L’échec de la candidature de Sion pour les JO de 2006 a plongé la Suisse dans la dépression, dit-on. Le pays se chercherait un nouveau projet mobilisateur. Une exposition nationale, vraiment?
Je ne pouvais pas rater cette publicité Migros. Elle montre une carte géographique défigurée par le traumatisme du week-end dernier. A la place des villes de Neuchâtel, Yverdon, Bienne et Morat, un mot terrible, devenu synonyme de défaite et de douleur, a été apposé au bord des trois lacs: Sion, Sion, Sion, Sion. Un nom qui résonne comme la hantise d’un nouvel échec, ou comme l’appel à un sursaut national.
J’exagère à peine le pathos de la situation. A en croire les commentateurs, la Suisse se trouverait au bord de la dépression. Depuis une semaine, on ne parle que de cela, au café comme dans les réunions politiques: l’échec de Sion 2006 et comment s’en relever. Il deviendrait vital de rassembler le peuple valaisan, ou romand, voire suisse, autour d’un nouveau projet mobilisateur.
Que la Migros achète des pleines pages de pub pour défendre l’exposition nationale comme ersatz de la candidature olympique est déjà révélateur. «Haut les coeurs! Maintenant, tous d’un même élan pour l’Expo.01 du siècle», dit le slogan Migros.
Le moral du pays devrait-il s’agripper aux arteplages sous peine de sombrer? Si c’était le cas, il y aurait de quoi s’inquiéter.
Car l’Expo.01, contrairement à Sion, n’a rien d’un projet ouvert vers le monde. Aucune confrontation internationale, nul regard étranger, nulle compétition ne viendra mesurer sa valeur. L’Expo ne risque pas d’être recalée à Séoul. C’est un projet suisse qui s’adresse à des Suisses. Au mieux un happening d’avant-garde, au pire une nouvelle séance de psychanalyse collective après le 700e, le 200e et le 150e.
Bien sûr, les offices du tourisme vont tenter de vendre l’Expo à l’étranger, d’encourager les familles hollandaises, allemandes ou françaises à venir faire un tour du côté des trois lacs. Avec quels arguments? Vu de l’extérieur, et pour l’instant, le projet n’est pas plus attrayant que le Futuroscope de Poitiers (France) ou l’Europapark de Rist (Allemagne).
L’Expo.01 n’a pas été conçue comme un produit exportable. Elle ne peut pas remplacer Sion 2006 au rayon des grands projets d’ouverture de la Suisse. Que reste-t-il donc pour le moral national?
Il y a l’Europe, encore et toujours. L’adhésion à l’UE constitue la vraie confrontation au monde, la seule manière de prouver que la Suisse peut encore trouver sa place dans un environnement international.
Comprendre les règles du jeu et les appliquer, développer le dossier le plus solide, obtenir le plus large soutien populaire, présenter sa candidature et tout faire pour être reçu: c’était le projet de Sion 2006, ce doit être celui de l’adhésion à l’UE.