LATITUDES

«Nous côtoyons un voltage de 690 v au quotidien»

Pas moins de 260 km de lignes aériennes électriques – l’équivalent de Lausanne-Colmar – alimentent les trolleybus de la ville. Rencontre avec l’un des techniciens responsables de l’entretien de ce réseau.

Avec 77 trolleybus à perches sur dix lignes des transports publics lausannois (tl), Lausanne est en Suisse la ville qui exploite le plus ce mode de transport écologique. Chaque année, en parcourant plus de 5 millions de km avec des trolleybus plutôt qu’avec des bus diesel, c’est l’émission de presque 7000 T de CO2 qui est évitée. Le 2 octobre, le réseau de trolleys lausannois, l’un des plus anciens au monde encore en fonction, fête ses 90 ans de bons et loyaux services. Une tâche impossible à assurer sans les lignards, chargés de la maintenance des lignes aériennes électriques. L’un d’eux, Rafael Mota Tiago, Lausannois de 22 ans, nous dévoile les différentes facettes de ce métier exigeant.

Combien de personnes assurent le bon fonctionnement des lignes ?

Rafael Mota Tiago: Dix techniciens, c’est-à-dire dix lignards, ainsi que deux chefs d’équipe, un manager, deux coordinateurs et deux apprentis.

Quelles sont les tâches principales d’un lignard ?

Nous construisons et entretenons les lignes aériennes de contact et effectuons les modifications de lignes nécessaires, comme avant la fermeture du Grand-Pont pour travaux. Nous faisons beaucoup de dépannages, environ 350 par an, 24h/24, jours fériés et week-ends compris. Nous côtoyons un voltage de 690 V au quotidien.

Quel genre de pannes touche le réseau ?

Il y en a trois types: celles relatives à un dysfonctionnement d’aiguillage, les accidentelles dues à un éclair, un arbre, ou de source humaine, comme un camion trop haut ou les trolleybus qui «déperchent», ce qui peut endommager, voire arracher, une partie de la ligne. Selon la nature des dégâts, l’intervention peut durer entre deux minutes et cinq heures !

Quels sont les dangers de votre profession ?

Pour éviter tout risque, nous réalisons régulièrement des maintenances préventives. En cas de ligne à terre, nous arrivons rapidement et, suivant les cas, l’électricité se coupe automatiquement grâce à un disjoncteur ou peut aussi l’être à distance via notre centre de régulation du trafic. Et nous travaillons toujours à trois: une personne pour faire la circulation et deux sur la nacelle qui ont un regard mutuel l’un sur l’autre afin de prévenir une éventuelle erreur.

Quelle facette de votre métier préférez-vous ?

Les dépannages, car il faut trouver des solutions rapidement. J’aime cette adrénaline. J’aime aussi travailler au grand air. Et j’apprécie beaucoup mes collègues. On est tous devenus amis en dehors du travail. On fait du padel-tennis à Romanel et on est quatre à faire partie du club de foot des tl.

Lausanne, 23 mars 2022.
Rafael Mota Tiago, lignard aux TL.
©François Wavre | Lundi13

Quelle a été votre intervention la plus marquante ?

C’était un dimanche, sur le LEB, où la ligne de contact a été arrachée sur 500 mètres. Le dépannage a duré un jour et une nuit. Nous étions deux équipes à nous relayer. Nous y sommes tous allés, même ceux qui n’étaient pas de piquet. Une mobilisation et un travail d’équipe qui m’ont touché !

Comment devient-on lignard ?

Depuis mes 12 ans, je souhaitais travailler dans l’électricité, alors j’ai fait un CFC d’électricien de réseau en énergie. Mais il y a une spécialisation « ligne de contact », option du CFC, qui permet de devenir lignard. En rejoignant les tl, j’ai eu la chance de suivre cette spécialisation grâce à une formation interne certifiante. Il faut aussi être débrouillard et ne pas avoir le vertige, car les lignes sont à 5,80 m du sol. Et accepter que toutes les cinq semaines, en tournus, on assure sept jours de piquet.

Jusqu’où intervenez-vous ?

Renens à l’ouest, le Mont-sur-Lausanne au nord et Lutry à l’est. On s’occupe aussi de la ligne de chemin de fer LEB dans le Gros-de-Vaud, de celle du métro m1 et on couvrira le futur tram jusqu’à Bussigny.

Quels lieux recommandez-vous à Lausanne ?

J’aime manger à la Pinte du Lac de Sauvabelin après une balade en famille. Je me rends souvent à la piscine de Bellerive et j’en profite pour aller au Mövenpick. Le soir, j’apprécie le quartier du Flon. J’y recommande le Forbici pour sa cuisine italienne, et le Punk pour son ambiance et sa musique.

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Une version de cet article réalisé par Large Network est parue dans The Lausanner (n° 9).