TECHNOPHILE

Comment la souris d’ordinateur a pris forme à Lausanne

La souris s’est imposée comme un élément incontournable de nos interactions avec la technologie. Mais saviez-vous que des chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) ont contribué de manière significative à son évolution ?

L’histoire de la souris d’ordinateur débute dans les années 1960 lorsque Douglas Engelbart, un ingénieur au sein du Stanford Research Institute en Californie, imagine un dispositif permettant de contrôler un écran d’ordinateur à l’aide d’une petite boîte avec un bouton. Ce premier périphérique est doté de deux roues métalliques et utilise des potentiomètres pour mesurer leur déplacement, ce qui entraîne certaines limites techniques.

Au cours de la décennie suivante, c’est à Lausanne, au sein de ce qui allait devenir le Laboratoire de micro-informatique (LAMI), dirigé par Jean-Daniel Nicoud, que la souris d’ordinateur va connaître une évolution majeure. «À l’époque, je m’intéressais aux moyens permettant de rendre plus efficaces les interfaces homme-machine, en ayant notamment l’intuition qu’il fallait améliorer l’interaction avec l’écran», explique le chercheur, aujourd’hui à la retraite.

Ayant eu l’occasion de rendre visite à Douglas Engelbart, Jean-Daniel Nicoud s’attelle à améliorer l’invention initiale. Avec son équipe, il met au point en 1974 une première souris dotée d’un encodeur optique, alors que les autres modèles existant jusque-là étaient purement mécaniques.

En parallèle, le pionnier de l’EPFL met également au point le Smaky, le premier micro-ordinateur de Suisse, qui s’est vendu à plus de 4500 exemplaires dans ses différentes versions. «En tant que professeur de l’EPFL, j’avais la chance d’avoir tant les moyens que la liberté nécessaires pour procéder à de tels développements, et de pouvoir attirer des étudiants talentueux du fait de ces activités innovantes.»

Balle de ping-pong et forme hémisphérique

En 1976, les deux roues métalliques de la Souris 2 du LAMI sont remplacées par une balle de pingpong, ce qui permet d’améliorer son utilisation. L’aventure prend une nouvelle envergure fin 1979, quand Niklaus Wirth, inventeur du langage Pascal à l’École polytechnique fédérale de Zurich, passe une commande de 30 souris au LAMI. L’ingénieur André Guignard, horloger de formation, conçoit et fabrique alors la Souris 4, dotée d’une forme hémisphérique, plus ergonomique. C’est ensuite la société Dépraz qui reprend la fabrication, dans ses ateliers de la Vallée de Joux. Elles s’arrachent comme des petits pains, notamment aux États-Unis, où elles sont distribuées par la jeune société vaudoise Logitech, devenue, depuis, l’un des leaders mondiaux de la production de périphériques informatiques.

«Les fondateurs de Logitech – Daniel Borel, Pierluigi Zappacosta et Giacomo Marini – ont réussi à lancer une fabrication plus fiable et permis de livrer des souris en plus grande quantité», explique Cédric Gaudin, président de l’association Les Amis du Musée Bolo, le musée suisse de l’informatique, de la culture numérique et du jeu vidéo, qui expose certaines de ces pièces marquantes de l’histoire informatique au sein de sa collection permanente, installée dans l’un des bâtiments de l’EPFL. À noter que la prochaine exposition du musée sera consacrée à l’histoire et l’évolution du micro-ordinateur Smaky.

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Une version de cet article réalisé par Large Network est parue dans The Lausanner (n° 12).