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Manger moins pour vivre vieux

De nombreuses expériences sur des animaux l’ont montré: manger peu prolonge l’espérance de vie. Des études prometteuses se tournent désormais vers l’homme.

Oméga 3, resvératrol, DHEA, mélatonine, procyanidine, rapamycin — mais aussi yaourt bulgare, gelée royale, papaye fermentée et testicules de chimpanzé… L’homme recherche depuis longtemps un élixir de longue vie pour contrer le processus inéluctable du vieillissement. Des potions dont la liste est longue, mais l’efficacité souvent bien limitée.

Plusieurs études prennent une toute autre direction. Elles sont peu médiatisées car guère porteuses d’intérêts financiers. Leur piste: manger peu pourrait contribuer à accroître l’espérance de vie, comme l’ont montré des expériences de restriction calorique effectuées sur près de 50 espèces (des levures aux singes en passant par les rongeurs, les invertébrés ou les poissons). L’hypothèse sous-jacente? La restriction calorique améliorerait le métabolisme des mitochondries, qui officient comme usines de production d’énergie de notre corps. Celles-ci, à leur tour, réduiraient la fragmentation de l’ADN en diminuant le stress oxydatif.

Toute extrapolation aux humains de résultats obtenus avec des animaux reste hasardeuse. L’exemple des habitants de l’île japonaise d’Okinawa à la durée de vie moyenne la plus longue dans le monde et à la proportion de centenaires la plus élevée est intéressant. Ils consomment 40% de calories de moins que les Américains et 17% de moins que les Japonais. Ils pratiquent le «Hara Hachi Bu» (qui se traduit approximativement par «mange jusqu’à 80% de ta faim»). Les chercheurs retiennent l’hypothèse de la restriction calorique pour expliquer leur exceptionnelle longévité. Mais reste à la vérifier avec un autre échantillon humain, d’une autre culture.

Ralentir son métabolisme

Le médecin américain Roy Walford est considéré comme le véritable pionnier dans l’étude du lien entre longévité et apport calorique. Il a observé, sur ses souris de laboratoire, que leur espérance de vie pouvait doubler avec une réduction calorique de 50%. Ses convictions diététiques sont rassemblées dans son best-seller «Un régime de longue vie» (2000). Durant trente ans, ce médecin a d’ailleurs appliqué au quotidien ses préceptes en consommant 1600 calories pour jour. Cela ne lui a pas permis de devenir centenaire: il est mort en 2004, à 79 ans.

Un biologiste formé à l’université de Lausanne poursuit les recherches au Pennington Biomedical Research Center de Bâton-Rouge en Louisiane. En 2002, Eric Ravussin reçoit 12 millions de dollars du gouvernement américain pour tenter de voir si, pour l’humain également, manger moins permet de vivre plus longtemps. En 2006, il publie ses résultats préliminaires, basés sur des mesures physiologiques effectuées sur ses cobayes — des participants suffisamment motivés pour accepter de se sous-alimenter. Après six mois d’observation, il constate que les sujets ayant reçu une basse ration calorique quotidienne ont vu leur taux d’insuline diminuer et leur métabolisme ralentir. Ces modifications sont extrêmement prometteuses dans la mesure où les auteurs de l’étude les associent à une augmentation de la durée de vie. Une conférence présentée à la Mayo Clinic, dans le Minnesota, dresse l’état des lieux en 2010. «Pour la première fois, on a la preuve que manger moins peut prolonger la vie», affirme Eric Ravussin.

De ce côté-ci de l’Atlantique, le travail de l’équipe du professeur Johan Auwerx de l’EPFL plaide en faveur d’une étiologie multifactorielle de la longévité. Sept cent cinquante gènes seraient impliqués mais également le style de vie et une alimentation inférieure à la consommation habituelle de la population: «Il a pu être établi que pour vivre plus longtemps, nous devrions en fait n’assouvir que 80% de nos besoins en nourriture».
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Une version de cet article est parue dans le magazine Reflex.