LATITUDES

Petites recettes et plus si affinités

Trouver l’amour en apprenant la cuisine: c’est le concept de Date & Cook, qui veut multiplier les soirées en Suisse romande. Reportage à Genève.

«La cuisine est une belle façon de permettre aux gens de se rencontrer. Elle leur fournit des sujets de conversation.» Ne dit-on pas que l’amour passe par l’estomac? L’idée d’organiser des soirées pour célibataires autour de cours de cuisine s’est imposée naturellement à Jérôme Binder, à la tête de Parfums d’épices, une société spécialisée dans la formation gastronomique et la découverte de saveurs.

Pour la première soirée Date & Cook, qui avait lieu début juillet à Carouge (GE), le diplômé de l’Ecole hôtelière de Lausanne avait concocté un menu qui joue sur les épices et les ingrédients réputés aphrodisiaques. «Pour pimenter la soirée et garder l’anonymat, chaque participant porte le nom d’une épice.»

Sept hommes, sept femmes, sept recettes, sept rencontres. Dans la belle cuisine au premier étage de la Brasserie des Tours, les quatorze célibataires âgés de 30 à 50 ans s’observent autour d’un verre de bienvenue. Il est 18 h 30. Les participants sont encore un peu tendus, ils expliquent qu’ils sont venus avant tout pour l’expérience culinaire, mais que «le bonus serait de rencontrer quelqu’un».

Présenté sous le nom de Girofle, un charmant trentenaire rasé de frais, chemise blanche entrouverte, dit apprécier la formule car «il n’y a pas assez de soirées de rencontres originales, c’est une occasion à saisir». En longue robe fleurie, Cannelle, pimpante quinqua, a été attirée par l’idée de mélanger hommes et femmes autour de bons petits plats.

Safran et curcuma

Le concept de la soirée est simple: chaque femme se voit attribuer une des sept recettes du menu, secondée successivement par trois hommes jouant le rôle d’assistants. Ceux-ci changent toutes les quinze minutes de poste, selon un système de rotation, pour un total de 45 minutes par plat.

Le coup d’envoi est donné à 19h. Les sept premiers binômes se forment: Safran, jeune fille au caractère directif, et Curcuma, garçon plutôt timide, commencent la saladine de poulet au citron vert, alors que le dragueur Gingembre s’attelle à la réalisation des keftas d’agneau avec Coriandre, charmante expatriée allemande. Les couteaux s’activent, les poêles grésillent et les bonnes odeurs montent, alors que Jérôme et ses collaboratrices circulent en prodiguant des conseils culinaires. Les rires fusent et les langues se délient.

«C’est super, j’aime bien donner des directives aux hommes», rigole la dynamique Safran. «J’ai hâte de goûter nos chefs-d’œuvre», renchérit Fenugrec en touillant dans une casserole. Derrière les tabliers, les profils se dessinent: certains binômes discutent beaucoup alors que certains se contentent de travailler; d’aucuns prennent leur temps alors que d’autres sont expéditifs. «Les gens se comportent en cuisine comme dans la vie, analyse Jérôme Binder. On constate très rapidement s’il y a affinité avec quelqu’un ou pas.»

Bredouille mais rassasié

Une fois les plats terminés et dressés, une dégustation de bière est prévue dans la brasserie du sous-sol, pendant que Jérôme et ses collaboratrices mettent la table. Lorsque les participants remontent, tout est prêt pour qu’ils dégustent leurs plats et commentent leur travail, ainsi que la soirée. «Les plats sont magnifiques, Jérôme et son équipe sont vraiment exigeants sur la présentation», relève Curcuma. «J’ai passé une très agréable soirée, commente Moutarde, même si je n’ai pas rencontré la femme de ma vie.» Anis ajoute avoir apprécié le travail en binôme, mais regrette parfois que l’attention soit davantage portée sur la recette que sur le partenaire.

Il semble que, pour cette fois, chacun reparte comme il est venu. Même si certains participants auraient aimé davantage d’homogénéité dans les âges, ou passer plus de temps avec certains candidats, Jérôme nous rappelle que cela reste avant tout un cours de cuisine. Et Cannelle d’ajouter en riant: «On a beau faire les meilleures soupes dans les vieilles marmites, la sauce ne peut pas prendre à tous les coups!»
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Une version de cet article est parue dans L’Hebdo.