Grâce à son programme CopyTrans, qui permet de sauvegarder la musique contenue sur les baladeurs numériques d’Apple, un jeune Vaudois exporte ses logiciels mondialement.
Ils sont 100 millions autour du monde, confrontés à une terrible angoisse. En cas de vol ou de crash de leur ordinateur, les détenteurs d’iPod perdent toute leur musique. Même si les fichiers sont stockés sur leur baladeur numérique, impossible de les récupérer.
Cela peut sembler curieux, mais afin d’éviter que la musique ne circule trop facilement, et devant la frilosité des maisons de disque face à leur invention, Apple a volontairement limité la souplesse des transferts depuis son baladeur vers les ordinateurs. Et si l’usager souhaite acheter un nouvel ordinateur, le problème se pose à nouveau: en quelque sorte prisonnière dans l’iPod, la musique, même acquise légalement par l’usager, peut difficilement être récupérée pour être, par exemple, gravée ensuite sur un CD.
«J’avais acheté l’un des premiers iPod et je me suis rendu compte très tôt de cette limitation», raconte le Vaudois David Monbaron. En 2004, le jeune homme passe une année sabbatique en Australie après avoir achevé ses études de médecine en Suisse. «Passionné d’informatique, je me suis mis à développer un petit logiciel qui permettait de récupérer la musique et toutes les métadonnées associées (playlists, etc.), à partir d’un iPod vers un PC.»
La suite de l’histoire ressemble à une fable californienne des années 1990. Baptisé d’abord CopyPod, puis CopyTrans, le petit logiciel connaîtra un succès fulgurant et planétaire, au point de changer les plans de carrière du jeune médecin.
A peine le programme était-il disponible sur Internet que des milliers d’internautes, puis des dizaines de milliers, se passent le mot pour le télécharger. Au début, CopyTrans était gratuit, mais après quelques mois, David Monbaron fixe un prix de 20 dollars. «Un tarif qui inclut un service d’assistance par e-mail avec réponse dans les 24 heures toute l’année. Nous avons réalisé que beaucoup d’usagers d’iPod ont peu d’expérience avec l’informatique et ont besoin d’être guidés pas à pas.»
Les ventes explosent, dopées par le succès des nouveaux modèles du baladeur numérique, et par une mention de CopyTrans dans une chronique du Wall Street Journal. L’entreprise a doublé son chiffre d’affaire sur les deux derniers exercices.
«Nous avons réalisé qu’il y avait un potentiel important dans la sauvegarde des données, raison pour laquelle nous nous sommes intéressés à d’autres produits dans ce sens.» De retour en Suisse, David Monbaron décide de professionnaliser son activité. «Je comptais depuis longtemps quitter la médecine pour lancer ma propre entreprise, c’était l’occasion.»
En 2005, il fonde WindSolutions, une société basée à Paudex (VD), pas loin de chez lui, et développe des déclinaisons de son produit phare: une version destinée à la sauvegarde de photos (puisque les nouveaux iPod stockent aussi les images), puis un autre programme, baptisé iCloner, qui permet de transférer facilement tout le contenu d’un ancien iPod vers un nouveau. «Nous voulons sortir environ trois nouveaux logiciels par année.»
David Monbaron s’est entouré de deux collaborateurs, un informaticien et un responsable du web/marketing. La croissance de son entreprise a été uniquement organique, le financement étant assuré par les ventes régulières de ses logiciels. «Nous n’avons pas du emprunter un centime, ni faire appel à du capital risque, dit l’entrepreneur de 31 ans. Je ne regrette pas mon choix, y compris au niveau économique car je ne gagnerais pas mieux ma vie si j’étais resté médecin. En plus, je réalise mon rêve en gérant ma propre entreprise.»
Pour l’avenir, WindSolutions envisage de se tourner vers le consulting et le conseil, notamment en matière de référencement sur Internet. «Nous avons acquis une expérience précieuse en faisant connaître notre logiciel rapidement dans le monde entier, sans publicité, grâce à un usage optimal des moteurs de recherche. Nous pourrions faire bénéficier des entreprises locales de ce savoir faire, d’autant que je souhaite acquérir l’expérience de démarcher des clients professionnels en Suisse.» C’est l’un des paradoxes du succès de cette entreprise: le marché global a été attaqué en premier, et c’est localement qu’il s’agit désormais de croître. «C’est indispensable selon moi, aussi parce que nous n’allons pas développer des programmes autour de l’iPod toute notre vie. D’autant que, même si nous avons l’avantage d’avoir été les premiers, nous avons désormais beaucoup de concurrents sur ce marché.»