CULTURE

Elle réveille avec art les fantômes du palais de l’Athénée

Davide-Christelle Sanvee, 29 ans, est déjà une artiste reconnue. Elle présente jusqu’au 17 décembre une exposition personnelle commissionnée par la Société des Arts.

En février, la Société des Arts la sélectionne pour sa saison 2022-2023, lui offre un cachet de 1500 francs et un budget de production de 3000 francs. Davide-Christelle se renseigne sur l’histoire du palais, et des personnages qui ornent sa façade. «Charles Bonnet m’a fasciné, avec sa perruque, et un syndrome hallucinatoire auquel il a donné son nom.»

Elle retrouve là un lien avec son expérience des couloirs vides et inquiétants du palais de l’Athénée, où chaque ombre et chaque bruit inexpliqués activent l’imagination. Son exposition ainsi que la performance donnée lors du vernissage explorent la question du patrimoine, et de ces figures dont on érige des statues. Qui a sa place dans l’histoire, qui en est exclu?

Née au Togo en 1993, arrivée en Suisse à 6 ans, c’est à la fin de son adolescence qu’elle découvre l’art. Un voyage dans son pays d’origine la met «face à des souvenirs oubliés et au besoin de leur donner une image». Elle brode donc obsessivement ces morceaux de mémoire. En 2014, elle commence un bachelor à la HEAD, dans la section Art Action, avec une réflexion sur le geste artistique et la performance. Après cela, elle part faire un master en architecture d’intérieur à Amsterdam. «J’avais commencé à sortir du «white cube» des espaces d’art pour performer dans des espaces publics, et je ressentais le besoin d’étudier plus ce domaine.»

En 2019, son master fini, elle envoie un dossier pour le Prix Suisse de la Performance, qui se déroulait à Aarau. «Une fois sélectionnés, on nous donne un budget de 3000 francs, et quelques mois pour travailler.» À la croisée des arts visuels et de l’architecture, elle fait de l’escalier en colimaçon de l’Aargauer Kunsthaus le personnage principal de sa performance «Le ich dans nicht». «Transparent et traversant le bâtiment, il m’a permis de parler des notions de passage, en élargissant aux questions de l’intégration.» Le jury qui lui décerne le prix et ses 30’000 francs écrit dans son rapport: «De façon presque absurde mais définie et réfléchie, elle donne avec humour un aperçu de thèmes complexes.» Pour l’artiste, l’humour est une nécessité «pour détendre le public et faciliter les critiques que [s]on travail adresse à la société».

On pourra bientôt voir Davide-Christelle sur scène aux côtés de Rebecca Chaillon pour «Carte noire nommée désir» et, en mars, elle présentera sa première pièce au Théâtre de l’Usine.

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Où la rencontrer

Ascenseur du Seujet: «J’aime beaucoup monter là-haut, m’installer au sixième étage avec quelques amis et discuter.»

La Maison des arts du Grütli: «J’y ai mon atelier, c’est un endroit plein de vie. Après le travail, je peux aller au cinéma, au café ou au théâtre, il y a toujours quelque chose à faire.»

Fraîcheur d’Asie: «Pour d’excellents sandwichs chauds vietnamiens garnis, par exemple, avec des boulettes de viande bien juteuses et un pain croquant.»

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Une version de cet article réalisé par Large Network est parue dans la Tribune de Genève.