focaliser avant tout sur son audience plutôt que sur soi-même. «Lorsqu’on prend la parole, c’est pour transmettre un message, pas pour s’entendre parler, précise Christian Baumann. En gardant cela en mémoire, on entre dans une autre dynamique et on évite de se braquer sur sa propre performance.»

Enfin, tout un pan de la formation tourne autour de l’interaction avec le public: «On juge souvent la qualité d’un orateur sur sa façon d’accueillir les questions de l’audience. Or, de nombreuses personnes se sentent déstabilisées lors d’un tel exercice. Les techniques inspirées de l’improvisation aident à mieux accepter cette interférence.»

Bref, on l’aura compris, le talent oratoire peut s’entraîner. Mais attention, que l’on opte pour l’une ou l’autre formation, encore faut-il s’exercer régulièrement, car comme le rappelle Christian Baumann: «On a vite fait de retomber dans ses petits travers.»
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«J’ai gagné en assurance»

Directeur de l’Association pour la danse contemporaine à Genève, Claude Ratzé a suivi en septembre dernier l’atelier de La Manufacture.

«Ma position m’amène souvent à prendre la parole en public, et j’avais le sentiment que je pouvais m’améliorer dans ce domaine. Sans que le problème soit insurmontable, je ne me sentais pas à l’aise. J’avais souvent l’impression de perdre l’attention de mes interlocuteurs, de parler dans ma barbe, de me laisser envahir par mes émotions. L’atelier de La Manufacture m’a permis de découvrir quels étaient mes défauts et de quelle manière je pouvais m’améliorer. J’ai appris notamment à mieux me tenir, à prendre garde à ma respiration, à regarder mes interlocuteurs, à dire les choses de manière concise et surtout à ponctuer mon discours. J’essaie à présent d’y placer davantage de suspense. Et quand je sens qu’un auditeur n’est pas attentif, je parviens à prendre une certaine distance, à m’observer et à déterminer pourquoi cela ne marche pas. En mettant en pratique ce que j’ai appris, j’ai gagné en assurance.»
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Pour plus d’informations:
Ateliers de la Manufacture.
Atelier de la tadalafil otc.
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Une version de cet article est parue dans la revue Hémisphères.