LATITUDES

Le retour à la compétition des mères championnes

Une nouvelle discipline semble émerger dans le sport féminin: qui réussira à reprendre le plus rapidement la compétition après un accouchement? Et qui sera celle qui réussira, en plus, à battre ses propres records?

Elles ne font plus figure d’exception. De plus en plus de sportives poursuivent leur carrière après une maternité.

Tout comme Rachida Dati et ces «executive women» qui reviennent aux affaires dans des délais très brefs, les athlètes retournent elles aussi à l’entraînement de plus en plus rapidement. Ici, le défi, parce que physique, prend il est vrai une autre dimension. Poursuivre un entraînement pendant la grossesse et le reprendre peu après l’accouchement, n’est-ce pas mettre en danger la santé de la mère et de l’enfant?

Des recherches scientifiques affirment que la poursuite de l’entraînement à un niveau d’intensité suffisamment élevé pendant la grossesse peut maintenir le niveau de condition physique des athlètes sans présenter de risque pour la mère et le fœtus. Conserver sa forme jusqu’au jour J, c’est du même coup pouvoir redémarrer sans trop de délai.

On voit des championnes de motocross enfourcher leur bécane sans attendre leur retour de couches comme l’auraient sagement fait leurs grand-mères. Ainsi la Canadienne Cindy Trudel.

Charlotte, sa fille, est née à la mi-février. La maman est aussitôt revenue à la compétition mais reconnaît avoir sous-estimé l’impact d’un accouchement sur sa forme physique: «J’aurais eu besoin d’un mois de plus pour être vraiment prête pour ce niveau de compétition. Pas grave, je veux déjouer tous les sceptiques! Je vais y arriver», martèle la nouvelle maman.

Xian Dongmei, la médaillée olympique de judo, un sport pas vraiment de tout repos non plus, était bien revenue à la compétition trois mois après la naissance de sa fille. Idem, en fleuret avec les championnes que sont Valentina Vezzali et Giovanna Trillini.

Le 22 mai dernier, Kerri Walsh, la médaillée d’or olympique de beach volley, donnait naissance à un petit John. Alors qu’elle pensait s’offrir un bon moment de répit, n’y tenant plus de retrouver le sable, elle vient de faire son retour début août en compagnie d’une autre maman de fraîche date, Rachel Wacholder.

Le 30 juin dernier, on pouvait lire «I’m bbbbaaaacccckkkk!!» sur le Twitter de Candace Parker, une cri du coeur de la superstar américaine du basket qui annonçait ainsi son retour à la compétition après avoir accouché pendant l’inter-saison.

Catriona Matthew faisait récemment la une de la presse britannique. La golfeuse écossaise vient de remporter, onze semaines après être devenue mère un tournoi important.

Arrêtons ici notre énumération: les exemples abondent qui prouvent que devenir mère ne signifie plus renoncer à des succès sportifs. C’est dans les épreuves d’endurance que l’on trouve le plus d’athlètes revenues non seulement à la compétition mais à un meilleur niveau après leur accouchement.

Ainsi les marathoniennes Liz McColgan et Paula Radcliff ont-elles signé des performances remarquables quelques mois seulement après leur accouchement.

Leurs témoignages concordent: elles se sentent plus fortes qu’avant, surtout mentalement. «Avant d’avoir un enfant, c’était difficile de penser à autre chose qu’au sport à longueur de journée. Maintenant, après mon entraînement, qu’il se soit bien ou mal passé, Isla (le prénom de sa fille, ndlr) n’en a rien à fiche. Elle est simplement contente que sa mère soit là et moi j’oublie tout. Une chose est tout de même indispensable, le bébé doit bien dormir la nuit pour que je puisse me reposer», explique Paula Radcliff.

Katerina Neumannova, la skieuse de fond tchèque, est bien plus performante, elle aussi, après être devenue mère. Côté médical, on ne donne pas vraiment d’explication. «Aucun changement somatique ou hormonal, si ce n’est psychologique, ne permet d’expliquer les exploits de ces super mamans», reconnaît l’endocrinologue consulté.

Dans la gestion de leur carrière, il convient donc pour les sportives de devenir mère au moment le plus opportun. La patineuse Isabelle Delobel est emblématique de cette nouvelle génération de sportives qui jonglent entre vie privée et calendrier des grands rendez-vous.

La championne française n’a pas attendu d’avoir enfanté pour annoncer sa présence lors des Jeux Olympiques de Vancouver en février prochain. «Au huitième mois, on va peut être effectivement limiter les portées lors des entraînements», s’amuse celle qui compte boucler sa carrière par un titre olympique. «Cette grossesse m’a donné du courage. Les envies de femme enceinte que j’ai eues sont celles de victoire.»

Le voici, le secret de la pêche des mères championnes: c’est le fruit de leurs envies de femme enceinte!

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Et du côté des hommes? Le retour de Lance Armstrong a été très médiatisé, tout comme ceux d’Albrecht, de Massa, de Lambiel, de Gasquet, de Rasmussen, de Phelps ou de Vinokourov. Les champions suspendent leur carrière au sommet de leur gloire, après un accident, une baisse de régime, parce que suspendus pour infraction aux règles antidopage ou par lassitude. Et puis ils reviennent en fanfare.

Bien qu’ils soient souvent plusieurs fois père, je ne connais qu’un seul d’exemple d’interruption de carrière pour cause de paternité: le mari de Kim Clijsters, Brian Lynch, vient de mettre sa carrière de basketteur professionnel entre parenthèses. Histoire de suivre Kim tout en restant auprès de leur petite fille Jada.

C’est une exception. Tout juste si les footballeurs loupent un match, les skieurs une épreuve, les cyclistes une course pour être au côté de la mère de leur enfant lors de l’accouchement. En plein championnats du monde ou Jeux olympiques, il n’en est tout simplement pas question. Quel bon coup Federer a joué en programmant la naissance de ses jumelles entre deux grands tournois…