TECHNOPHILE

Les paradoxes des hotspots

De Genève à New York, l’écrivain australien Dominic Pettman raconte son épopée dans le monde de l’internet sans fil.

Quand j’étais enfant, le mot «hotspot» (point chaud) désignait un nightclub particulièrement branché. Pour mes parents, c’était le lieu d’une actualité politique et pour mes grands parents, une partie du corps souffrant d’une inflammation. Les choses ont bien changé.

Un hotspot est aujourd’hui un endroit offrant un accès sans-fil à internet. Si ces endroits sont encore disséminés de manière irrégulière dans nos villes, il semble inévitable que toutes les zones urbaines deviennent des hotspots dans un futur proche — rivalisant avec la couverture des réseaux de téléphonie mobile.

Si elle n’est pas nouvelle, la possibilité de se connecter à internet en plein air, sans le moindre câble, est encore considérée comme une petite révolution, y compris par moi-même.

Je viens d’acheter un nouveau laptop avec tous les équipements nécessaires et je suis à chaque fois étonné de pouvoir m’asseoir dans un parc, télécharger mes e-mails, jouer à un jeu collectif ou participer à des enchères en ligne. L’expérience a quelque chose de magique.

Mais le grand frisson de ce branchement avec le monde n’a d’équivalent que la frustration de voir apparaître la petite boîte sur l’écran qui dit «no connection has been found». Et cela arrive beaucoup trop souvent, y compris dans les endroits qui se désignent comme hotspots.

J’ai voyagé récemment à travers l’Europe et à chaque étape, j’étais impatient de relever mes e-mails. Le problème, c’est que je devais d’abord me rendre dans un cybercafé pour trouver la liste des hotspots locaux. C’est le premier paradoxe de l’internet sans fil: vous avez généralement besoin d’une connexion fixe pour localiser rapidement les connexions wi-fi.

Cette première consultation m’a cependant permis de localiser plusieurs endroits, pour la plupart des cafés, offrants des connexions sans fil. Mais une fois sur place, une autre évidence saute aux yeux: pour avoir un accès gratuit à internet, il faut bien sûr consommer. Minimum 3 euros pour un verre.

J’obtiens ensuite un code pour 20 à 30 minutes de connexion, juste de quoi consulter mon courrier électronique. Si je veux plus de temps, je dois consommer une autre boisson. En gros, cela revient ensuite au même prix qu’un cybercafé.

D’autres établissements fonctionnent librement, sans code, mais demande logiquement aux utilisateurs de consommer, surtout s’ils restent assis longtemps.

Dans plusieurs cas, je n’ai constaté qu’après avoir commandé un café non désiré que le réseau ne fonctionnait pas. A quoi le personnel répond quelque chose comme: «Je ne comprends rien à tout ce bazar informatique» (comme récemment au Lyrique, à Genève).

Dans ce genre de situation, j’adopte le ton du «touriste étranger désagréable» et j’exige que le signe «Ici, internet sans fil» soit retiré pour cause de publicité déloyale.

Une autre approche, plus amusante, consiste à partir à la recherche de réseaux — privés ou d’entreprise — accessibles librement. Il suffit de cliquer sur l’icône «Check for available networks» et d’attendre.

Dans la liste, on vérifie ensuite lesquels nécessitent un mot de passe. Nombreux sont ceux qui n’en ont pas! Pourquoi les responsables n’ont-ils pas pris la précaution si simple de sécuriser l’accès à leur réseau par un mot de passe? Je n’ai pas de réponse à cette question, mais je remercie ces gens qui m’ont permis si souvent de vérifier mes e-mails sans dépenser un centime.

A la recherche de ces accès gratuits à Genève, je me suis retrouvé perché sur une jambe, à balancer de gauche à droite mon laptop par la fenêtre de mon hôtel, en attendant que les messages soient téléchargés. Ca fonctionne, donc, mais cela peut se révéler assez périlleux…

Désormais, je vis à New York et je n’ai plus besoin de ce genre d’accrobatie. Sur l’île de Manhattan, la liste des réseaux disponibles est simplement hallucinante. En plus, au moins un tiers d’entre eux sont gratuits. Je me dis qu’il faut en profiter pendant que ça dure car, l’histoire du Net l’a démontré, l’exigence de rentabilité de ce type de service finira par l’emporter.

Mais pour l’instant, je reste en contact, sans fil et sans payer. Le seul problème, c’est que ce hobby peut devenir une obsession. Quand mes amis m’emmènent dans un hot-spot, au sens premier du terme, c’est à dire un club branché rempli de top-models et de célébrités, je me surprends à me demander: «Et ici, est-ce que je pourrais consulter mes e-mails?»

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Avant de partir, consultez la liste des hotspots disponibles là où vous allez.

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© Dominic Pettman. Traduction: Largeur.com