KAPITAL

La start-up lausannoise qui marche sur les pas de Google

Albert Inc, la jeune compagnie internationale dirigée par Beth Krasna, développe des moteurs de sens plutôt que des moteurs de recherche. Pour améliorer la communication entre hommes et machines.

Cette fois-ci, le prénom Albert ne fait pas référence à Einstein, mais à une société high-tech qui a installé ses quartiers généraux à Lausanne, à portée de voix des hauts-parleurs de la gare. Vous sonnez à la porte, et c’est la directrice en personne qui vient vous ouvrir.

Un reste de la décontraction des start-up d’avant la débâcle? «It’s so pre-millenium!», plaisante Beth Krasna. En plein mois d’août, les bureaux surchauffés d’Albert Inc. sont presque déserts. Seuls la CEO et trois employés assurent la permanence.

Ces derniers mois, Beth Krasna a dû redimensionner la société qu’elle dirige depuis janvier 2001. L’effectif international est passé de 70 à 55 postes et de nouvelles suppressions d’emplois ne sont pas exclues. Les temps sont durs pour les entreprenautes.

Dans les succursales de New York, Paris et Londres, les employés d’Albert traquent le client et tentent de placer leurs logiciels d’extraction à l’essai. Ils ont des arguments à faire valoir – la recherche sur internet ne se limite pas à Google. Tout reste à faire dans la communication entre l’homme et la machine, et Albert, avec ses équipes de linguistes et de développeurs basées à Montpellier, dispose d’excellents atouts.

Le problème est plutôt conjoncturel. Depuis l’éclatement de la nouvelle économie, les entreprises réduisent leurs budgets informatiques et diffèrent leurs investissements. «Il faut donc trouver des clients de référence, développer le principe du «try and buy» et travailler, travailler, travailler», dit Beth Krasna.

L’ampleur de la tâche ne l’effraie pas. Cette ingénieure chimiste de haut vol, formée à l’EPFZ et au MIT, avait déjà dirigé et restructuré les activités industrielles de Sécheron, à Genève. «Ce qui m’intéressait en reprenant Albert, c’était la convergence entre l’ancienne et la nouvelle économie. J’aime ce qui évolue.»

La culture familiale de Beth Krasna l’a préparée aux évolutions. Son père était tailleur à Kiev avant de partir pour la Californie, où il a fait carrière dans l’industrie du rêve (on lui doit notamment le scénario du Milliardaire avec Yves Montand et Marilyn Monroe). Autant dire que, dans la famille, la barre était placée assez haut en matière de réussite professionnelle.

Albert Inc. ne manque pas non plus d’ambition. «Notre but est de libérer les hommes en permettant aux machines de les comprendre», explique Beth Krasna. Ce projet aux dimensions utopistes passe par des outils qui fédèrent les bases de données, et surtout par des logiciels qui comprennent le langage naturel. L’utilisateur doit pouvoir formuler ses requêtes de manière spontanée, exactement comme il le ferait en parlant à un ami.

Les employés d’Albert Inc. ont pris l’habitude de dire qu’ils développent des «meaning engines» (moteurs de sens) plutôt que des «search engines» (moteurs de recherche).

Un exemple concret? Beth Krasna se lance: «Si vous dites à l’ordinateur «mon chien est malade», il doit vous envoyer vers un vétérinaire. Si vous lui dites «Mirza est malade», il doit aussi comprendre que Mirza est votre chien. Et si vous lui dites «ma voiture est malade», il doit pouvoir décoder que vous avez besoin d’un garagiste. Euh, vous voyez ce que je veux dire?»

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Logique floue et linguistique

«En 2001, seuls 55% des sites d’Etat étaient dotés d’un outil de recherche, et la moitié d’entre eux ne fonctionnaient pas», dit la brochure d’Albert Inc. Cela donne une idée du marché qui s’ouvrira à l’entreprise qui saura développer des moteurs de recherche efficaces, clairs et simples d’usage.

L’entreprise Albert Inc. a été fondée en 1999 par Jean-Michel Livowski et financée dans la foulée par Tag Group et la Banque Pictet. Les logiciels développés par la jeune entreprise lausannoise fédèrent les bases de données. Ils facilitent l’extraction d’informations en s’adaptant au profil de l’utilisateur. Ils exploitent par ailleurs les requêtes déjà formulées par l’usager. La logique floue et la linguistique sont aussi mises à contribution pour permettre à ces logiciels de comprendre le langage naturel.

Albert Inc. compte parmi ses clients pilotes des organisations comme Saab, Forbes, Réseau France-Outremer et Hospit-Hall.

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Une version de cet article de Largeur.com a été publiée le 1er septembre 2002 dans l’hebdomadaire Dimanche.ch.

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