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Jamais contents, rarement vertueux

Les beautés contradictoires et nécessaires de la démocratie en trois anecdotes tragi-comiques, entre saucisses, vol autorisé et clause libératoire.

En ne voulant fâcher personne — travers bien suisse — on finit souvent par se mettre tout le monde à dos. Le Conseil fédéral en a fait la prévisible expérience avec sa timide décision d’actionner le plus discrètement possible la fameuse clause de sauvegarde. Discrètement parce que si cette restriction à l’immigration économique s’appliquera bien à tous les membres de l’UE — et non pas comme prévu dans un premier temps aux seuls nouveaux entrants — elle épargne en revanche les courts séjours, c’est-à-dire l’essentiel de cette migration-là.

Résultat: les Suisses, apeurés, qui ne voient dans l’afflux d’Européens qu’inflation des loyers, insécurité et dumping salarial, trouvent la mesurette bien trop timorée. Le PS estime qu’elle ne résoudra rien. L’UDC que mieux vaut, plus durablement — puisque la clause de sauvegarde ne peut s’appliquer que pendant une année — son initiative «contre l’immigration massive», aujourd’hui et dans les siècles des siècles.

Les milieux économiques sont encore plus sévères, jugeant que l’activation de la clause de sauvegarde n’aura que peu d’effets en terme d’immigration mais pas mal de conséquences négatives en matière de beaux contrats. Seul le PDC applaudit franchement, ce qui n’est jamais bon signe.

Une mesure que pourtant Bruxelles juge au contraire encore trop vexatoire. Ou du moins «guère nécessaire» et ayant le tort de méconnaître les avantages de la libre circulation autant pour la Suisse que pour l’Union, Catherine Ashton dixit, la fantomatique ministre européenne des affaires très étrangères. La morale de tout ça? Quoi qu’on fasse, surtout on s’y prend avec doigté et modération, ménageant la chèvre, le chou, la bergère et le maraîcher, les gens ne sont jamais contents. C’est même à cela qu’on reconnaît les saints climats démocratiques.

Des climats qui en ont vu d’autres et des bien pires. La France par exemple décrétant, dans le cadre des mesures «d’assainissement de la vie publique», que désormais l’administration fiscale aurait le droit d’utiliser des listings issus de CD volés. Le vol en guise d’assainissement public, les anarchistes poseurs de bombes du 19ème n’auraient pas osé mieux. La morale de tout ça? Qu’à condition que le but visé soit le bien commun, tous les coups sont permis. Le droit de tuer accordé à l’agent 007, celui de truander au fisc, et celui de ne pas fermer Guantanamo à l’homme le plus puissant du monde libre.

Enfin, assoiffés de vertu dans ce monde impitoyable, les gazettes et émissions sportives n’ont cessé ces derniers jours de vanter le modèle économique absolu en matière de football: le Bayern de Munich. Club sans dettes aucune, une exception formidable dans un milieu qui rendrait les casinos vertueux.

Sauf que dans le même temps, le président du même club, ancien joueur emblématique, le rougeaux et débonnaire Ueli Hoeness, actif aussi dans le commerce — très en gros — de la saucisse et traînant une tenace réputation de Monsieur Propre, l’intégrité faite bavarois en somme, s’est vu proprement «cahuzaquer». Arrêté pour fraude fiscale, libéré après un jour contre une caution de cinq millions: le misérable, qui reconnaît avoir commis «une très grande faute», avait un compte en Suisse. Caché comme il se doit. Sinon à quoi bon… La morale de tout ça? Dans le contexte actuel, peut-être ceci: que celui qui n’a jamais péché lui lance la première saucisse.