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Tiens, voilà du Parmelin

Le retrait attendu d’Eveline Widmer-Schlumpf donne des ailes aux candidats UDC au Conseil fédéral, qui chassent en ribambelle. Le paysan-vigneron de Bursins n’est pas le plus ridicule.

«Parmi les successeurs évoqués ces derniers jours, pas un qui s’approche même de loin des qualités d’Eveline Widmer-Schlumpf». Le jugement est carré. Normal il émane de Pascal Couchepin, dont la dentelle n’a jamais été le point fort. Pourtant la meute est lâchée des prétendants UDC au fauteuil de Mère Courage, comme on l’appelle déjà. Ce serait bien le diable si parmi ces assoiffés ne se trouve pas la perle rare. Voyons-y de plus près.

On ne parlera pas du très sérieux grison Heinz Brand, le vrai faux dur, à moins qu’il ne s’agisse d’un faux vrai dur, déjà présenté ici en favori. Ni du paysan toggenbourgeois Toni Brunner, par ailleurs président de parti et qui clame n’être pas candidat. Avec autant de conviction que son mentor Blocher et son porte-flingue Köppel affirment qu’il l’est ou du moins doit l’être.

On parlera encore moins d’Oskar Freysinger, le plus métissé des Saviésans, même s’il en est déjà à gonfler ses gros muscles. – «Moi, j’ai l’expérience d’un Exécutif et je suis tellement à l’aise en allemand que je passe pour un Alémanique», tiens-le toi pour dit, graine de Parmelin. Non, on ne parlera du gigantesque Oskar, parce que hein, Freysinger au Conseil fédéral, c’est quand même un coup à devenir un pays regardé dans le monde entier avec la même bienveillance que s’attire aujourd’hui l’aimable Etat Islamique.

Donc qui reste-t-il pour stopper la triomphale marche en avant du très déterminé Guy Parmelin? Pour mettre fin à ces interminables, ces horrifiantes 17 années passées sans un Vaudois au Conseil fédéral?

Une candidature partie en réalité d’une boutade, — tout à fait le genre de Parmelin. Celle de Christophe Darbellay mettant, rien que pour embêter les Blochériens, comme condition à un deuxième siège UDC qu’il soit latin. Comme il aurait pu dire martien. Mais ça c’était quand Darbellay était encore un centriste affiché — il y a longtemps certes, une petite semaine au moins –, et qu’il défendait encore le siège d’Eveline Widmer Schlumpf.

Donc cette fois tout devient sérieux et le général Parmelin entre en campagne. Le grand quotidien vaudois 24 heures y croirait même un tout petit peu: «Guy Parmelin ne fait pas trembler les foules par ses harangues enflammées, mais il peut relever le défi de la concordance et de la collégialité». Il faut bien reconnaître que face à lui, outre les poids lourds déjà cités, rien de très impressionnant ne se profile.

Il y a bien certes le thurgovien Roland Eberlé, pronucléaire et proche du Groupe Mutuel, tout pour être populaire donc, et qui s’avance doublement masqué: non seulement il jure, à la Toni Brunner, n’être pas candidat, mais en plus sa mère est vaudoise. Nul n’est tout à fait imparfait.

Sinon faut-il vraiment parler du Schaffhousois Heinz Hurter, pilote de ligne et de chasse qui a contribué à couler le Gripen au nom du Rafale? En plus, avec Berset, ça ferait deux chauves au Conseil fédéral, pas trop glamour tout ça. Quant à l’Argovien Hansjörg Knecht, qui dirige une entreprise de minoterie à Leibstadt, la force de ses convictions connues se résume à l’atome –, encore un.

Avec Thomas de Courten, un bâlois campagnard d’origine haut-valaisanne, c’est encore mieux: «On ne peut dire que ce soit un ténor, ni du Conseil national ni du groupe UDC», relève, perfide, Le Temps, qui en rajoute même une louche: «L’annonce de sa possible candidature a été accueillie avec des sentiments mêlés de scepticisme et d’indifférence».

Quoi d’autre? Un deuxième schaffhousois, Hannes Germann, président de l’Union maraîchère suisse, donc une sorte de Parmelin alémanique, d’autant que son parti le trouverait «un peu trop gentil», ce qui à l’UDC est plus qu’une faute, une tare. Et un deuxième pilote — de FA/18 — Res Schmid, conseiller d’Etat du demi-canton de Nidwald, un peu court donc pour viser le collège des Sages. Même cas de figure pour le conseiller d’Etat thurgovien Jakob Stark, surtout qu’une moustache et une licence en lettres sont de maigres arguments pour séduire l’Assemblée fédérale.

Enfin, puisque latin ne signifie pas forcément romand, il fallait bien un tessinois de service, Pierre Rusconi, blanchi sous le harnais, pour un physique entre Pierre Richard et le professeur Tournesol. En plus, il s’est ramassé une sévère gamelle le 18 octobre et n’a pas été réelu au Conseil national.

Cette galerie de portraits peut signifier deux choses: que décidemment Parmelin a toutes ses chances. Et qu’à défaut de la qualité, l’UDC peut toujours miser sur la quantité.