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«Je vous souhaite du courage pour éradiquer définitivement l’humour de nos arts»

Lettre ouverte de l’écrivain Daniel de Roulet à Pascal Couchepin, conseiller fédéral en charge de la culture.

Monsieur le conseiller fédéral chargé de la culture,

J’apprends que les crédits de Pro Helvetia pourraient être diminués d’un million de nos francs pour punir ces gens-là d’avoir soutenu l’exposition de Thomas Hirschhorn à Paris. Voilà qui est rondement mené, mais largement insuffisant.

En effet j’ai moi-même eu à faire à cet artiste et j’ai peur que cette première mesure ne suffise pas à le réduire au silence. Il m’écrivait à cette occasion: «La liberté de l’art doit être totale, je n’ai pas le temps de m’intéresser à autre chose.» Vous voyez où cela l’a mené. Depuis plusieurs années, j’assiste impuissant aux provocations que ce plasticien enchaîne avec la même aisance que s’enchaînent nos montagnes, le Mönch à notre Jungfrau, le Moine à la Pucelle.

Je vous suggère de mener avec la diligence que le peuple attend de vous une enquête sur les subventions que reçoit ce Thomas l’imposteur. Au Kunsthaus de Zurich, il s’est moqué des participants au Forum de Davos en comparant nos décideurs mondiaux à des gardes-chiourme du capital. A-t-on pensé à supprimer les crédits culturels de ce musée zurichois? Même chose à la Documenta de Kassel où j’ai vu l’exposition de ce concitoyen s’en prendre à notre politique de l’immigration. Ce persiflage aurait à coup sûr mérité que notre ambassadeur n’offre pas l’apéritif à ce traître à la patrie.

Erreur ou ignorance de notre administration? Les événements où les artistes crachent dans notre soupe au lait de Kappel se multiplient. Je tiens à vous signaler quelques autres situations où le sens civique des artistes a dépassé largement nos limites nationales.

Comment est-il en effet admissible que la Confédération continue de subventionner le Centre Durrenmatt à Neuchâtel qui expose des tableaux où ce mauvais peintre se moque ouvertement de nos banquiers et de notre gouvernement, affublant ses représentants de groins de cochons? Veut-il donc nous enterrer sous son rire?

Et comment pouvez-vous accepter de dilapider nos impôts dans notre Musée national, à côté de la gare de Zurich? N’expose-t-il pas les fresques, inachevées il est vrai, d’un certain Ferdinand Hodler qui se moque ouvertement de notre retraite à Marignan en l’an 1515? Comme s’il y avait été!

Et qu’en est-il exactement des subventions que vous consentez à notre Office du tourisme pour mettre en valeur l’héritage de ce nommé Jean-Jacques Rousseau? Quand on sait les complots que ce type a ourdis contre nos valeurs nationales! Il n’a d’ailleurs échappé à la lapidation de nos concitoyens que de justesse, avant de se réfugier, une fois de plus, à l’étranger.

Oui, Monsieur le conseiller fédéral chargé de la culture, la liste est longue et je vous souhaite beaucoup de courage pour éradiquer définitivement de nos arts l’humour que nos artistes continuent d’y glisser à vos dépens.

Mais au cas où vous interviendriez pour que ce million de nos francs ne soit pas retiré à Pro Helvetia, faites-moi signe, qu’on aille boire ensemble un verre d’Humagne rouge. Juste pour rire.

Bien à vous,

Daniel de Roulet