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Suisse-Allemagne: la guerre du fric

Forfaits, allègements et évasions fiscales: dès qu’il s’agit d’impôt, chaque pays, banque ou parti politique se transforme en chiffonnier. Analyse.

A deux doigts de la guerre! Ou pas loin: entre la Suisse et l’Allemagne rien ne va plus. Certes un accord a été signé concernant les fortunes allemandes planquées en Suisse — un impôt à la source prélevé par la Suisse au profit de l’Allemagne et appelé, comme c’est amusant, «libératoire».

Mais il est probable qu’il ne passera pas la rampe du parlement allemand — le SPD y est hostile, ce qui fait quand même du monde. En Suisse, l’enthousiasme est à peine moins flageolant: à part le PDC qui le juge «bon», à droite on trouve l’accord trop favorable à l’Allemagne et à gauche pas assez défavorable aux banques.

Cet accord «Rubik» cache donc une forêt noire de mauvaises humeurs et de colères épidermiques qu’a bien mise en lumière, par contre, l’affaire des CD volés. On a pu assister là à une vraie bataille de cour d’école avec échange de sinistres procédés et de mauvais coups qu’on se distribue d’habitude entre petites frappes.

Des juges suisses lancés à la poursuite d’inspecteurs du fisc allemand soupçonnés de vol de données de clients UBS: cela ressemble à tout sauf à des relations raisonnables entre deux pays prétendument stables et démocratiques. Des barbouzeries d’un côté, des mauvaises manières de l’autre, les deux dignes des plus misérables républiques bananières qui ont du moins, elles, l’excuse de la misère et des bananes. La fraude pour les uns, le vol pour les autres: ce n’est pas un combat de coqs mais l’affrontement de deux vilenies.

On prendra donc acte que lorsqu’il s’agit de fiscalité, les plus sérieux des Etats perdent largement leurs nerfs. Que, quand il s’agit de mettre la main sur le grisbi, les gouvernements les plus respectés sont prêts à se battre avec un sans-gêne et une mauvaise foi de chiffonniers.

Perdre à ce point toute retenue donnerait à penser qu’aujourd’hui, en Suisse comme en Allemagne, les autorités n’ont plus confiance en elles-mêmes, ne sont plus sûres de leur propre gestion, de leur propre capacité à gérer le pays et ses finances. Au point qu’il faille en venir à se tirer dans les pattes sur la place publique, pour arracher avec les dents un bout d’impôt par ci, par là, sur l’air de «c’est à moi! non c’est moi qui l’ai vu le premier!».

Ce sujet-là, il est vrai, a le don de rendre exaspéré et péremptoire à peu près tout le monde. Comme le montre la petite querelle qui oppose aujourd’hui chez nous les têtes dures de droite et les embouchés de gauche sur la question des forfaits et des allégements fiscaux consentis aux riches étrangers et aux entreprises toutes aussi étrangères désireuses de s’implanter dans le giron confédéral.

Parler, comme à droite, de «xénophobie économique», à propos des positions du PS contre ces allégements et forfaits, ne paraît pas d’une finesse ni d’une pertinence aveuglante. Cela ressemblerait plutôt à une médiocre manœuvre pour détourner l’attention de la vraie question: de tels forfaits sont-ils bien compatibles avec les principes d’équité et de justice fiscale?

Il faut dire que sur ce coup, le PS, comme souvent, a fourni les verges pour se faire battre en liant ces sussucres aux riches étrangers et aux entreprises avec les problèmes actuels de logement, de chômage et de surchauffe. Ne faut-il pas être économiquement gonflé pour nier que, même à forfaits, même avec des impôts allégés, l’apport des riches contribuables et des entreprises étrangères représente forcément un gain pour les cantons et les communes qui les accueillent?

Tout le monde, à gauche, n’enfonce pas cette porte ouverte, tel le conseiller national PS Jean-Christophe Schwaab qui parle de «débat délicat» et avance que «nous aussi, on veut des emplois et on ne prône pas la décroissance».

Sauf que là aussi, la question de la légitimité de ces spécialités fiscales se voit contournée au profit de leur efficacité, niée ou affirmée. Preuve qu’en ces matières, chacun se moque des principes et ne comprend qu’une chose, n’entend qu’un mot: pactole.