KAPITAL

L’aéroport est un média

Grâce aux affiches placées dans ses couloirs, l’aéroport de Genève peut gagner jusqu’à 6 millions de francs par an. Portrait d’un support publicitaire méconnu.

L’Aéroport International de Genève (AIG) fait partie du peloton de tête européen en matière de revenus publicitaires. Ils lui rapportent 5 à 6 millions par année. «Ce résultat est dû à la spécificité du marché genevois, siège de plusieurs banques, de marques horlogères ou de luxe et d’organisations internationales, explique Pierre Germain, directeur commercial et financier de l’AIG. Ce sont des annonceurs à forte valeur ajoutée.» On oublie souvent qu’un aéroport ne gagne pas seulement de l’argent grâce aux avions. Les chiffres 2004 de Cointrin montrent que les recettes non aéronautiques rapportent même davantage que ce qui touche au trafic aérien. Ainsi, l’année dernière, 53 millions de francs provenaient des redevances commerciales versées par les boutiques, restaurants, loueurs de voitures, banques et panneaux publicitaires. «Nous effectuons des comparaisons internationales des taux et concessions, pour connaître les pratiques de nos confrères européens, explique Pierre Germain. Et nous constatons que l’équilibre atteint à Genève est tout à fait satisfaisant.»

A l’aéroport de Genève, l’affichage publicitaire est géré par l’agence Bercher qui en détient l’exclusivité. Fondée en 1949, cette agence s’est spécialisée dès les années 60 dans la communication en aéroport. Elle a rejoint la Société Générale d’Affichage (SGA) en 1991 et fait maintenant partie du groupe Affichage Holding.

Pour son travail à Cointrin, l’agence Bercher touche une commission qui peut aller jusqu’à 40% selon les types de contrats. «La régie publicitaire a davantage de travail à fournir pour un contrat de courte durée, donc la rémunération est plus importante. De plus, Bercher assure non seulement la commercialisation des espaces, mais aussi leur gestion et leur entretien, ce qui représente un travail considérable», précise Pierre Germain.

Avec ses 8,6 millions de passagers annuels, l’aéroport genevois bénéficie d’une audience intéressante, tant en matière quantitative que qualitative.

Et les tarifs? «Ils varient selon l’emplacement du panneau, explique Noël Grandjean, directeur de l’agence Bercher. Ils dépendent surtout de l’audience, un panneau situé dans le tunnel central où passent 35% des arrivées n’ayant pas la même valeur que s’il est dans le tunnel ouest où seuls 6% des arrivées transitent.» Durée minimum du contrat: une années. «La moyenne de nos contrats est de trois ans. Et, en général, nos clients renouvellent deux ou trois fois», précise le directeur de Bercher.

Certains clients s’affichent à l’aéroport depuis des décennies, comme le fabricant genevois de crayons Caran d’Ache ou la multinationale DuPont de Nemours. Autres habituées des couloirs de Cointrin, les banques privées genevoises, clientes depuis au moins 20 ans. «Actuellement, l’horlogerie représente 40% de notre clientèle, la finance 20%, le tourisme 9% et les cosmétiques 3%», précise Noël Grandjean.

Selon leur budget, l’agence Bercher propose à ses clients une couverture plus étendue à l’intérieur de l’Aéroport. «Nous leur expliquons que Cointrin est comme une ville. Quand un annonceur lance une campagne de publicité dans les rues, il veut être vu partout. Il en va de même pour l’aéroport: le tunnel central ne suffit pas, il faut aussi d’autres emplacements.»

Même si les couloirs de l’aéroport compte nombre de clients fidèles, le démarchage demeure essentiel pour trouver de nouveaux annonceurs. «L’époque où les annonceurs étaient sur liste d’attente est bien révolue, dit Noël Grandjean. Il faut désormais aller les chercher.»

Des clients que l’AIG se réserve le droit de sélectionner, comme l’explique son directeur commercial et financier. «Nous avons parfois dû refuser des publicités au goût douteux ou qui comportaient des messages à interprétation gênante, susceptibles de créer des problèmes diplomatiques vu la place de Genève sur la scène internationale…»