Les Suisses ont attendu les derniers jours avant les Fêtes pour effectuer leurs achats. Pas assez pour relancer le commerce, qui souffre de l’incertitude économique, de la concurrence des magasins en ligne et du franc fort.
«La fin de l’année 2011 est une catastrophe économique. Vivement 2012!» Marcel Savioz, vice-président de l’Association suisse des magasins d’articles de sport (Asmas), ne le cache pas: «En cette fin d’année, les commerces spécialisés dans le sport accusent une baisse à deux chiffres de leurs revenus.»
Pour le vice-président de l’Asmas, plusieurs raisons expliquent ce climat morose. «La météo n’a pas aidé, la neige est arrivée tard. Et bien sûr, il y a la conjoncture économique qui pousse les Suisses à reporter leurs achats.»
Selon la dernière enquête du Secrétariat d’Etat à l’économie, l’indice du climat à la consommation a chuté à -24 points en octobre, alors qu’il se situait encore à -1 en avril et à +10 en janvier. Résultat: les ventes en cette fin d’année s’affichent à la baisse.
«Nous sentons clairement que la crise est arrivée, affirme Dominique Locher, directeur marketing et ventes chez LeShop.ch. Au premier semestre 2011, nos ventes étaient en hausse de 7% par rapport à 2010. Mais depuis juillet, le vent a tourné. Les gens achètent moins.» En tout cas, ils achètent moins dans les commerces suisses.
«Nous observons une vraie différence entre les villes proches des frontières et celles situées au centre du pays, poursuit Dominique Locher. Dans les premières, notre chiffre d’affaires a chuté alors que nous restons en croissance dans les autres. Les Suisses qui en ont la possibilité vont de plus en plus faire leurs courses à l’étranger.» Selon le cabinet Deloitte, 56% des consommateurs suisses ont fait cette année une partie de leur shopping de Noël dans la monnaie européenne, contre 48% en 2010.
«Les Suisses n’ont jamais acheté autant de livres qu’aujourd’hui. Mais il y a une désaffection pour les librairies. Ils préfèrent acheter à l’étranger ou sur les sites de vente en ligne français où les livres sont moins chers», confirme Pascal Vandenberghe, directeur des librairies Payot, et qui a lancé la bataille contre les intermédiaires suisses pour rapprocher ses prix de ceux pratiqués en France. Mais Noël n’est pas venu inverser la tendance. Et selon l’étude du cabinet Deloitte, «48% des consommateurs suisses ont effectué leurs achats de Noël via des portails en ligne, soit 36% de plus que l’an passé».
Dans la mode, la chute fait aussi mal: «Notre chiffre d’affaires a diminué de 20% par rapport à l’an dernier», estime le responsable d’une boutique genevoise de vêtements.
Le géant Manor peut se vanter d’avoir particulièrement bien résisté dans la tempête: «Les trois dernières semaines de l’année sont réjouissantes puisque les ventes sont légèrement supérieures à celles de 2010, se félicite Elle Steinbrecher, porte-parole de Manor. Après un début de période de Noël un peu plus lent que d’habitude, les achats se sont accélérés. Cela confirme la tendance observée ces dernières années: les Suisses font leurs achats les derniers jours précédant Noël.»
Dans les boutiques de luxe, la bonne humeur est également de mise: «Noël a été un peu plus calme que l’année dernière, mais dans l’ensemble nous sommes très satisfaits, souligne Claude Jutzi, directeur du magasin Bucherer à Lausanne. Contrairement à ce qui était prévu, les touristes sont là.»
Reste la bonne nouvelle côté voitures: «Nous réalisons une très bonne fin d’année en termes de ventes, dit aussi Roland Bandieri, président de l’Union professionnelle suisse de l’automobile (UPSA). Les ventes de voitures neuves ont été encouragées par les primes « franc fort » accordées par les importateurs. En revanche, le marché de l’occasion est en retrait.»
Le couperet de la taxe CO2, appliquée depuis le 1er janvier de cette année, a aussi poussé les consommateurs à acheter leur véhicule fin 2011.
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Une version de cet article est parue dans L’Hebdo.