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La nouvelle vague cycliste

Bon pour la santé, pratique, écolo… On se déplace deux fois plus aujourd’hui à vélo qu’au début des années 2000. Mais les métropoles tardent à s’adapter.

Explosion de la population urbaine et du prix des carburants, pollution et congestion du trafic obligent, «le vélo est aujourd’hui la solution la plus efficace pour se déplacer en ville», explique Gebhard Wulfhorst, spécialiste en planification des déplacements urbains à la Technische Universität München (TUM). «La distance joue un rôle mais dans les métropoles, le vélo est au moins aussi rapide que les transports en commun.» Sans parler des trajets en voitures individuelles: une étude de l’Union cycliste internationale a montré que la voiture d’un habitant de Mexico City roulait en moyenne à… 4 km/h.

Si les Pays-Bas ou l’Allemagne ont toujours su entretenir une culture du vélo particulièrement forte, des pays comme la France remontent progressivement en selle après plusieurs décennies de déclin: le nombre de pistes cyclables y augmente année après année et les ventes de bicyclettes conçues pour les déplacements en ville progressent, avec plus de 300’000 vélos urbains vendus chaque année. «Même aux Etats-Unis, longtemps rétifs, leur utilisation augmente», pointe Thomas Alexander Sick Nielsen, qui consacre ses recherches aux politiques de transport à la Danmarks Tekniske Universitet (DTU).

Nouveaux cycles, nouveaux usages

Toute une série d’innovations sont venues favoriser ce renouveau. «L’amélioration des matériaux a rendu les vélos plus légers et de nouveaux modes de propulsion comme l’assistance électrique sont apparus», décrypte le chercheur danois. Si ces évolutions contribuent à faciliter la pratique du cyclisme dans des villes à fort dénivelé, elles permettent aussi de toucher de nouveaux publics, notamment les seniors. Et au-delà, d’après Gebhard Wulfhorst: «L’un de nos laboratoires a montré que les jeunes générations modifient également leurs habitudes. Elles n’utilisent plus seulement leur vélo pour se rendre au travail mais également pour faire leurs courses: l’aide du moteur permet de supporter le poids supplémentaire.»

Résultat: en France, les VAE (vélos à assistance électrique) voient leurs ventes progresser de 15% par an. Et l’inventivité ne fait pas défaut: dernier produit en date, le Halfbike, un appareil qui se situe entre la trottinette et le vélo. S’il est bien doté d’un pédalier, le Halfbike n’a pas de selle et son conducteur doit se pencher pour s’orienter. De quoi séduire une clientèle jeune et sportive — et un brin branchée…

Autre phénomène, le développement des usages collaboratifs qui viennent concurrencer les réseaux de vélos en libre-service déjà dans les mœurs, comme le Bicing barcelonais ou le BIXI de Montréal. En témoigne le succès de Spinlister, une appli de location de vélos entre particuliers: déjà présente dans 60 pays, la plateforme veut tout simplement révolutionner le partage des deux-roues dans les grandes villes — ce qui n’ira pas de soi, certaines étant plus en avance que d’autre.

Rendre la ville plus sûre

Copenhague, Berne, Munich… Pourquoi ces villes réussissent-elles mieux que d’autres à laisser plus de place au vélo? Que manque-t-il aux autres? Le problème ne serait ni géographique ni météorologique, à en croire Gebhard Wulfhorst: «Les conditions climatiques jouent un rôle, mais les Québécois ou les Hollandais prouvent tous les jours qu’on peut circuler à vélo sur la neige ou sous la pluie, pour peu qu’on soit équipé correctement».

Les vrais freins seraient à chercher ailleurs et notamment du côté de la sécurité, pour Isabelle Lesens, experte en politiques cyclables et conseillère municipale dans le 15e arrondissement de Paris: «Faire du vélo est moins dangereux en ville qu’en rase campagne; en revanche, cela peut être effrayant». La faute à un environnement urbain encore mal maîtrisé? Oui, selon l’élue parisienne: «L’effort public doit avant tout porter sur ce point au cours des vingt prochaines années. Il ne suffit pas de multiplier les vélos en libre-service, même s’ils ont leur place dans des métropoles comme Londres ou Paris où il est compliqué de stocker des vélos chez soi. Développer la pratique du vélo, c’est d’abord adapter l’espace urbain pour le rendre plus sûr et plus pratique pour les cyclistes.»

L’argument financier

Un point de vue largement partagé par Gebhard Wulfhorst: «Il faut créer les conditions qui permettent de prendre son vélo sans se poser de questions; la clé, c’est l’accessibilité de l’espace urbain, la complémentarité des modes de déplacement, l’existence de parkings sécurisés…» Autrement dit, faire en sorte qu’il soit pratique de circuler à vélo, de porte à porte. «La répartition de l’espace entre les voies réservées aux voitures et aux vélos doit être plus claire. Plus la demande des citadins sera forte, plus les pouvoirs publics se pencheront sur la question.»

Problème éminemment politique, le nécessaire aménagement urbain pose une question de coût. Un argument réfuté par Isabelle Lesens: «Déployer un réseau de vélos en libre-service coûte plus cher aux collectivités que de créer des voies réservées aux véhicules non motorisés ou de multiplier les garages sécurisés». Le reste suivrait d’autant plus naturellement, à l’en croire, que les gens utiliseraient plus volontiers leur propre vélo qu’une machine interchangeable. Le vélo, enjeu urbain et sentimental?
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Une version de cet article est parue dans le magazine Technologist (no 8).

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