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Science: les visages de l’excellence suisse

Tous les indicateurs l’attestent: la Suisse brille dans les domaines liés à la recherche. La preuve par l’exemple, à travers les portraits de dix jeunes chercheurs et de dix laboratoires uniques qui font rayonner le pays.

Smartvote à l’échelle européenne

Les recherches du politologue suisse Alexander Trechsel, 38 ans, ont largement dépassé les frontières nationales pour revêtir une portée européenne. Aujourd’hui, le premier détenteur de la «Chaire suisse sur le fédéralisme et la démocratie» à l’Institut universitaire européen de Florence incarne la réussite d’une vision postnationale de la politique. S’inspirant de Smartvote, qui permet à chaque électeur suisse de visualiser le parti ou la personnalité politique qui lui est le plus proche en répondant à une série de questions, le Bernois a eu l’idée d’appliquer ce modèle à l’échelle de l’Union européenne. Résultat: «EU Profiler».

Ce système a été utilisé pour la première fois lors de l’élection du Parlement européen le 7 juin 2009. Résultat: 2,5 millions de visiteurs dans les six semaines précédant le scrutin. Il permet, par exemple, à un électeur français de réaliser qu’il possède le plus d’affinités politiques avec un candidat letton ou encore irlandais. «A terme, ce système facile d’utilisation pourrait déboucher sur une prise de conscience plus grande chez les citoyens européens que les positions thématiques dépassent le seul fait national.» EU Profiler a remporté en octobre 2009 le Prix du Forum mondial sur la e-démocratie.
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Des chants d’oiseaux pour comprendre le cerveau

Comment les oiseaux mémorisent-ils le chant de leur père? Pour le Suisse Richard Hahnloser, l’étude des chants d’oiseaux permet de comprendre le cerveau. A l’âge de 34 ans, il a été nommé professeur ordinaire à l’Institut de neuroinformatique de Zurich, à cheval entre l’EPFZ et l’Université de Zurich.

Depuis quatre ans, il y dirige un groupe de recherche unique en Europe sur les cerveaux des oiseaux, principalement des pinsons et mandarins. «On peut établir des parallèles avec les stades de développement cognitifs chez l’enfant», explique le chercheur. Les oiseaux sont capables d’intercompréhension entre espèces. «Nous voulons comprendre comment l’ensemble des neurones sont capables d’interagir.» Pour ce faire, le physicien programme un ordinateur qui permet la reconnaissance vocale des chants d’oiseaux après stimulation du cerveau.

Et le futur? «Je souhaite me concentrer sur l’anatomie des circuits neuronaux à l’aide de logiciels de visualisation 3D», précise le chercheur.
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L’âge de la croissance

Le vieillissement est un problème majeur de la société occidentale. Mais certains chercheurs en notent aussi les effets positifs. Quelle incidence a l’allongement de l’espérance de vie sur la croissance économique? «Tout dépend de l’évolution démographique de la société», répond Uwe Sunde, 36 ans, économiste à l’Université de Saint-Gall. «Si le pays a déjà dépassé le seuil de transition démographique, soit une basse natalité, l’effet sera positif, car il y aura un investissement conséquent dans l’éducation, explique le chercheur d’origine allemande. Dans le cas contraire, cela signifiera moins de revenu par habitant.»

L’économiste veut apporter des nuances aux théories générales de la croissance, qui se restreignent souvent au rôle des institutions politiques. «Il ne faut pas négliger l’impact de l’espérance de vie, souligne Uwe Sunde, tout comme celui de l’environnement sanitaire et du changement climatique.» Pour cette recherche, il apparaît parmi les meilleurs économistes germanophones relevés par le Handelsblatt Forscher Ranking.
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Promenade virtuelle

A 38 ans, Marc Pollefeys, spécialiste de la vision 3D, dirige le laboratoire «Computer vision and geometry» de l’EPFZ. Sa fonction: «opticien» pour robots. «Nous développons des algorithmes pour les robots de Honda, afin que ceux-ci puissent se localiser grâce à leurs yeux-caméras», explique le chercheur d’origine belge. Les caméras explorent leur environnement et essaient d’en construire une carte.»

Un autre projet occupe le scientifique qui a passé par l’Université de Leuven et l’Université de Caroline du Nord: le développement d’une vision «intelligente» pour les téléphones de Nokia. «Le but consiste pour le téléphone à localiser automatiquement ce qui a été pris en photo.» Le chercheur, boursier de l’ERC, se consacre également aux scènes dynamiques. «En combinant les vidéos prises de différents angles, on parvient à modéliser la scène en 3D, ce qui permet de se promener librement d’un point de vue à l’autre.»
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Le génie du vivant

A la frontière entre biologie et ingénierie, les recherches de Melody Swartz s’attaquent au mal du siècle: le cancer. «Nous voulons comprendre comment les tumeurs se propagent, et utiliser nos résultats dans le traitement contre cette maladie, explique l’Américaine de 40 ans, qui dirige le Laboratoire de bio-ingénierie du cancer et du système lymphatique de l’EPFL. Nous nous concentrons sur le système lymphatique pour modéliser l’invasion cancéreuse.»

Désignée comme l’une des scientifiques les plus brillantes de sa génération par le magazine américain «Popular Science», Melody Swartz est arrivée en 2003 sur les rives du Léman. En 2005, elle met au jour le rôle de la microcirculation dans l’irrigation des tissus et son importance dans leur croissance. Mais ce n’est encore qu’une étape: prometteuse, elle ouvre la voie à la conception et au développement futur de tissus fonctionnels.
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Les gènes de tous les mammifères

«Ce qui distingue notre laboratoire, c’est notre vision d’ensemble des processus évolutifs.» Henrik Kaessmann, 38 ans, travaille sur la question de l’origine de l’être humain et son évolution. Le chercheur d’origine allemande dirige un laboratoire de l’Université de Lausanne consacré à l’évolution des génomes de mammifères. Et cumule les prix pour ses recherches: la distinction de l’Institut Friedrich Miescher cette année, qui fait suite à plusieurs bourses européennes.

«Notre collection comprend des échantillons génétiques de tous les mammifères, de la souris à l’ornithorinque», explique le chercheur. En passant bien sûr par l’homme et les primates. «Nous étudions l’activité de ces gènes pour mieux comprendre les changements des phénotypes, comme les caractéristiques morphologiques et les capacités cognitives des mammifères.» Grâce à l’analyse de ces données, Henrik Kaessmann espère notamment pouvoir expliquer ce qui distingue l’homme du primate: la complexité de son cerveau.
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Un film sur les protéines

«Nous utilisons une nouvelle méthode de spectroscopie de molécules unique pour mieux connaître la dynamique moléculaire des protéines», explique Ben Schuler. A 38 ans, il est professeur au département de biochimie de l’Université de Zurich et a obtenu une bourse de l’Union européenne de 2 millions de francs. Le but de cette recherche est en quelque sorte «cinématographique»: obtenir un film, à l’échelle moléculaire, du processus de repliement de protéines. «Notre objectif consiste à suivre la vie d’une protéine au sein de la cellule, de sa synthèse jusqu’à sa dégradation», poursuit le chercheur d’origine autrichienne. Pour mener à bien cette recherche, il est nécessaire de combiner une question biologique avec des méthodes d’analyses physiques. «Notre équipe est très multidisciplinaire: elle regroupe des biologistes, des biochimistes, des chimistes et des physiciens.»
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Le fil de l’histoire

La peinture n’est pas le seul support artistique par lequel se soit exprimé le génie humain. Mais il en est certainement un des plus connus. L’objectif de Tristan Weddigen, professeur d’histoire de l’art à l’Université de Zurich, consiste à remettre en question la prépondérance traditionnelle de la peinture, au profit des tissus. «Les textiles sont traditionnellement considérés comme un produit mécanique, reproductif et féminin, explique le chercheur suisse âgé de 40 ans. Cela a jusqu’ici entravé les recherches.»

Quelle signification historique a revêtue le textile dans l’art et l’architecture du Moyen Age au présent? «Nous voulons dégager la signification que possèdent les images nées d’une des plus importantes techniques culturelles de l’humanité», poursuit le chercheur, actuellement invité au prestigieux Getty Research Institute de Los Angeles. A lui maintenant de retrouver le fil d’Ariane.
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Un touche-à-tout à la rescousse des malvoyants

A tout juste 40 ans, Botond Roska s’est déjà frotté à beaucoup de domaines, de la médecine aux mathématiques, en passant par la physiologie, la génétique et l’ingénierie. «Je changeais de domaine tous les cinq ans: aujourd’hui, je suis très heureux de pouvoir enfin les combiner!» confie le diplômé de Berkeley d’origine hongroise.

Il dirige désormais un groupe de recherche consacré à la rétine au sein de l’Institut Friedrich Miescher (FMI) à Bâle. «Trois objectifs me motivent, explique-t-il. Fournir une thérapie basée sur la génétique pour aider les patients souffrant de malvoyance, mieux comprendre le fonctionnement des circuits neuronaux, et développer des technologies pour stimuler ces circuits.» Pourquoi le FMI? «Dans un institut privé, il y a plus de temps pour la recherche, car pas d’obligation d’enseignement, explique-t-il. Il faut dire que je travaille énormément!» Et le futur? «Nous irons plus loin: nous chercherons à savoir ce qui se passe après l’œil. C’est-à-dire dans le cerveau.»
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Des brevets en série

A 33 ans seulement, Tobias Kippenberg, directeur du laboratoire de photonique et de mesures quantiques de l’EPFL, a plusieurs brevets à son actif. Au collège déjà, il gagne le premier prix d’une compétition scientifique de l’Union européenne. En l’occurrence, il s’agissait d’un capteur à micro-ondes servant à évaluer l’état des routes: une première recherche qui est toujours en développement chez Daimler Benz. Car pour ce scientifique précoce passé par les bancs du Caltech et de l’Institut Max Planck, le but de la recherche fondamentale demeure l’application pratique.

«Actuellement, notre recherche porte sur l’observation de phénomènes mécaniques quantiques sur des objets macroscopiques, souligne le détenteur du Prix Fresnel 2009 de physique. Jusqu’à présent, cela n’a été possible que sur des atomes et molécules.» Ce qui pourra conduire à de nouveaux capteurs — et à un nouveau brevet prometteur pour le jeune chercheur allemand.

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DIX LABORATOIRES

Industrie et recherche fondamentale

Le laboratoire d’IBM en Suisse est un campus à l’américaine implanté dans la banlieue zurichoise — et qui a rapporté deux Prix Nobel de physique à la Suisse: Gerd Binnig et Heinrich Rohrer en 1986 pour l’invention du microscope à effet tunnel, et Georg Bednorz et Alex Müller un an plus tard pour la découverte de la superconductivité à haute température. Le développement de la nanotechnologie doit donc beaucoup au laboratoire zurichois. Et si l’on sait que la firme américaine a dépensé 6 milliards de dollars en recherche et développement pour la seule année 2008, autant dire que le centre de Zurich, avec ses 350 employés, est un poids lourd de la recherche fondamentale.

Le futur? La création d’un nouveau Nanotech Center en 2011. «Ce projet sera effectué en partenariat avec l’EPFZ. Nous sommes particulièrement intéressés par l’utilisation de la nanoscience pour l’industrie électronique», explique le directeur de communication du centre, Christopher P. Sciacca.
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Mission: prévention d’avalanches

«Par rapport aux autres pays alpins, nous proposons une formule unique: la recherche sur les avalanches et les services de prévision travaillent sous le même toit», explique Julia Wessels, chargée de la communication de l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches (WSL). Celui-ci fournit quotidiennement des estimations des risques d’avalanche aux responsables de la sécurité des stations de sport d’hiver et aux touristes. Pour cela, il se base non seulement sur des capteurs installés en haute montagne, mais aussi sur des observateurs. «Ce sont par exemple des agriculteurs, des guides de montagne et des employés de stations de ski sur des champs d’observation particuliers, qui reçoivent une formation au préalable», dit Jakob Rhyner, directeur de l’unité de recherche alerte et prévention. Le premier laboratoire a été construit en 1936.

«La Première Guerre mondiale a vu de nombreuses victimes d’avalanches dans les Alpes, explique Julia Wessels. Comme l’armée craignait les coulées blanches, un service militaire sur les avalanches a été mis en place.» Après la guerre, la prévision d’avalanche est passée des mains militaires à celles des scientifiques.
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Quelles villes dans trente ans?

Comment évolue une ville? Quelles forces politiques, économiques ou culturelles déterminent le développement futur d’une agglomération? Pour répondre à ces questions, l’EPFZ s’est déplacée à Bâle pour créer le Studio Basel en 1999 avec les stars de l’architecture suisse Herzog, de Meuron et Diener. «Nous ne faisons pas de propositions, mais nous évaluons, en nous basant sur le passé, à quoi ressemblera la ville de demain», explique Ying Zhou, qui a consacré sa thèse à MetroBasel, le projet d’agglomération bâloise. Pour montrer l’aspect de cette ville dans trente ans et vulgariser les principes d’urbanisme, le Studio a sorti une bande dessinée. Autre originalité: la configuration des cours. Les étudiants s’attellent avec leurs professeurs à l’étude urbanistique d’une ville, sur une période de six mois. «Nous avons déjà mené des projets à Nairobi, Belgrade, ou sur les îles Canaries», précise Ying Zhou. Les processus urbanistiques y sont savamment décortiqués par les chercheurs du Studio Basel.
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Les détectives du dopage

«Depuis qu’une collaboration a été lancée en 2004 entre les laboratoires antidopage et l’industrie pharmaceutique, nous n’avons plus quinze ans de retard sur les tricheurs!» Faisant référence au décalage entre les premières utilisations de l’EPO (érythropoïétine) en 1986 et la première détection d’un cas positif en 2001 au Laboratoire suisse d’analyse du dopage (LAD) à Lausanne, Robinson Neil, superviseur, se veut confiant sur les possibilités de démasquer rapidement les sportifs dopés.

«Initialement, les molécules vendues par les compagnies pharmaceutiques pouvaient être détournées à des fins de dopage, précise le responsable. Mais grâce à l’échange d’information avec cette industrie, nous développo­ns simultanément des tests adaptés à ces molécules.» La tortue a aussi rattrapé le lièvre grâce à une volonté politique, qui a abouti à la création de l’Agence mondiale antidopage en 1999. Le LAD, qui est l’un des laboratoires antidopage de pointe accrédités par cette agence, compte 25 collaborateurs. Aux Jeux Olympiques d’Hiver à Vancouver, il a collaboré avec un laboratoire canadien sélectionné par le Comité international olympique.
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En lutte contre le cancer

L’Institut Friedrich Miescher (FMI) de Bâle a été nommé en référence à l’un des pères de l’ADN: le scientifique bâlois qui a le premier purifié les acides nucléiques. Lancé par Ciba et Geigy en 1970, ce centre de recherche biomédicale est aujourd’hui financé par la Fondation Novartis pour la recherche. Situé «à l’interface de la recherche académique et de l’application biomédicale», le FMI est associé à l’Université de Bâle et poursuit aussi de multiples collaborations avec les chercheurs de Novartis.

Reconnu mondialement dans la lutte contre le cancer, il symbolise l’excellence de la recherche fondamentale issue du secteur privé en Suisse. Et ce dans trois domaines: l’épigénétique, le contrôle de croissance cellulaire et la neurobiologie. «Lorsque notre institut fait une découverte, nous essayons d’en vendre la licence. En contrepartie de son financement, le groupe Novartis a la priorité pour revendiquer le rachat du brevet», explique Nicolas Favre, chargé de la propriété intellectuelle de l’institut.
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L’encyclopédie des protéines

En 1986, le professeur Amos Bairoch de l’Université de Genève crée la banque de données Swiss-Prot, véritable encyclopédie dédiée aux protéines et utilisée par des centaines de milliers de chercheurs de par le monde. Plus de 30’000 personnes y accèdent quotidiennement. «Notre principale mission consiste à vérifier manuellement les séquences de protéines, provenant de milliers d’organismes différents, et à mettre à la disposition de la communauté les informations biologiques qui leur sont associées», explique Marie-Claude Blatter, chargée de la vulgarisation scientifique du groupe.

Depuis 2003, Swiss-Prot (Institut suisse de bioinformatique) fait partie du consortium UniProt avec l’Institut européen de bioinformatique au Royaume-Uni et la Protein Information Resource aux Etats-Unis. «Nous essayons de répondre à un besoin pressant pour tous les chercheurs: accéder rapidement à des données de bonne qualité. Un travail passionnant… de fourmis», résume Marie-Claude Blatter.
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La recherche au service de la paix

Neutralité ne veut pas dire rester les bras croisés. Pour accompagner ses nombreux efforts en matière de médiation et de résolution de conflits, la Suisse s’est dotée d’un centre de recherche sur la paix. «Notre plus grand projet à ce jour a été la mise en place d’un forum pour le renforcement de la société civile à Kaboul, sur mandat de l’ONU», explique Laurent Goetschel, 44 ans, politologue et directeur de la Fondation suisse pour la paix.

Mieux connu sous le nom de SwissPeace, l’institut établi à Berne en 1988 se consacre à l’analyse de conflits et aux stratégies de promotion de la paix. Mandatée par le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), la Commission européenne ou encore CARE International, SwissPeace contribue notamment à des projets de fédéralisation en Ethiopie et de développement institutionnel en Côte d’Ivoire.
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Sortir de son corps

Une personne sur dix connaîtrait durant sa vie une «expérience extracorporelle» — soit la sensation de sortir de son corps et de le voir de l’extérieur. Survenant dans certains cas d’épilepsie ou de consommation de drogues, elle peut aussi être provoquée chez des personnes en bonne santé.

Unique en son genre, le Laboratoire de neurosciences cognitives de l’EPFL étudie ces phénomènes chez des volontaires, grâce à l’utilisation de casques virtuels. «Nous mesurons ce qui sépare le corps réel du corps virtuel, explique le physicien Par Bjorklund. Les participants doivent par exemple estimer où ils se trouvent. Ils marchent systématiquement trop loin, jusqu’à l’endroit où se projette leur image virtuelle.» Mobilisant des ingénieurs, biologistes, informaticiens, médecins, psychologues et physiciens, ces travaux visent à comprendre comment le cerveau produit le sentiment de spatialité. En milieu hospitalier, ces techniques permettent notamment d’établir la cartographie cérébrale de patients atteints d’épilepsie.
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En guerre contre le paludisme

L’Institut tropical et de santé publique de Bâle place la Suisse à la tête de la lutte contre le paludisme. «Ce problème n’est pas résolu en Afrique, explique le directeur, Marcel Tanner. Notre but est de l’éradiquer totalement de certaines régions.»

Mais en plus de la recherche, le pôle de compétence fournit aussi des services gouvernementaux. «Nous sommes par exemple en train de restructurer le système de la santé au Tadjikistan», poursuit le directeur. Sans oublier le sujet qui peut tout bouleverser en matière de santé publique dans les pays en développement: le climat. «Avec l’intégration en 2009 de l’Institut pour la médecine sociale et préventive de l’Université de Bâle, nous allons nous concentrer sur les conséquences du changement climatique pour les maladies tropicales», précise-t-il. Comment expliquer la fondation en 1943 du seul institut tropical qui ne soit pas issu de la colonisation? A l’époque, la Confédération est une île au milieu de l’Europe. Les missionnaires suisses présents dans des pays tropicaux n’ont plus accès aux instituts des pays voisins: ils invitent alors le spécialiste de la parasitologie Rudolph Geigy, de la grande famille des fondateurs de Ciba-Geigy, à venir sur le terrain. Ses recherches sur la mouche tsé-tsé feront la renommée de l’institut.
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La tête dans les planètes extrasolaires

«Je suis très optimiste quant à la découverte de la vie sur d’autres planètes», annonce Michel Mayor, chercheur à l’Observatoire astronomique de l’Université de Genève. L’observation, en 1995, de la première planète extrasolaire, a mis la ville de Calvin au centre de la carte de l’astronomie mondiale. Depuis quinze ans, les chercheurs ont continué sur leur lancée et découvert 400 nouvelles planètes.

«Nous visons des planètes de très petite masse — à peu près équivalentes à la Terre — situées dans des zones où la vie pourrait se développer», poursuit l’astronome. Des milliers d’autres scientifiques s’attellent à la découverte de la vie dans l’univers, «entre partenariat et concurrence». «L’Observatoire mène un travail préalable nécessaire: établir une liste d’étoiles pour les satellites qui chercheront à détecter la vie depuis l’espace, précise le chercheur. Il faut d’abord savoir où regarder!»
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Une version de cet article est parue dans Reflex Magazine.