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L’automne de tous les dangers

Élection au Conseil fédéral, pic de la grippe porcine: septembre promet d’être chaud. Et si la pandémie avait son mot à dire sous la coupole au moment de choisir le successeur de Pascal Couchepin?

Mi-septembre: voilà le moment de tous les dangers. C’est là que devrait avoir lieu le pic de la grippe porcine en Suisse. C’est aussi le temps de l’élection du successeur de Pascal Couchepin. Imaginons des rangs clairsemés sous la coupole ce jour-là, des parlementaires alités en nombre et des rapports de force ainsi complètement chamboulés.

Sans parler des candidats eux-mêmes. Y en aura-t-il encore d’assez valides pour lever les trois doigts et prêter serment? On risquera bien pour la première fois de se féliciter, après s’en être gaussé tout l’été, de la pléthore de prétendants. La grippe pourrait d’ailleurs grandement faciliter la procédure de choix: élisons le moins malade, le plus résistant au virus, le plus immunisé, une sorte de sélection naturelle qui en vaut bien une autre.

C’est d’ailleurs ce qu’a montré l’interminable feuilleton estival autour de cette succession: la fragilité des critères censés faire un bon conseiller fédéral. La compétence? Avoir été un futé parlementaire, un judicieux chef d’exécutif cantonal ou même les deux à la fois ne garantit pas de devenir un éblouissant conseiller fédéral. Il n’y a dans ce domaine de preuve qu’à posteriori.

Le critère de représentativité ne nous aide pas beaucoup plus. Laissons de côté l’argument linguistique déjà commenté ad nauseam, cette insoluble question de savoir ce qui vaut mieux: un alémanique parfaitement bilingue ou un ressortissant de Sainte-Croix obstinément monolingue.

Voyons maintenant la cantonalité: faut-il préférer le retour d’un vaudois — le troisième canton le plus «populeux» de Suisse — ou un deuxième siège pour la mégapole genevoise, histoire d’égaliser la surreprésentation zurichoise? Ou jouer la carte périphérique, neuchâteloise ou fribourgeoise? La stricte équité voudrait que soit élu un ressortissant du canton le moins représenté au Conseil fédéral dans toute l’histoire.

Il s’agit malheureusement de Schwytz, ce qui fait moyennement avancer le schmilblick. Si l’on affine un peu, on pourra suggérer d’élire le représentant d’une minorité quelconque exclue du Conseil fédéral actuel. Lequel ne compte pas de porteur de lunettes. Avantage Broulis. Ni de blonde. Avantage Brunschwig Graf. Ni de skieur nautique. Avantage Lüscher.

Et si l’on doute encore du rôle que le virus H1N1 pourrait jouer dans cette élection, c’est que l’on n’a pas pris connaissance de la guéguerre que se livre l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) et le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco). Pour le premier, les consignes sont claires: rester chez soi, ne sortir sous aucun prétexte si l’on est atteint de grippe porcine. Au diable donc le certificat médical pour justifier son absence au travail. Pour le second, en revanche, pas question d’assouplir les normes sous peine d’ouvrir la porte à de nombreux abus.

Avec pareille pandémie à nos portes, on voit donc bien l’avantage d’élargir à l’infini la liste des papables au Conseil fédéral et combien ce critère de la bonne santé semble plus sérieux et solide que les autres. Pourquoi ne pas puiser à cet effet dans la société civile? L’UDC a montré l’exemple en suggérant le nom du directeur sortant de la BNS, le valaisan Jean-Pierre Roth. Lequel, malheureusement, s’est déjà moqué en privé de cette excellente initiative et gaussé de la perspective qui s’offrait à lui: «Rester à Berne pour un salaire divisé par deux.»

Dans la même veine — celle des valaisans méritants et surpayés — il existe encore une bien meilleure piste. Quid de Sepp Blatter au Conseil fédéral? Un type qui a ses entrées à la Maison Blanche et dirige une association comptant plus d’Etat membres que l’ONU, reçu partout en leader d’une grande puissance, voilà exactement ce qu’il faudrait à une Suisse de plus en plus renvoyée à son insignifiance et ses mauvaises pratiques. On image déjà le bon Sepp aller prendre le thé avec Obama et lui dire: «Lâche-nous avec UBS et je te donne la prochaine coupe du monde.»