Jean Rossat crée des grilles de mots croisés depuis plus de 40 ans. Passionné des lettres, il guide avec humour et jeux de mots les cruciverbistes amateurs comme avertis.
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«Requinqua.» Verbe conjugué au passé simple impliquant de retrouver des forces, mais pas seulement. «On pourrait aussi l’utiliser pour faire deviner “centenaire” en 10 lettres», s’amuse Jean Rossat. Depuis plus de 40 ans, ce Haut-savoyard conçoit professionnellement des grilles de mots croisés. Il est verbicruciste (tandis qu’on appelle le joueur cruciverbiste).
Armé de son crayon, d’une gomme, d’un papier quadrillé «et d’un dictionnaire pour pouvoir vérifier les subtilités de langue française», Jean Rossat imagine des grilles de 100 cases selon une méthode précise. «Je commence par rassembler des idées de mots autour d’un thème, à chercher un champ lexical. Puis je débute par “la potence” soit le “1” vertical et le “1” horizontal. S’ensuit “la charpente”, soit la croix de la ligne et de la colonne “5”, puis je complète le reste.» Entre 30 minutes et deux heures sont nécessaires pour créer une grille. A 70 ans, il continue d’en produire environ 300 par année, notamment via son site internet Eskimos.
Depuis enfant, Jean Rossat aime la langue française, «des conjugaisons à l’orthographe». Il étudie le journalisme et travaille pendant huit ans dans la presse régionale en France, où il s’occupe également de la rubrique des mots croisés. En 1989, il se consacre totalement au métier et devient indépendant. Il crée des grilles pour divers journaux, et notamment pour le quotidien Le Temps pendant 10 ans. «Je devais créer 6 jours sur 7 une grille à thème en fonction de l’actualité.» Il est également l’auteur de «Ma Suisse en mots croisés», une collection de grilles déclinée autour des diverses régions romandes, de Genève au Valais en passant par la Gruyère.
Jean Rossat participe à l’organisation du plus grand concours de France de mots croisés qui a lieu chaque année à l’Is-sur-Tille, capitale francophone des mots croisés située dans l’est de la France. «J’ai aussi une fois conçu une grille géante de 12 mètres de haut qui était installée dans l’espace public à Annecy afin que les passants puissent la remplir de manière collaborative.»
Une grille est environ rémunérée 140 euros, «il faut donc en faire régulièrement pour en vivre». Le passionné déplore aujourd’hui le travail d’amateur ou les générateurs en ligne qui torpillent son métier et n’en respectent pas l’artisanat. «Les mots croisés ne sont pas de simple définition littérale tirée du dictionnaire, mais une affaire de réflexion, d’humour par les jeux de mots et par l’utilisation des figures de style.»