LATITUDES

«L’air pur est un bien public, mais personne ne s’en sent responsable»

De nouvelles technologies nous aident à préserver la propreté de l’air et de l’eau et à freiner les changements climatiques. Explications de l’ingénieur Daniel Zürcher.

Une version de cet article réalisé par Large Network est parue dans le magazine L’Environnement. Abonnez vous gratuitementcommander tadalafil 20mg

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Des technologies innovantes comme les filtres à particules, le recyclage de cartouches d’encre ou le béton recyclé permettent de ménager les ressources naturelles en respectant les limites de notre planète et de réduire les substances nocives. L’OFEV encourage le développement de ces technologies et les aide à passer du laboratoire au monde réel. Dans le cadre de la promotion des technologies environnementales, près de 4 millions de francs par an sont investis dans le «développement d’installations et de procédés qui permettent de réduire les atteintes à l’environnement dans l’intérêt public», comme le prévoit la loi sur la protection de l’environnement.

Pourquoi l’État encourage-t-il le développement des technologies environnementales? Ne peut-on pas laisser faire le marché

Daniel Zürcher: Non, parce que l’air pur, l’eau propre ou une nature diversifiée sont des biens publics. Nous en bénéficions tous, mais personne ne s’en sent responsable. Comme leur pollution ou leur mise en danger n’ont souvent pas de coût direct, il n’y a pas d’incitation à les préserver et à développer de nouvelles technologies. C’est pour ces raisons que le soutien de l’État intervient.

Pourtant, l’État édicte des directives. N’est-ce pas suffisant pour inciter les entreprises à inventer des technologies nouvelles?

DZ: L’État ne peut pas exiger des entreprises de résoudre des pro­blèmes pour lesquels il n’y a pas encore de solution technique. Ainsi, lorsqu’il se rend compte que la démarche actuelle et d’autres mesures telles que les obligations, les interdictions ou les incitations financières ne suffisent pas à engager des changements au sein des entreprises, l’État doit malgré tout faire progresser le développement de nouvelles technologies.

À cet effet, le Parlement a créé il y a vingt-cinq ans la promotion des technologies environnementales (PTE). Ce programme a-t-il fait ses preuves?

DZ: Oui, cette mesure a fait progresser la Suisse dans la protection de l’environnement et des ressources. Elle a suscité des innovations majeures largement adoptées aujourd’hui. Les filtres à particules pour les moteurs Diesel, utilisés sur des millions de véhicules dans le monde, sont sans doute le plus grand succès du programme. Ils sont le résultat d’une nouvelle méthode de mesure et de la pose exigée par la Suva de filtres à particules sur les machines servant à la construction de tunnels. Le nouveau procédé mesure les particules fines dans les gaz d’échappement des moteurs Diesel, même les plus petites et les plus toxiques.

Le programme ne fixe aucun axe prioritaire. Pouvez-vous néanmoins constater certaines tendances?

DZ: Oui. Il y a une vingtaine d’années, la protection contre le bruit et l’épuration des eaux usées étaient au premier plan. À l’époque, on avait vu que des hormones présentes dans l’eau nuisaient aux poissons. Dans plusieurs projets soutenus par le programme, nous avons testé et développé des procédés d’épuration des eaux. Aujourd’hui, de nombreuses installations disposent d’un 4e niveau d’épuration qui extrait les micropolluants de l’eau. Entre 2011 et 2016, l’accent a été mis sur la récupération du phosphore contenu dans les boues d’épuration. Actuellement dominent des projets de recyclage et des technologies d’émis­sions négatives, comme le développe­ment de matériaux de construction capables de stocker le CO2.

Quel projet récent vous intéresse particulièrement?

DZ: Nous avons un projet passionnant avec l’entreprise Haelixa qui a développé un procédé biotechnologique permet­tant de marquer les matériaux les plus divers avec un code ADN artificiel. Dans le cadre de ce projet, Haelixa collabore avec Tide Ocean, une entreprise suisse qui fabrique de nouveaux produits à partir de déchets plastiques récupérés dans la mer. Ce nouveau procédé permet de marquer les déchets plastiques et de prouver ainsi l’origine des produits. Grâce au procédé de marquage d’Haelixa, Tide Ocean peut donc prouver en tout temps l’origine de ses produits. Mais on peut aussi retracer de manière transparente et dans le monde entier l’origine de T-shirts en coton bio, de pierres précieuses ou de métaux. Les possibilités d’application sont illimitées.

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Daniel Zürcher a obtenu son diplôme d’ingénieur agronome à l’EPFZ et travaille à l’OFEV depuis trente ans. À la tête de la section Innovation, il dirige le programme de promotion des technologies environne­mentales (PTE) de l’OFEV.

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Exemples de technologies environnementales innovantes

Stocker le CO2 dans le béton

Le béton est le matériau de construction le plus utilisé de Suisse. Or, la production de ciment employé comme liant génère beaucoup d’émissions de CO2. Avec l’EPFZ, l’entreprise Neustark a développé un procédé améliorant nettement le bilan CO2 du béton. Le gaz est extrait de l’atmosphère et stocké dans des granulats de béton recyclé qui remplacent le gravier.

Chaudières à bois sans filtre

Par rapport aux chaudières à mazout, le chauffage au bois est une solution sur le plan climatique. Mais il génère des poussières fines qui nuisent à la santé. Les grandes chaudières à bois ordinaires ne peuvent respecter les valeurs limites que par épuration des émanations gazeuses, par exemple à l’aide d’électro-filtres onéreux. L’entreprise Fireforce Technology a inventé un procédé de combustion qui évite de dépasser les valeurs-limites sans utiliser de filtre.

Des protéines d’insectes

Produire de la viande nuit à l’environnement: prés, lacs et forêts souffrent d’un excès d’engrais et les vaches émettent du méthane, un gaz à effet de serre. Les protéines tirées de larves d’insectes consti­tuent une alternative. Avec ses partenaires, l’entreprise Bühler a créé une installation d’élevage industriel d’insectes pour produire des aliments. Les petites bêtes sont nourries avec les résidus de l’industrie alimentaire.

Transformer l’urine en engrais

Notre urine contient de l’azote et du phosphore, de précieux nutriments. L’Institut fédéral suisse des sciences et technologies aquatiques a développé une technologie récupérant 98 % de ces nutriments pour produire de l’engrais. Un spin-off, la Vuna GmbH, a construit une installation mobile avec toilettes séparatives, c’est-à-dire dotées d’un système qui sépare les déjections liquides et solides. L’innovation suscite un grand intérêt: tout récemment, l’Agence spatiale européenne a rejoint Vuna en tant que partenaire de projet.