LATITUDES

John Kerry et maillots vintage sur combinaisons en néoprène

Toujours très attentif à son image, le candidat démocrate s’adonne au plus branché des sports aquatiques. Comme en Engadine.

L’Amérique se donnera-t-elle un président kitesurfeur? C’est le Boston Globe qui pose la question. On savait déjà John Kerry hockeyeur, golfeur, windsurfer, skieur, cycliste ou encore pilote. On vient de le découvrir imitant Pierce Brosnan dans «Die Another Day», aux commandes d’un de ces surfs tirés par un cerf-volant.

Des conseillers en image ont vraisemblablement tenu à ce que le plus branché des sports aquatiques compte au nombre des activités du candidat démocrate. Un choix symboliquement audacieux. «Et si, comme sur l’eau, l’homme politique allait changer de cap à chaque nouvelle orientation du vent?», se demande-t-on dans un forum réservé aux kitesurfeurs.

Le dernier né des parfums de la gamme Ralph Lauren, «Ralph Cool», joue la même carte «sport tendance» et incite les «ralphettes» à chasser et à enfermer dans leurs flacons le maximum de kitesurfeurs. En se rendant cette semaine à Silvaplana, elles auront trouvé du beau gibier.

Le World Kite Open s’y déroule cette semaine. L’Engadine abrite en effet un excellent spot qui attire les adeptes de plus en plus nombreux de ces «cerfs-volants du 21ème siècle».

Le kitesurfing ou kiteboarding ou encore flysurf est un sport de glisse qui monte en flèche. Il s’agit d’un mélange de planche à voile, de wakeboard, de surf et de parapente. Les deux pieds sont placés dans des sangles sur une mini planche de surf, et on tient une barre qui contrôle un énorme cerf-volant (de 3 à 10 m2). Les cordelettes qui guident la voile ont plus de 30 mètres et sont soumises à d’énormes tensions (plus de 300 kg).

Sa pratique n’est pas sans danger. On dénombre déjà plusieurs accidents graves et même quelques morts. Les assurances privées RC ne couvrent d’ailleurs pas le kitesurf et un texte de loi spécial kitesurf a vu le jour en Suisse.

Je viens de passer des heures à contempler les chorégraphies de ces énormes papillons en dessus du lac de Silvaplana. Juste à côté d’eux, les véliplanchistes ne retiennent plus guère l’attention des promeneurs spectateurs. Ces deux tribus se partagent, non sans quelques problèmes, la surface d’un lac quelques fois bien restreinte pour accueillir tant de monde.

L’uniforme des windsurfers est la combinaison noire en néoprène, indispensable avec une eau qui ne dépasse guère les 14 degrés. Si les kitesurfeurs débutants ont en général la même tenue, les cracs eux prennent soin de camoufler leur combinaison sous des survêtements «vintage». Style training Nabholz ou maillot de foot ou de hockey.

Pourquoi se revêtir d’étoffes perméables qui se transforment en un rien de temps en éponges dégoulinantes? J’ai posé la question à une dizaine de pratiquants. Les hommes, un peu mal à l’aise, ont tous commencé par évoquer un aspect pratique: éviter l’usure de la combinaison…

C’est de Sandra qu’est arrivée l’explication qui paraît se rapprocher le plus de la vérité: «On ne veut pas passer pour des windsurfeurs. Ce sont des papys. Nous, on est plus fun, plus jeunes.»

Une petite guerre vestimentaire des anciens contre les modernes semble diviser ces deux tribus lacustres. Avec un avantage certain pour les kitesurfeurs. On comprend que John Kerry ait déjà choisi son camp.