La compagnie aérienne a disparu il y a quatre ans sans qu’un réel hommage lui soit rendu. Pour réparer cet oubli, un jeune éditeur a réuni des centaines de photos d’archives, qu’il publie en album.
La disparition de Swissair a donné lieu à une intense activité éditoriale, avec beaucoup de chiffres et d’analyses à l’appui. Mais, jusqu’ici, l’aspect émotionnel de l’affaire avait été curieusement négligé. Comme si l’ancienne compagnie nationale n’était qu’une de ces entités abstraites qu’on liquide sans état d’âme. Peut-être fallait-il attendre quelques années pour que les vrais sentiments s’expriment?

Le livre qui paraîtra le 11 décembre devrait réparer cet oubli et donner des bouffées de nostalgie à tous ceux qui ont connu les grandes heures de Swissair. On y trouve des centaines de photos qui racontent les hôtesses et leurs uniformes, le style «suisse-international», les aéroports des années 60, la fascination du cockpit et les soutes à bagages pleines de rêves d’exotisme.
Des centaines de photos, et aucun texte. Ce livre ne cherche pas à verbaliser le rapport très particulier que le peuple suisse entretenait avec sa compagnie aérienne. «J’ai voulu présenter seulement des images, l’émotion à l’état pur», dit l’éditeur Moumed Bouchelarm, 31 ans.
Créateur du magazine Welsch.ch, photographe inspiré et organisateur d’événements, ce passionné d’aviation a passé plus de trois ans à fignoler l’ouvrage recouvert de toile rouge et orné de l’ancien logo tamponné en lettres d’or. «L’idée m’est venue lors du dernier vol SR sur Hong Kong, raconte-t-il. Tout l’équipage s’arrachait les derniers objets, les stylos, etc. C’est à ce moment-là que je me suis dit: il faut que je fasse un livre. Pour rendre un hommage.»
Moumed Bouchelarm est allé à Dübendorf, où sont stockées des milliers de photos de la compagnie, pour en négocier les droits exclusifs. Il en a choisi 369 pour son livre. Avec sa première maquette sous le bras, il est ensuite parti chercher des partenaires d’édition, «mais c’était comme si tout le monde avait honte de cette faillite. J’ai demandé à Moritz Leuenberger d’écrire la préface, mais il m’a dit qu’il n’avait pas le temps. En Suisse, on n’a pas la culture de l’échec.»
Pour promouvoir cet ouvrage tiré à 5’000 exemplaires et dans lequel il a investi plus de 100’000 francs, Moumed prépare actuellement des happenings dans les librairies. «Des copines porteront l’uniforme de Swissair et elles distribueront du jus d’orange, de l’eau minérale ou du champagne aux clients.» Une occasion de plus pour faire revivre la compagnie qui le fascine depuis qu’il a 6 ans. «Je me souviens des crayons qu’on nous donnait et de l’odeur citronnée qui nous accueillait à bord. Avec ce livre, j’ai juste voulu dire qu’on peut être fier de ce label de qualité qu’était Swissair.»
——-
«Swissair Archives». Editions Welsch. 192 pages, 69 francs. Dès le samedi 11 décembre en librairie.