CULTURE

2003, retour dans «The Matrix»

Deux films, coup sur coup, vont rebrancher la mythologie de «Matrix» dans les prochains mois. Vous ne pourrez pas y échapper. Keanu Reeves est devenu un acteur virtuel.

Vous allez beaucoup entendre parler de «Matrix» cette année. Quatre ans après la sortie de ce film — devenu entretemps un classique du cinéma d’action et d’anticipation –, les studios Warner s’apprêtent à commercialiser non pas une, mais deux suites, coup sur coup. Avec un redoutable plan d’attaque médiatique (et un dessin animé, «Animatrix», pour faire monter la sauce).

La première séquelle, «The Matrix Reloaded», sera projetée en grandes pompes en mai au Festival de Cannes, quelques jours avant sa sortie mondiale. Quant à «The Matrix Revolutions», dernier volet de la trilogie, il arrivera déjà cet automne, histoire de ne pas trop frustrer les fans. Car il paraît que la dernière scène du numéro 2 laisse planer un suspense insoutenable. On dit qu’à la sortie des projections-tests, les spectateurs n’avaient qu’une envie: retourner illico dans la salle pour découvrir la suite.

Il y a sans doute une bonne part de manip publicitaire dans ces rumeurs savamment infiltrées sur le Net. Mais il ne faut pas pour autant sous-estimer l’ampleur de la matrixmania. Dès la sortie du premier épisode en 1999, et surtout dès sa commercialisation en DVD un an plus tard, le film de frères Wachowski est devenu un authentique objet de culte. Les adolescents se le repassent en boucle et au ralenti pour décoder l’art martial; les amateurs de jeu vidéo se reconnaissent dans cette histoire de réalité simulée; quant aux cinéphiles, ils n’en finissent pas de vanter le savoir-faire des réalisateurs Larry and Andy Wachowski. On trouve même des allumés qui considèrent «Matrix» comme un traité philosophique sur les rapports entre le réel et le virtuel.

En 1999, le premier épisode de «Matrix» entrait dans l’histoire du cinéma en inaugurant une nouvelle technique de tournage très spectaculaire appellée «bullet time» (une centaine de caméras filmaient simultanément la même scène sous des angles légèrement différents — les images étant ensuite montées de manière à donner au spectateur l’illusion d’un déplacement dans un temps suspendu). Cette technique développée par le pionnier des effets spéciaux John Gaeta a ensuite été pillée et réutilisée dans des dizaines de films, de publicités et de clips vidéo.

Pour les deux nouveaux épisodes, les frères Wachowski et John Gaeta ont voulu franchir un pas de plus en matière d’innovation visuelle. A l’aide de caméras numériques à très haute définition, ils ont scanné les corps des comédiens Keanu Reeves (Neo) et Hugo Weaving (agent Smith), jusqu’au moindre défaut cutané, de manière à créer de parfaits doubles numériques capables d’accomplir toutes les cascades imaginables.

Une technique qui fait écho au thème de la trilogie («la réalité contemporaine n’est qu’une simulation numérique»). Les deux acteurs peuvent avoir le vertige. Ils savent que désormais, toutes leurs données se trouvent sur les disques durs de la firme ESC, créée pour les besoins de la production. Ils savent que cette société — qui doit son nom à la touche escape des claviers d’ordinateurs — pourrait théoriquement réaliser des films «avec Keanu Reeves et Hugo Weaving» sans la moindre implication des comédiens.

Voilà pour la technique. Et où les frères Wachowski sont-ils allés chercher leurs idées visuelles pour ces deux nouveaux épisodes? Le magazine Wired raconte qu’ils ont organisé des séances de brain storming en se faisant projeter «Vertigo», «Alien» et «Apocalypse Now», mais aussi des films d’accidents de voitures et des démonstrations de robots industriels. Sans oublier des images d’archives de l’explosion du dirigeable Hindenburg. Voilà qui promet.

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La bande-annonce de «The Matrix Reloaded» vient de sortir sur les écrans.