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Pourquoi Hani Ramadan doit être suspendu

Limoger un enseignant qui professe la lapidation n’a vraiment rien d’une atteinte à la liberté d’expression. Pour notre chroniqueur, cela relève du juste droit de l’employeur de choisir ses employés.

Quelle mouche a bien pu piquer Hani Ramadan pour qu’il envoie au «Monde» un article aussi grossièrement confit de tartuferie cléricale que ce mauvais plaidoyer en faveur de «La charia incomprise»?

Quand je le lus, le 10 septembre dernier, ma première réaction, une fois la surprise passée, fut de croire à une rupture entre les deux frères.

Tarik, le grand penseur de la famille, étant alors aux prises avec un tribunal lyonnais, je me suis dit que son frère lui lançait gentiment une peau de banane dans les jambes et que «Le Monde» se faisait perfidement un plaisir de l’étaler un peu plus. Sinon comment s’expliquer de telles inepties?

Lisez: «La lapidation prévue en cas d’adultère n’est envisageable que si quatre personnes ont été des témoins oculaires du délit. Ce qui est pratiquement irréalisable, à moins que le musulman (notez bien: «le musulman», pas «la musulmane») choisisse d’avouer sa faute.»

Et puis: «Une grossesse illégitime peut également entraîner une mise en accusation. Mais en affirmant avoir été contrainte ou victime d’un viol, ou en soutenant que l’enfant est bien légitime, la femme échappera à toute sanction.» Ce n’est pas la charia, c’est le paradis!

Et encore: «Parce qu’il s’agit d’une injonction divine, la rigueur de cette loi est éprouvante pour les musulmans eux-mêmes. Elle constitue une punition, mais aussi une forme de purification. Il est interdit d’insulter le coupable. Après sa mort on prie pour lui.»

Ce n’est plus un article, c’est l’ânonnement d’un dévot! Et je vous épargne les délicatesses sur le sida, juste châtiment de l’homosexualité et de la dépravation des moeurs.

A relire ce papier aujourd’hui, je ne crois plus que Hani Ramadan ait voulu gêner l’action de son frère Tarik. Je crois qu’il est tout simplement bête. De cette bêtise crasse qui est l’apanage de nombre de fanatiques que sécrètent toutes les religions au monde. Que ce sombre fanatique ait fait ses classes dans la ville de Calvin ne change rien à l’affaire, les voûtes de Saint-Pierre ont vibré au cours des siècles au son de stupidités aussi affligeantes que celles proférées par Hani Ramadan.

En suspendant le bonhomme et en ouvrant une procédure de licenciement, Martine Brunschig Graf fait œuvre de salubrité publique.

Quand on connaît l’importance du rôle des profs de français dans les classes du Cycle d’Orientation, l’influence qu’ils ont sur des adolescents qui sont précisément à l’âge où l’on se pose les grandes questions, mettre à la porte un enseignant qui professe la lapidation de l’homme ou de la femme adultère (et prône donc la peine de mort), qui considère une maladie aussi répandue que le sida comme une punition de Dieu, qui voue aux géhennes les homosexuels, n’a vraiment rien d’une atteinte à la liberté d’expression.

Cela relève du juste droit de l’employeur de choisir ses employés en respectant un cahier des charges qui veut que l’école publique soit laïque. Cette laïcité n’est pas tombée du ciel, elle a été acquise après de longues luttes, il n’y a aucune raison de la galvauder pour défendre des grenouilles d’églises ou de mosquées.

Privé de son enseignement, Hani Ramadan n’est pas privé de sa liberté d’expression. Personne ne l’empêche d’aller clamer ses convictions rétrogrades et moyenâgeuses dans les mosquées du monde entier, ni d’aller les confronter à celles d’autres intégristes du côté d’Ecône, ni même de se jucher sur un tabouret à Plainpalais et d’apostropher – à ses risques et périls – le passant pour lui vanter les mérites de la lapidation de la femme adultère. Il permettrait au moins aux badauds de rire un bon coup. Et aux éditorialistes dominicaux de ne pas invoquer Voltaire en vain.

Les frères Ramadan ne poursuivent pas qu’un but religieux, mais développent depuis des années une stratégie politique visant à asseoir l’islam, et singulièrement une de ses versions néofondamentalistes, parmi les grands courants de pensée européens. Plus fin et beaucoup plus habile que Hani, Tarik Ramadan est devenu la coqueluche des médias qu’il séduit par un art très jésuitique de la dispute théologico-politique.

Je ne pense pas malgré tout qu’il soit très satisfait de l’esclandre provoqué par son frère. Ce sont des années d’un patient travail qui sont en train de voler en éclat.