LATITUDES

Le syndrome des syndromes

S’il est une épidémie bien réelle, c’est celle des syndromes. Venus du monde de la médecine, ils envahissent progressivement l’ensemble des comportements humains. Signe d’une société devenue hypocondriaque?

Je pensais être une rescapée du syndrome du burn out, du cialis kamagra uk des jambes lourdes, du cialis ordering online des achats compulsifs, du syndrome de la fatigue chronique ou du syndrome de Kate Moss…

Et voilà que je me retrouve victime du syndrome de l’overthinking. Il a été découvert par Susan Nolen-Hoeksema, professeur de psychologie, auteur de «Pourquoi les femmes se prennent la tête?».

Le syndrome de l’«overthinking» ou du «trop penser» (qualifié de «nouveau must-have tout vibrant de promesse fashion», selon le magazine «Elle» du 10.10.05) consiste à examiner et interroger ses pensées et sentiments de manière récurrente.

Vous arrive-t-il de rester réveillé la nuit en songeant à la façon dont vous pourriez mieux faire? Vous posez-vous d’innombrables questions sur vos choix professionnels en regrettant les erreurs commises et en vous projetant dans l’avenir? Avez-vous du mal à oublier les traumatismes du passé? Si vous avez répondu oui à une ou plusieurs de ces trois questions, vous êtes un ou une overthinker.

Qui peut prétendre échapper à cette étiquette? Pas de panique, la psy américaine arrive avec des trucs pour s’en sortir. Ainsi l’«invective solennelle» qui consiste, lorsque pointe la prise de tête, à prononcer à voix haute la formule suivante: «Overthinking tu n’es pas mon ami, tu me fais mal, va-t’en!». Tentez le coup, en plein entretien d’embauche, par exemple!

Voilà donc un syndrome de plus à répertorier dans la grande classification des syndromes.

En médecine, les syndromes sont «l’association de plusieurs symptômes, signes ou anomalies constituant une entité clinique reconnaissable, soit par l’uniformité de l’association des manifestations morbides, soit par le fait qu’elle traduit l’atteinte d’un organe ou d’un système bien défini» (définition du Petit Robert). Syndrome métabolique, respiratoire aigu sévère, commotionnel, de Down, de Tourette , de Cushing ou d’Asperger: ils sont extrêmement nombreux.

Le terme s’exporte aujourd’hui dans des registres fort éloignés, a priori, de la pathologie. Aucun domaine n’y échappe.

L’informatique a ses syndrome d’internet, de Google, de Skype et bien d’autres. Idem pour le football avec ceux des Bleus, de Zidane, de Cissé, des Camérounais, du match par match.

Les parents tentent d’éviter le syndrome du bébé secoué, les adolescents celui de Tanguy. Les médias succombent quelques fois à ceux de la presse cannibale ou de Bogota. Les militaires souffrent du syndrome des Balkans ou de la Guerre du Golfe.

Les politiciens de ceux de Pinocchio, de l’Ile de Ré, de Massoud, Arafat ou de Zarkaoui. Les citoyens européens viennent de se concocter le syndrome du plombier polonais. Les scientifiques se méfient plus que jamais du syndrome de Frankenstein et les éducateurs de celui «d’échec scolaire». Les économistes ont en mémoire le syndrome d’Enron et de Messier.

L’i-génération est victime du syndrome d’«egocasting». Katrina l’ouragan a laissé derrière lui son syndrome éponyme. Même Franz Ferdinand, pour qui tout baigne en ce moment, avait peur du syndrome du second album…

Tous ces exemples ont été relevés dans la presse. Aquand la parution d’un «Dictionnaire des syndromes»?

Rien n’échappe à la syndromania. Une tendance à tout cataloguer sous forme de pathologies sécrétée par une société en proie à l’hypocondrie? Une thèse défendue et bien documentée dans «Les inventeurs de maladies» de Jörg Blech qui vient de paraître en français. En docteur Knock, le scientifique allemand démontre que si nous nous laissons faire, tout bien portant sera bientôt simplement un malade qui s’ignore.