KAPITAL

Portrait de groupes

Historiquement constitué de marques fièrement indépendantes, le secteur horloger suisse vit depuis trente ans une phase importante de consolidation et de regroupements, autour de quatre groupes dominants.

Les marques suisses aiment à par­ler d’indépendance pour promou­voir leurs créations. Dans les faits cependant, rares demeurent les horlogers de taille conséquente échappant encore à l’orbite des groupes consolidés. Les grandes exceptions sont bien évidemment le «Big Three»: Rolex, Patek Philippe et Audemars Piguet. En termes de ventes consolidées, c’est le «Big Four» qui domine, constitué – dans l’ordre du chiffre d’affaires – du Swatch Group, leader historique du secteur, de Richemont, grand acteur de la haute horlogerie, et des deux géants du luxe mondial LVMH (dont le vaisseau amiral est Louis Vuitton) et Kering (propriétaire de Gucci).

Ces vingt dernières années, ils ont fortement investi dans des rachats de marques de montres. Selon un rapport de Morgan Stanley datant de l’an dernier, Swatch Group représente 29,1% des ventes de montres suisses dans le monde, devant Riche­mont à 19,7%. Les actifs horlogers du groupe LVMH constituent 7,9% des ventes de montres suisses. Le groupe français Kering a encore du terrain à rat­traper, puisqu’il ne représente qu’envi­ron 1% du total.

Swatch Group: des racines industrielles

Héritier du principal appareil de pro­duction de l’industrie horlogère suisse suite à la crise du quartz, le Swatch Group reste aujourd’hui la « colonne vertébrale » de la branche, notamment à travers sa filiale ETA, le fournisseur principal de mouvements de l’industrie.

Cet empire industriel compte plus d’une quinzaine de marques, structurées selon une pyramide très claire visant à gérer la concurrence interne : Swatch et Flik Flak constituent l’entrée de gamme ; Tissot, Balmain, Certina, Mido, Hamilton et Calvin Klein le milieu de gamme ; Lon­gines, Rado et Union Glashütte le haut de gamme ; Breguet, Harry Winston, Blancpain, Glashütte Original, Jaquet Droz et Omega la gamme prestige/luxe.

Les poids lourds du groupe sont incon­testablement Omega, Longines et Tissot, qui toutes dépassent le milliard de ventes annuelles (en francs suisses).

Richemont: un pilier de la Haute Horlogerie

Officiellement, le groupe s’appelle « Compagnie Financière Richemont » – et de fait, tout semble le différencier d’un Swatch Group aux origines et à la phi­losophie plus industrielles. Le groupe, basé à Bellevue près de Genève, contrôle un ensemble de maisons évoluant sur le créneau haut de gamme.

La part de la joaillerie au sein du groupe Richemont est particulièrement impor­tante (dépassant légèrement celle de l’horlogerie), notamment à travers son poids lourd Cartier, ainsi que Van Cleef & Arpels, autre maison parisienne de renom. Ses actifs horlogers sont nom­breux en Suisse, de Vacheron Constan­tin à Jaeger-LeCoultre, en passant par IWC, Panerai et Montblanc. Depuis l’an passé, le groupe a opéré un grand rajeunissement de la direction de ses marques horlogères.

Kering: entre mode et grande tradition

Outre Gucci, sa marque-phare dans le domaine de la mode, le groupe Kering possède un pied en Haute Horlogerie, via les rachats de Girard- Perregaux et Ulysse Nardin. Ces mai­sons, dont les origines remontent respectivement à 1791 et à 1846, per­mettent à Kering de se positionner parallèlement sur les aspects tradi­tionnels et disruptifs de l’horlogerie.

LVMH: des leaders charismatiques

Le numéro un mondial du luxe n’est pas en reste en ce qui concerne l’horlogerie. Le géant français LVMH est en effet pro­priétaire de marques de montres particu­lièrement dynamiques, dirigées par des personnalités reconnues : Jean-Claude Biver a supervisé pendant près de cinq ans le pôle horloger du groupe (comprenant TAG Heuer, Hublot et Zenith) avant de remettre le témoin à une nouvelle géné­ration ; Jean-Christophe Babin assure, quant à lui, la direction de Bulgari. À cela, il faut encore ajouter la produc­tion horlogère propre de Louis Vuitton, ainsi que celles de Fendi et Chaumet.

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Une version de cet article est parue dans le magazine Les Ambassadeurs (no 23).